Un jeune homme de 22 ans a été condamné à douze ans de prison pour vols et viol, par la cour d’assises de Mayotte, ce mercredi, à l’issue d’un procès de trois jours. Son complice a écopé de cinq ans de réclusion, dont quatre ans ferme, pour les faits qui se sont déroulés à Miréréni (Tsingoni), trois ans plus tôt.
« Il faut distinguer les deux individus et leurs actions », argue l’avocate de Yasser Ahmed, maître Kassurati Mattoir. Lors du dernier jour du procès d’assises, qui s’est tenu de lundi à mercredi au tribunal judiciaire de Mamoudzou, les plaidoiries de la défense des deux jeunes hommes de 22 et 23 ans se concentrent sur les vols et leurs circonstances. « Il faut prouver la co-action dans le cadre des vols, même si le prévenu a reconnu les faits », martèle l’avocate, qui représente le jeune accusé de deux vols, dans la nuit du 17 novembre 2021 à Miréréni (Tsingoni). Lui et Taoumedine Maoulida, surnommé « Petit-bout », ont d’abord volé un téléphone portable, en fin d’après-midi, à un homme qui jouait au domino devant chez lui.
Un viol « sordide »
Ils se sont rendus ensuite chez un homme et sa femme, habitants du village, en milieu de soirée. Là, tandis que Yasser Ahmed a dérobé des affaires au couple armé d’un couteau de cuisine et menace le père de famille, « Petit-bout » est allé chercher la jeune mère de famille dans la chambre. Il l’a entraîné sous la contrainte d’une machette hors du domicile alors que son complice et le mari demandaient à l’homme d’arrêter. Il l’a trainé sur plusieurs mètres, puis l’a violé ensuite sur un parking non loin du domicile familial. « Il ne faut pas l’ériger en héros », martèle Delphine Mousny, qui représentait le ministère public, en désignant Yasser Ahmed. « Il n’a demandé que deux fois [au violeur] d’arrêter ses agissements avant de rentrer chez lui tranquillement. Ce qui allait se passer était pourtant clair », rappelle la magistrate, qui requiert contre lui cinq ans de prison.
Elle s’inquiète surtout de la personnalité de « Petit-bout », qui se « pense irrésistible aux femmes ». Les expertises évoquent un état limite. « En trois ans de détention provisoire, son rapport aux femmes ne semble pas avoir changé », s’exclame Delphine Mousny, qui requiert quinze ans de réclusion, pour les vols et le viol qu’elle qualifie de « sordide ». « Il a confirmé le viol au juge d’instruction », a fait remarquer maître Ahmed Idriss, pour montrer que son client n’a pas caché son geste. Il évoque une enfance difficile, avec un beau-père violent, un père en prison. Les addictions de l’accusé sont aussi pointées du doigt. Au moment des faits, ce dernier était alcoolisé, sous l’emprise du cannabis et a motivé ses actes par le besoin d’argent, tout comme Yasser Ahmed. « Quand on a envie de s’acheter de l’alcool, on fait comme tout le monde et on se trouve un travail », tacle la substitute du procureur de la République.
Le courage de témoigner
Si la victime du premier vol n’est pas présente et ne s’est pas constitué partie-civile, la jeune femme et son ex-conjoint assistent au dernier jour du procès. Maître Aurore Baudry, qui représente les deux parties-civiles, ne mâche pas ses mots, « ils ont vécu l’horreur, un cauchemar ». Elle récuse l’expertise psychologique de la jeune femme (qui avait 20 ans au moment des faits) qui ne relève pas de stress post-traumatique, alors « qu’elle ne sent plus en sécurité nulle part, même chez ses parents ». Sa plaidoirie n’oublie pas non plus de mentionner les jeunes enfants de la famille, présents au moment d’une partie des faits et dont la petite « hurle dès qu’elle aperçoit un couteau ». Elle souligne le courage de la jeune mère d’avoir témoigné, à quelques pas de son violeur, qui l’a « transformé en autre chose, un objet ». Mais surtout les conséquences sur le couple, qui s’est depuis séparé, notamment du fait que la victime a « peur des hommes ». Ils ne peuvent plus habiter dans leur maison, par peur, mais aussi parce que les gens du village savent ce qu’il s’est passé. « Ils venaient d’acheter un terrain, voulaient construire leur maison. Mais leur vie a été détruite », conclut l’avocate, demandant que la justice reconnaisse leur statut de victime. Avant le verdict, les deux jeunes hommes formulent des excuses, têtes baissées.
Yasser Ahmed a été reconnu coupable des deux vols avec usage d’une arme et écope d’une peine de cinq ans de prison, dont quatre ans fermes avec l’interdiction de détenir une arme avec autorisation. De son côté, « Petit-bout » est reconnu coupable du viol et des vols et est condamné à douze ans de réclusion criminelle, dont six ans de sûreté. À l’annonce de la peine, il tente de demander à la magistrate des précisions, avant d’être recadré. Il a également pour interdiction la plus stricte d’approcher la jeune femme.
Fraîchement arrivée sur l’île, je suis journaliste à Mayotte Hebdo et Flash Infos. Passionnée par les actualités internationales et jeunesses, je suis touche-à-tout. Mon allure lente et maladroite à scooter vous permettra de me repérer aisément.