Fratricide en 2018 : 2 jours de procès aux Assises pour l’homme accusé d’avoir tué son frère à coups de machette

C’est une affaire qui avait fait du bruit, en 2018. Un matin, un homme s’était présenté devant un policier municipal car il avait tué son frère, atteint de schizophrénie. Un dossier sur fond de troubles psychiatriques, qui interroge une fois de plus la question de la prise en charge des maladies mentales dans le 101ème département.

Il porte une chemise aux bordures bleues nuit, large, informe et froissée. Elle recouvre son imposante carrure qui étouffe un peu ses mots quand il s’adresse aux juges. Le col est défait. Comme s’il tombait du lit. “J’ai entendu, mais j’ai rien compris”, lâche l’accusé de sa voix bourrue, après la lecture par le président de l’ordonnance de renvoi du juge d’instruction. Puis d’ajouter dans un grognement à peine audible : “J’ai pas fait exprès… j’en avais marre… je suis passé à l’acte.” Et pas n’importe quel acte : un fratricide sur fond de troubles psychiatriques, pour lequel s’est ouvert ce mercredi un procès de deux jours devant la cour d’Assises, au tribunal judiciaire de Mamoudzou.

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L’affaire qui amène cet homme d’une quarantaine d’années à la barre n’a rien d’anodin. Les faits remontent au 26 septembre 2018. Il est tôt, ce matin-là, quand un agent de la police municipale découvre sur son palier Monsieur B., une machette à la main, passablement excité. L’homme lui avoue avoir tué son frère. Ensemble, ils se dirigent vers un banga en bord de route, dans la commune de Bandrélé. Et là, gisant ensanglanté sous un drap vert brodé de fil rouge, face contre terre, le corps de la victime s’expose inerte aux yeux de ce premier témoin matinal. La gendarmerie est dépêchée sur place, aux côtés du SMUR, qui ne peut que constater le décès. Cinq plaies au crâne ont ôté toute chance de survie à la victime.

Connus pour leurs troubles mentaux

Placé en garde à vue, Monsieur B. reconnaît les faits et justifie son geste par le comportement violent de son frère, qui “l’insultait, le menaçait, et frappait partout dans le domicile”, explique-t-il alors aux gendarmes. Il faut dire que les deux sont connus dans le coin pour leurs troubles mentaux, des prises en charge psychiatriques et une consommation de chimique. D’après leur entourage, ils “se battent souvent avec les poings ou des couteaux”.

La victime, surtout, enchaîne les phases d’hospitalisation et de rechutes, depuis une première bouffée délirante en 2004, à l’âge de 18 ans. Entre-temps, d’autres expertises font état d’une schizophrénie avec hallucinations auditives, idée délirante de persécution, déséquilibre caractériel et conduites addictives. Sa dernière hospitalisation, en date de septembre 2018 se solde par la fugue de l’intéressé. À l’époque, le témoignage de l’un de ses soignants expliquait ainsi, qu’il “aurait dû bénéficier d’un service de soins pour pathologies psychiatriques chroniques, mais il n’y a pas de structures adaptées ici. Je pensais même que c’était lui qui allait provoquer un drame”.

“Je viens de buter mon petit frère”

Bref, quelques jours après le dernier passage de la victime en service de soins, l’ambiance n’est naturellement pas au beau fixe dans le banga vétuste où la fratrie vit dans des conditions précaires, sans eau ni électricité. La tension monte, jusqu’au geste fatal, à en croire une bande sonore glaçante dont le président fait la lecture à l’audience. “Je viens de buter mon petit-frère, j’appelle depuis hier soir, personne ne réagit”, aurait dit l’accusé au téléphone. Lequel aurait agi en légitime défense, les gendarmes ayant refusé d’après lui de se déplacer, malgré ses appels à l’aide.

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La responsabilité pénale en question

D’après l’expertise psychiatrique, Monsieur B. souffre lui aussi d’un déséquilibre caractériel et psychotique majeur doublé d’une déficience intellectuelle et d’une personnalité borderline. Malgré cette description fournie, et une possible altération de son discernement au moment des faits, l’instruction a conclu qu’il pouvait être tenu responsable de ses actes. “On se rapproche plus ici du cas, par exemple, d’une femme victime de violences conjugales qui finit par passer à l’acte que dans l’irresponsabilité pénale”, acquiesce Maître Gibello-Autran, l’avocate de l’accusé.

Nonobstant, les troubles psychiatriques de deux frères seront bien au cœur de ce procès de deux jours. La première journée ce mercredi était ainsi consacrée à l’audition des experts, dans le but de déterminer dans quel état psychique se trouvaient la victime et l’accusé au moment des faits. Une première analyse laisse penser qu’ils avaient probablement interrompu leurs traitements médicamenteux depuis déjà plusieurs jours…

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