Entamées en novembre 2020, les Assises de la sécurité ont fait l’objet d’une réunion de bilan, ce jeudi 22 septembre, à la mairie de Mamoudzou. Si de nombreux points ont pu connaître une amélioration, préfecture, mairies, Département et associations s’accordent sur le fait qu’il y a encore beaucoup à faire.
Dans les rangs du public, ce jeudi, on trépignait d’impatience avant de prendre le micro. L’opportunité d’interpeller les élus et le préfet de Mayotte, Thierry Suquet, était trop tentante pour les associations et les collectifs. Cela fait deux ans maintenant que les Assisses de la sécurité ont débuté, et au vu de violence que connaît actuellement le territoire, il était urgent de faire un point.
Qui a pu participer ?
La maire de Mamoudzou étant absent (il est intervenu par visioconférence à la fin), c’est son premier adjoint, Dhinouraine M’Colo Mainty, qui a assuré la tenue de cette réunion-bilan. À ses côtés, le président de l’association des maires de Mayotte, Madi Madi Souf, le délégué du gouvernement et la vice-présidente du conseil départemental, Zouhourya Mouayad Ben, ont tenté d’apporter des réponses. « Mayotte ne doit pas être réduite à la violence. La sécurité est l’affaire de tous », a rappelé cette dernière, en introduction. Quelques maires, le recteur Gilles Halbout, le sénateur Abdallah Hassani, mais également des représentants des collectifs étaient également là.
De quelle manière le bilan a-t-il été présenté ?
Au vu des nombreuses questions que la sécurité soulève à Mayotte, la mairie de Mamoudzou a opté pour des thématiques dans lesquels figuraient plusieurs mesures. Chacune était « réalisée », « en cours » ou « non réalisée ». Par exemple, la volonté en 2020 d’avoir davantage d’intercepteurs pour lutter contre l’immigration figurait en vert, de nouveaux moyens étant obtenus et promis. Sur le thème « conforter la présence des forces de l’ordre », la collectivité a précisé que l’effectif de la police municipale passe de 38 à 65 agents d’ici la fin de l’année.
Quels sont les manques identifiés ?
Ils sont nombreux, ont concédé les participants, même quand les thèmes sont bien évalués. Ainsi, les mesures demandées dans l’éducation ont débouché pour la plupart sur des actions. « Les gens qui me connaissent savent que je ne peux pas m’en satisfaire. Je suis conscient qu’il y a beaucoup de choses sur lesquelles il faut progresser », a admis le recteur, évoquant par exemple les langues régionales qui ne sont pas enseignées au collège et au lycée. Zouhourya Mouayad Ben est allée plus loin et a déploré que « tous les signaux sont rouges, nos enfants n’ont pas la tête à l’école », citant le cas d’une classe de CE1 de Koungou où les élèves dessinent des machettes ou des voitures quand on leur demande à quoi ils pensent.
Est-ce qu’il y a eu des mesures annoncées ?
Ce n’était pas à l’ordre du jour. Le premier adjoint l’a répété quelques fois, il s’agissait de faire un point d’étape. Les conducteurs de bus, mécontents qu’aucune mesure ne soit énoncée, ont d’ailleurs préféré quitter la salle avant que la réunion se termine. Le bilan n’est pas tombé cependant dans l’oreille d’un sourd. « Il faut que l’on soit capable de cibler les actions à mener par village, par quartier », a déclaré le préfet, qui sait à quel point son action est scrutée avec la vague de violences actuelle.
Pourquoi le transport scolaire a retenu l’attention ?
Alors qu’au même moment, une réunion avait lieu à la préfecture pour évoquer la sécurisation du transport scolaire, une dizaine de conducteurs de bus ont assisté à la séance de Mamoudzou. Très préoccupés par la violence de ces dernières semaines, ils ont déploré que le 12 septembre dernier, l’un de leurs collègues s’est retrouvé « à genoux, un upanga sur le cou ». Les collectifs ont aussi insisté chacun leur tour sur ce point. Fabrice Grolleau, responsable contrôle, médiation, sûreté de Transdev Outre-mer, a confirmé de façon chiffrée le problème. « Il y a 78% d’incidents de plus par rapport à la rentrée 2021, ça grimpe à 200% pour Mamoudzou », a-t-il noté. Ainsi, le sud de la ville chef-lieu et la commune de Koungou connaissent régulièrement des attaques de bus.
L’immigration a-t-elle abordée ?
Le thème a été évoqué à de rares occasions. Haïria Abdallah, attachée parlementaire d’Estelle Youssouffa, et Safina Soula, présidente du collectif des citoyens 2018, ont ainsi demandé le bilan d’associations qui aident à l’insertion de personnes en situation irrégulière. Dhinouraine M’Colo Mainty leur a indiqué « que ce n’est pas l’objet de la réunion ». La coopération avec les pays voisins a aussi été rapidement abordée par le recteur et le sénateur. Le premier a fait part d’une autre mesure qu’il souhaite ajouter. Il s’est déclaré « volontaire » pour « aller sur d’autres îles former du personnel et construire des écoles ».
Quel est l’avenir de ces Assises ?
Une autre réunion de ce type est d’ores et déjà prévue en 2023, a annoncé le maire de Mamoudzou. Mais au vu du nombre de thématiques et de la promesse d’intégrer les collectifs dans les discussions, Madi Madi Souf a souligné « qu’il y aura d’autres réunions d’ici là sous formes de comités restreints ».