À Pamandzi, les clignotants sont au rouge

La Chambre régionale des comptes La Réunion-Mayotte (CRC) évoque la gestion calamiteuse du système scolaire dans la commune de Pamandzi dans un rapport publié ce mercredi. Entre restriction du droit à l’éducation pour les enfants d’immigrés clandestins, l’absence de restauration scolaire, l’augmentation des tarifs des services de garderie, le doublement du nombre d’animateurs non qualifiés, le manque de suivi des subventions accordées pour la réhabilitation des écoles, la liste des manquements est longue. 

Au tour de Pamandzi d’être épinglée par la Chambre régionale des comptes (CRC) de Mayotte à l’issue d’un contrôle de ses comptes et de sa gestion effectué entre les mois d’août et décembre 2022. Il s’agit ici d’observations définitives arrêtées en mars dernier suite à l’exercice de la contradiction pour les habitués pour mes connaisseurs des règles de fonctionnement de cette juridiction. Des observations assorties de pas moins de « dix recommandations dont six de rappel d’une règle » précise le rapport daté de ce mercredi 5 juillet.

Pas de rotation dans les écoles

Au premier rang des faits reprochés à la municipalité du président de l’association des maires de Mayotte, Madi Madi Souf, le non-respect de la convention européenne des droits de l’homme et la convention internationale des droits de l’enfant. Ainsi apprend-on que Pamandzi « impose des conditions d’inscription à l’école plus restrictives que celles fixées par la réglementation nationale » aux seules fins d’empêcher la scolarisation des enfants issus de l’immigration irrégulière. La CRC note que sur les 1.734 élèves (sur une population globale de 11.802 habitants recensés au 1er janvier 2017) répartis sur huit écoles à la rentrée de 2022, le nombre aurait diminué de moitié sur seulement cinq ans au point que le système des rotations scolaires subit partout dans l’île serait ici inconnu.

À l’honorable institution de noter en gras un autre manquement, « alors que la commune a construit et équipé trois réfectoires neufs, elle n’a pas mis en place de service de restauration scolaire et se contente de servir des collations à plus de trois-quarts des élèves. Seule une minorité des enfants scolarisés dans l’une des huit écoles de la commune peut bénéficier de repas chauds, grâce à l’initiative d’une association de parents d’élèves dynamique ». Il est également reproché à la commune de Pamandzi d’assurer du périscolaire en dehors de tout cadre contractuel sans projet éducatif territorial depuis la fin de l’année scolaire 2020/2021. Les sages pointent du doigt une augmentation de l’offre de service de garderie en 2022 (le matin en particulier) avec des prix multipliés par six pour les parents d’élèves. Cela a eu pour conséquence de diminuer de 50% le nombre d’élèves inscrits alors que paradoxalement, le nombre d’encadrants est supérieur au minimum requis par les textes, leur nombre ayant doublé entre 2017 et 2021.

Incapacité de recouvrir les subventions

Toujours sur les encadrants, la CRC enfonce le clou avec cette précision. « Près de la moitié d’entre eux n’est pas qualifié. Leur temps de travail est en outre très insuffisant et ne représente que les deux tiers de la durée légale du travail effectif. » Le rapporteur souligne une contradiction majeure. Pamandzi consacre deux tiers de ses charges de gestion au fonctionnement de ses écoles alors qu’elle est incapable de leur fournir les moyens de bien fonctionner, en particulier pour ce qui relève des fournitures et des moyens de transports. « Elle a plutôt fait le choix de de procéder à de nombreux recrutements », notamment au premier semestre de 2020, sous la mandature de l’ancien maire, Siaka Hamidou. Détail plus croustillant encore, la commune ne serait même pas capable de suivre les subventions qui lui sont attribuées au titre de la rénovation des écoles, pas plus qu’elle ne se préoccupe de récupérer les recettes dont elle bénéficie de l’Agence Française de Développement (AFD) en préfinancements intégraux.

Des taxes en hausse pour renflouer les caisses

L’instance de contrôle soulève un autre problème connu de tous les habitants de la commune, le défaut criant d’ingénierie pour dans les services communaux pour la bonne conduite d’investissement important. C’est le cas des travaux réalisables à court terme sur les écoles Pamandzi 1 et 2, évalués à neuf millions d’euros. Il a fallu appeler les services de l’État à la rescousse. Autre élément connu du public mentionné dans ce rapport, la situation financière critique de Pamandzi avec un déficit de 3,5 millions d’euros (compte administratif 2021) que ne cesse de dénoncer l’opposition municipale élargie à une partie des adjoints au maire (voir les éditions de FI de début juin 2023). La CRC précise que c’est à sa demande que le délégué du gouvernement à Mayotte, Thierry Suquet, a arrêté le budget primitif 2022 de la commune et l’a rendu exécutoire.

Il est désormais acquis que les portefeuilles des contribuables pamandziens seront mis à rude épreuve au cours des deux prochaines années en vue de redresser la barre des finances communales. « Elle n’a pas d’autres solutions en 2023 et 2024 que d’augmenter à nouveau les taux de la fiscalité directe locale et de réduire le poids exorbitant de ses charges de personnel », précise la CRC, avant de préconiser la mise en place d’un règlement budgétaire et financier susceptible de permettre à Pamandzi de sortir progressivement de la situation exsangue dans laquelle elle est empêtrée actuellement.

Mayotte Hebdo de la semaine

Mayotte Hebdo n°1115

Le journal des jeunes

À la Une