Un réseau d’arnaqueurs aux « faux billets » devant le tribunal correctionnel de Mamoudzou

Six personnes étaient jugées, ce mercredi 13 juillet, pour avoir escroqué leurs victimes avec la technique dite du « wash-wash ». Promettant une multiplication des billets par une technique bien à eux, ils prétextaient ensuite que le premier essai n’avait pas marché pour demander davantage d’argent.

Ils sont que trois sur le banc des victimes, ce mercredi 13 juillet, au tribunal correctionnel de Mamoudzou, mais ils pourraient être bien plus. Tous ont croisé la même bande de six prévenus (l’un étant absent et sous mandat d’arrêt) jugés pour « escroquerie ». Ces derniers proposaient une multiplication des billets par un procédé réalisé dans « leur laboratoire ». Les victimes n’avaient qu’à leur prêter une forte somme d’argent et le tour était joué. La complexité du processus repose sur le fait qu’il n’y ait pas de véritables « faux billets » dans cette histoire. Il s’agit à chaque fois de vrais fournis délibérément. Les escrocs leur appliquent alors une encre rouge dessus, préviennent les victimes que la manœuvre n’a pas marché cette fois et en profitent pour demander davantage pour qu’ils puissent rattraper le coup. Inquiets de l’état de leur investissement, ces dernières ne se méfient pas et rajoutent une nouvelle somme. En tout, plus de 80.000 euros (au moins) sont ainsi subtilisés sur la période 2019-2020.

« C’était comme de la magie », explique un jeune homme qui s’est fait avoir. Entré en contact avec la bande au moment de vendre son scooter, il ne s’est pas méfié quand on lui a promis de « fortifier (sic) son argent ». Désirant rejoindre sa compagne à La Réunion, il donne une première fois 8.000 euros, puis 8.500 euros à quelques membres du réseau. Ce n’est qu’à l’instant où il ouvre le dernier sac poubelle qu’il se rend compte de la supercherie. Des liasses de papiers en très mauvais état se trouvent en lieu et place de son argent promis. « Comment un garçon honnête comme vous peut croire qu’on peut multiplier son argent comme ça ? » demande Chantal Combeau, la présidente du tribunal correctionnel. « Je ne sais pas, je suis méfiant d’habitude », reconnaît la victime, penaude.

Des indépendants qui travaillent ensemble

Le pilier du réseau, selon les écoutes téléphoniques et les auditions, serait un Camerounais de 42 ans, arrivé à Mayotte en 2017. Plutôt costaud, mais obligé de comparaître assis à cause de problèmes de santé, celui-ci a admis aux enquêteurs avoir arnaqué « une dizaine de personnes ». Il s’est d’ailleurs fait pincer en premier lors d’un contrôle routier en juin 2020 en transportant une glacière remplie de billets sur son scooter. Il avait alors demandé à l’une de ses victimes qui était assise derrière lui de dire à la police que c’était à elle. Cette dernière avait bien évidemment refusé. La compagne du Camerounais, une Malgache de 45 ans, trempait aussi dans la combine, se faisant passer pour la secrétaire du « laboratoire ».  Celle qui est déjà en prison depuis le mois de janvier pour une affaire de faux papiers ne manquait pas d’initiatives puisqu’outre les loyers qu’elle percevait pour des appartements à Pamandzi, elle souhaitait doubler son compagnon, indiquent les écoutes. Un Congolais de 34 ans devait l’y aider, même si lui clame n’être que « le chauffeur » par intermittence.

Les trois autres, deux Comoriens de 37 et 28 ans et un Camerounais de 29 ans (cousin du premier), intervenaient également dans les opérations, voire en montaient de leurs côtés. « On était des indépendants », clame la tête du réseau. Un argument retenu par le substitut du procureur, Max Goldminc, au regard des faits. Dans ses réquisitions, il a souhaité que soit retiré le qualificatif de « bande organisée ». Puis, il a demandé que le tribunal condamne le Camerounais de 42 ans à deux ans de prison ferme, l’ex-compagne à dix-huit mois, le Comorien absent du procès à quinze mois, puis les trois autres à un an de prison. Le délibéré est attendu ce mercredi matin.

Romain Guille est un journaliste avec plus de 10 ans d'expérience dans le domaine, ayant travaillé pour plusieurs publications en France métropolitaine et à Mayotte comme L'Observateur, Mayotte Hebdo et Flash Infos, où il a acquis une expertise dans la production de contenu engageant et informatif pour une variété de publics.

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