Au cours d’un conseil houleux, le budget de Chirongui rejeté

Les tensions autour de la mairie depuis la fin du mandat d’Andhanouni Saïd ne sont jamais retombées à Chirongui. Ce mardi soir, le maire Bihaki Daouda a été mis en minorité sur le vote du budget 2023. L’ambiance était tellement électrique que les élus ont été la cible d’insultes, de jets d’œufs et qu’une conseillère municipale est annoncée blessée. Rien ne semble indiquer une accalmie en tout cas (voir encadré).

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La majorité formée par Bihaki Daouda, en mai 2022, a rapidement volé en éclats.

Le budget de la mairie de Chirongui va-t-il être décidé par la préfecture de Mayotte ? C’est parti pour, le conseil municipal n’a pas validé son budget 2023 avant la date limite fixée ce samedi 15 avril. Deux tentatives, dont la dernière, ce mardi soir, au pôle culturel de Chirongui, se sont avérées infructueuses et ont même provoqué des scènes irréelles. En effet, le conseil de mardi s’est fini accompagner d’insultes et de jets d’œufs sur les élus. Chaque point à l’ordre du jour a été rejeté sous les huées des 200 personnes présentes. La gendarmerie a été appelée pour éviter que ça n’aille plus loin. Chahutée, la conseillère municipale Tahamida Ibrahim aurait même été blessée. Youssouf Abdallah, autre conseiller Les Républicains, nous indique « qu’elle a cinq jours d’ITT ».

Pour celui qui a été maire par intérim après la démission forcée d’Andhanouni Saïd, c’est clair, « c’est le maire qui a provoqué cette situation ». Il voit dans le choix de la salle une manière de mettre la pression pour qu’ils votent le budget déjà rejeté le samedi 8 avril dans la salle du conseil municipal. Le public serait alors composé de partisans du maire, « dont beaucoup sont de Tsimkoura ». « Je démens ces allégations », répond de son côté Bihaki Daouda. Pour le premier magistrat élu le 17 mai 2022, il comptait simplement rendre plus facilement accessible cette séance à un public qu’il pressentait nombreux. Selon lui, il s’agissait plutôt d’habitants venus exprimer un ras-le-bol envers les élus tous bords confondus. « Nous étions aussi la cible des huées. Les habitants sont mécontents, c’est normal. A l’extérieur, on m’a encore incité à voter le budget », raconte ce cadre de la Caisse de sécurité sociale de Mayotte.

Deux victoires judiciaires pour les Républicains

Ça ne sera pas le cas. Ne pouvant obtenir de consensus, le maire a décidé de jeter l’éponge et ne retentera pas un troisième acte. La Chambre régionale des comptes va donc se pencher sur les finances de la commune pour déterminer un budget à proposer à la préfecture de Mayotte. Une mesure exceptionnelle qui « est de la responsabilité des conseillers Les Républicains », estime Bihaki Daouda. Pour rappel, le climat politique est resté tendu depuis que le maire élu en 2020 (Andhanouni Saïd) a été condamné par la justice pour abus de biens sociaux, prise illégale d’intérêts et favoritisme en mai 2022 (il a fait appel). Son successeur, Bihaki Daouda, a tenté de rétablir le calme en incorporant des élus Les Républicains, les siens de Maesha et des proches de l’ancienne maire, Roukia Lihadji. « Cette majorité macédoine », comme il l’appelle, n’a pas tenu très longtemps. Las et en conflit permanent avec le maire en raison du passif compliqué de la commune, les Républicains ralliés ont fait machine arrière et ont rejoint l’opposition, qui de fait est devenue une majorité.

Ces derniers ont remporté deux importantes victoires sur le terrain judiciaire récemment. Devant le tribunal administratif de Mayotte, le 16 novembre 2022, ils ont obtenu que deux décisions de la mairie soient de nouveau abordées en conseil municipal, le Conseil d’État allant dans le même sens. La première concerne la délégations générale des compétences du maire. L’autre pointe la décision du maire d’avoir gardé, dès le 17 mai 2022, un poste de directeur de cabinet. Youssouf Abdallah explique que « ce n’est pas nécessaire dans une commune de moins de 10.000 habitants ». Il reconnaît toutefois que la majorité sous l’ère Saïd, dont il était adjoint à la sécurité, avait déjà fait ce choix « pour aider le maire ». Ce sont ces deux éléments qui bloquent tout aujourd’hui. Samedi, ils étaient bien à l’ordre du jour, mais les deux camps ne partagent pas la même opinion sur le fait de « traiter de la question de la délibération ». Pour les LR, il fallait qu’ils soient soumis au vote, alors que le maire souligne qu’il ne fallait qu’en débattre. L’ex-maire par intérim invoque alors cette situation pour expliquer pourquoi les LR ont voté contre tous les points à l’ordre du jour, dont les deux comptes du budget 2023 (18 voix contre, 12 pour et un conseiller absent), ce mardi. Il défend toutefois que l’idée que « la porte est toujours ouverte » pour trouver un arrangement d’ici le 15 avril.

« Ce sont eux qui ont fermé la porte », rétorque le maire, qui ne s’inquiète pas pour les investissements déjà en cours, mais s’attend à ce que la Chambre régionale des comptes revienne sur « les projets de cette année » dans le budget, qui devra ensuite recevoir l’aval de la préfecture.

Un blocage politique jusqu’à quand ?

Avec une majorité hostile au maire, comment Chirongui peut s’en sortir ? Outre l’apaisement des débats entre les deux camps, il existe plusieurs autres solutions. La majorité LR, si elle démissionne, peut provoquer de nouvelles élections. Un pari risqué certes, mais qui pourrait déboucher sur l’émergence d’une majorité claire, qui pourrait enfin élire son chef de file à la tête de la municipalité.

L’autre issue pourrait venir de la justice, des anciens adjoints et conseillers restent liés à l’affaire Andhanouni Saïd, certains ont même été condamnés en première instance. Le procès en appel ou d’autres éléments qui intéressent la justice pourraient amener à changer la donne au sein du conseil municipal.

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