Trois jeunes employés d’une entreprise de location de voitures ont été condamnés à trois mois de prison avec sursis pour l’une, un an de détention dont six mois avec sursis pour les deux autres, par le tribunal correctionnel de Mamoudzou, ce mardi 2 mai. Ils ont monté avec un homme de main et des mécaniciens officieux un réseau parallèle de sous-location au préjudice de leur société. Un autre prévenu, policier de profession, bénéficiait des largesses du système sans rendre, en plus, les véhicules loués.
Les relations professionnelles ou amicales paraissent bien froides désormais entre les trois principaux protagonistes. Ce mardi, au tribunal correctionnel de Mamoudzou, chacun s’accuse d’avoir profité des véhicules de leur entreprise pour s’enrichir ou faire profiter des proches. Trois autres prévenus étaient dans la combine. « La société a découvert un système bien rodé tout à fait par hasard », rappelle maître Yanis Souhaïli, l’avocat de l’entreprise de location de voitures bien implantée à Mayotte, qui déplore un préjudice de « 227.000 euros ». En effet, à la suite de plusieurs refus d’obtempérer un jour de septembre 2021, l’un des bénéficiaires s’est fait arrêter à Cavani en possession d’une voiture de la société. Problème, il n’avait aucun contrat de location. Les policiers ont donc prévenu l’agence et découvert que tout partait de l’intérieur. Trois jeunes salariés, tous la vingtaine, avaient pour habitude de « sortir » les véhicules du parc par trois procédés. Le premier consiste à établir de faux contrats et s’assurer de recevoir les paiements en espèces. Un autre permettait d’établir des faux contrats avec cette fois les noms de vrais clients. Le dernier, plus risqué, consistait à laisser courir les dates de fin de location. Les véritables clients se retrouvaient alors avec de fortes sommes à débourser, tandis que des conducteurs peu scrupuleux pouvaient en profiter. Bien entendu, en cas d’ennui mécanique ou d’accident, des mécaniciens officieux s’assuraient de réparer les véhicules sans poser de questions.
« Je ne sais pas conduire »
« Gérant du parc illégal », « bras droit », « homme de main », le rôle du quatrième prévenu a été prépondérant. Selon les autres, il faisait venir les clients ou ramenait les voitures louées illégalement. « Ça n’était pas moi. Je ne sais pas conduire », rétorque pourtant celui qui a le casier le plus chargé et effectivement pas de permis de conduire. « Comment vous expliquer que tout le monde vous voyait conduire des voitures avec le logo de la société ? », demande la présidente du tribunal correctionnel, Chantal Combeau. Parmi les employés de la société, deux semblent avoir eu recours au stratagème au minimum une dizaine de fois. Des clients ont même indiqué aux gérants leur avoir remis de l’argent en liquide. « Je n’ai rien à voir avec cette histoire », tente toujours de se défendre l’un deux.
« Il n’y a pas un seul client qui la met en cause », plaide maître Delamour Mada Dali, l’avocat de la troisième employée et unique femme impliquée. La vice-procureure a reconnu que son activité dans le réseau était moindre. Seule certitude cependant, elle a effectivement établi un faux contrat pour son petit copain et aidé à sortir l’une des voitures du parc. « Son petit copain a réglé la location. Et si elle a aidé, c’était sous la contrainte de l’homme de main », défend l’avocat du barreau de Paris. Le Parquet a requis contre elle trois mois de prison avec sursis. Également dans le réseau, mais davantage en tant que bénéficiaire, un policier du nord de Mayotte se retrouve au tribunal pour abus de confiance. Il reconnaît avoir loué deux voitures en espèces sans qu’un contrat n’ait été établi. En outre, il ne rendait pas les véhicules dans les temps impartis. Il reconnaît devant les juges qu’il y voyait « une bonne affaire ».
Le tribunal correctionnel décide finalement d’appliquer la même sanction aux deux employés reconnus coupables d’escroquerie (la circonstance de la bande organisée n’a pas été retenue) et abus de confiance. Ils sont condamnés à un an de prison avec un sursis de six mois. Ils pourront effectuer leurs peines à domicile sous le régime du bracelet électronique. Ils devront en plus verser chacun 3.000 euros d’amende et 30.000 euros à leur ancien employeur, à payer solidairement avec l’homme de main. Ce dernier, qui écope d’une sanction de six mois de prison ferme pour complicité d’escroquerie, versera également solidairement 3.000 euros avec la jeune femme pour un autre véhicule « sorti ». Coupable d’abus de confiance, elle devra s’acquitter aussi d’une amende de 800 euros et hérite d’une peine de trois mois de prison avec sursis.
Le mécanicien et le policier reçoivent deux mois de prison avec sursis, l’un pour complicité d’escroquerie et l’autre pour abus de confiance (+ une amende de 1.300 euros).
Des peines de prison ferme pour des passeurs de kwassas
Le 30 avril et le 1er mai, trois passeurs de kwassas ont été interpellés. Deux d’entre eux étaient récidivistes. Ces derniers ont été condamnés en comparution immédiate à quinze mois de prison ainsi que dix ans d’interdiction du territoire français. Le dernier, a quant à lui, été condamné à six mois de prison et trois ans d’interdiction du territoire. L’ensemble des personnes qui était sur les embarcations, ont fait l’objet d’une prise en charge sanitaire et ont ensuite été placées en centre de rétention administrative. La lourde condamnation a été saluée par Thierry Suquet, le préfet de Mayotte. Il félicite aussi les forces de l’ordre mobilisées « dans la dissuasion des traversées illégales, dans l’identification et l’interception des kwassas ».