La décision de laisser partir ces prisonniers a été est avalisée en conseil des ministres, dans l’unique but de désengorger la maison d’arrêt de Moroni où la surpopulation carcérale a toujours été pointée du doigt. Mais, ces libérations suscitent la controverse. On craint que les agresseurs sexuels une fois dans la nature ne récidivent.
L’information a fait l’effet d’une bombe sur les réseaux sociaux. Mercredi, en fin d’après-midi, la population a appris via une vidéo tournée depuis la prison de Moroni, en présence du procureur général, Soilihi Djae, la libération d’une soixantaine de détenus. Ces vagues de relâchement ont obtenu l’aval du ministre de la Justice comorien, Djae Ahamada Chanfi. Ce dernier avait introduit une note en conseil la semaine dernière, pour réclamer la mise en place d’une opération de désengorgement des prisons, notamment, celle de Moroni.
L’effectif pléthorique de ce centre de détention a toujours été dénoncé par les défenseurs des droits humains. D’où cette mesure. « Nous sommes là pour exécuter un arrêté ministériel« , a déclaré le procureur de la République lors de son intervention au sein du centre pénitencier de Moroni. Selon le magistrat, l’arrêté en question a fixé des critères. Seuls les détenus qui les remplissent ont pu être relâchées rappelait-t-il dans sa déclaration publiée par la chaine CMM. Il a cité entre autres les personnes âgées de plus de 60 ans et les moins de 25 ans ayant tous fait preuve d’un comportement exemplaire, d’une capacité d’intégration sociale et qui auraient purgé plus de la moitié de leurs peines.
Dans son arrêté daté du 28 mars, le ministre de la Justice a indiqué s’être appuyé sur le rapport du gardien en chef de la prison de Moroni et des recommandations émises par les procureurs généraux alertant sur la surpopulation carcérale. Tous les centres pénitenciers du pays sont connus pour leurs conditions de détention peu recommandables : saturation, insalubrité, mais pas que…
Traumatisme des victimes
Un juriste de la place que nous avons interrogé a effectivement confirmé que la décision du Garde des Sceaux visant à désengorger les prisons surpeuplées étaient fondée juridiquement. « Ce sont des mesures qui peuvent être prises par les juges, notamment le juge de l’exécution des peines. Parmi les conditions, il y a la purgation de la moitié des peines« , a précisé notre avocat. En revanche, les auteurs de certaines infractions comme les meurtres, les assassinats, les détournements de deniers publics ou encore les viols sont de facto exclus de la liste.
Normalement, les personnes condamnées pour des faits d’agressions sexuelles, qualifiées par la loi comorienne dans le nouveau code pénal de crime, auraient dû être maintenues. Et cela a été le cas ? Pas sûr puisque l’arrêté ne les as pas mentionnés. Jusqu’à hier, aucun responsable de l’appareil judiciaire n’a souhaité s’exprimer sur le sujet pour donner plus de détails sur cette opération en partie controversée. On ignore sur quelles bases les autorités ont établi la liste des prisonniers. Celle-ci n’a toujours pas été rendue publique. Personne ne peut se targuer de l’avoir consultée non plus.
Mais c’est surtout la libération de certains agresseurs sexuels identifiés et aperçus dehors qui a créé un tollé. Selon le journal La Gazette des Comores, qui a cité les propos du gardien de la prison de Moroni, certains délinquants sexuels mineurs ont bénéficié d’un aménagement de peine. L’opinion craint déjà que ces détenus ne s’adonnent à nouveau à leurs mauvaises pratiques. Croiser son ancien violeur ou agresseur peut être traumatisant pour les victimes. Sans oublier le risque de voir éclater des conflits lorsque les familles de celles-ci seraient tentées de se faire justice. Autant de facteurs qui n’auraient pas été pris en compte estime une partie de la population.