Mouslim Abdourahaman déchu de son mandat de maire de Bouéni

Le tribunal correctionnel de Mamoudzou a tranché, ce mardi 10 décembre. Le maire de Bouéni, Mouslim Abdourahaman, va devoir laisser son siège en raison de l’exécution provisoire qui accompagne sa condamnation pour des délits de favoritisme et de prise illégale d’intérêts entre 2018 et 2022. En effet, il a écopé d’une peine de trois ans de prison dont un an avec sursis, de dix ans d’inéligibilité et d’une interdiction définitive d’exercer dans la fonction publique.

A un an et demi des élections municipales, Bouéni doit se trouver un maire. Mouslim Abdourahaman, qui occupait la fonction depuis 2014, va perdre son mandat suite à la décision de justice du tribunal correctionnel de Mamoudzou de ce mardi 10 décembre. Il a été reconnu coupable de délits de favoritisme et de prise illégale d’intérêts. Ceux-ci ont été exposés, lors d’une audience fleuve, le mardi 26 novembre. Il y avait d’abord ces marchés publics attribués à des entrepreneurs sans mise en concurrence (19 chefs d’entreprise ont déjà été condamnés lors de comparutions sur reconnaissance préalable de culpabilité). Certains étaient même « saucissonnés », ont constaté les magistrats de la Chambre régionale des comptes La Réunion-Mayotte (qui a sorti un rapport salé en 2023) et les enquêteurs de la section de recherches de la gendarmerie. C’est-à-dire que le marché était découpé pour que les tranches ne dépassent pas les montants exigeant un appel d’offres. 

Élagage, curage des caniveaux, déchets, informatique, bureau de maîtrise d’œuvre, location de camionnettes, les domaines sont multiples. « Certains voient la mairie de la Bouéni comme un jackpot ! », s’était exclamé Ludovic Duprey. Le président du tribunal correctionnel s’était étonné de retrouver des marchés qui avaient parfois le même objet comme ceux de l’élagage, mais qui étaient attribués à des sociétés différentes (le gérant restait toutefois le même). « Il y avait beaucoup de turnover aux services techniques, c’était compliqué d’avoir une vision générale », avait répondu celui qui est chargé de développement au conseil départemental de Mayotte. Celui-ci, quand il ne plaidait pas « la méconnaissance », a reporté plusieurs fois la responsabilité sur ses collaborateurs. Les bons de commande, comme les délibérations, portent pourtant sa signature.

Des prises illégales d’intérêts aussi

Outre les marchés publics, la situation des sœurs a attiré également l’attention de la justice pour des prises illégales d’intérêts. Deux d’entre elles ont ainsi pu obtenir un poste à la mairie au cours du mandat, quand d’autres ont bénéficié d’avancement. A chaque fois, le maire était à la signature. Jugé également le 26 novembre pour recel de prise illégale d’intérêts, le beau-frère avait tenté de défendre la légitimité de son parcours pour expliquer en quoi son travail de directeur administratif et financier de la commune de Bouéni était dû à ses compétences et non sa proximité avec le donneur d’ordre, qui était en plus présent lors de l’entretien d’embauche. Ce dernier a été condamné ce mardi à un an de prison avec sursis, à une peine d’inéligibilité de dix ans avec exécution provisoire et d’une amende de 15.000 euros.

Lors de son réquisitoire, le 26 novembre, Yann Le Bris s’était attardé sur le devoir d’exemplarité demandé aux élus. « Le maire, ça doit être l’exemplarité. Un maire qui respecte son mandat doit être intransigeant avec la probité. Il n’a pas à se cacher derrière l’incompétence de ses services. C’est un système non seulement organisé, mais à votre main, Monsieur le maire », avait-il déclaré. Il avait demandé trois ans de prison dont un an avec sursis, une amende de 100.000 euros, une peine d’inéligibilité de cinq ans avec exécution provisoire et une interdiction d’exercer dans la fonction publique pendant trois ans à l’encontre de Mouslim Abdourahaman. L’avocat du maire, maître Jean-Jacques Morel, n’a pas nié les faits de favoritisme, mais a fait remarquer que l’enrichissement personnel n’a pas été prouvé. Le conseil avait surtout trouvé les réquisitions « très lourdes ». « Vous ne pouvez pas le condamner à une mort sociale, à une mort politique, à une mort économique », avait-il plaidé.

Les juges du tribunal correctionnel ont condamné le maire à trois ans de prison dont un an avec sursis. Le mandat de dépôt différé est assorti d’une exécution provisoire : Mouslim Abdourahaman doit donc se présenter au centre pénitentiaire de Majicavo pour purger sa peine. Il a également été condamné à une peine d’inéligibilité de dix ans, d’une interdiction définitive d’exercer dans la fonction publique et à une amende de 50.000. Assorties d’une exécution provisoire, ces peines d’inéligibilité et d’interdiction d’exercer dans la fonction publique ne vont pas avoir que des conséquences à Bouéni ou au Département (où il travaille), où il perd respectivement son mandat et son poste. Mouslim Abdourahaman est également premier vice-président de la communauté de communes du sud de Mayotte et président du Smiam (syndicat mixte d’investissement pour l’aménagement de Mayotte).

Rédacteur en chef de Flash Infos depuis 2022. Passionné de politique, sport et par l'actualité mahoraise, ainsi que champion de saleg en 2024. Passé un long moment par l'ouest de la France, avant d'atterrir dans l'océan Indien au début de l'année 2022. Vous me trouverez davantage à la plage quand je ne suis pas à la rédaction.

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