Au bout d’une soirée alcoolisée, le 5 décembre 2019, un jeune homme de 26 ans a agressé sexuellement une collègue de sa petite amie. Il a été condamné par le tribunal correctionnel de Mamoudzou à cinq ans de prison, ce mardi 28 février.
« La victime a dit aux praticiens du centre hospitalier de Mayotte qu’elle voulait quitter Mayotte le plus vite possible », raconte Bruno Fisselier, le président du tribunal correctionnel, ce mardi matin. Plus de trois ans avant, la jeune femme était sortie avec un couple d’amis, dans la nuit du 4 au 5 décembre 2019, dans une boîte de nuit de Kawéni. Ce soir-là, l’éducatrice spécialisée, arrivée à Mayotte deux mois avant, croise le petit ami d’une collègue. Elle danse avec lui, ils boivent de l’alcool. Selon lui, elle l’embrasse même. Au petit matin, il lui propose de la raccompagner et ils prennent un taxi pour rentrer. Plutôt que d’aller jusqu’au rond-point du Manguier, à Mamoudzou, où elle vit en colocation, il l’emmène chez un ami à lui. Alors qu’elle s’installe sur le lit où elle espère dormir, il lui soulève la robe. « Je lui ai dit d’arrêter, mais il ne voulait pas. Il était très excité », a-t-elle dit au cours de son audition par le juge d’instruction, précisant qu’avec le poids de son agresseur sur elle, elle ne peut s’échapper. « Je l’ai senti faire des va-et-vient, je ne sais pas combien de temps ça a duré, c’était très long. »
Ce n’est qu’au moment où celui-ci fait une pause pour uriner qu’elle se rhabille et tente de fuir. « Il m’a bloqué le passage », se souvient-elle. Elle le menace de le dénoncer de la police, rien n’y fait. Pire, il lui demande de « le laisser finir » et l’attrape par les poignets pour la remettre sur le lit. Il l’agresse une nouvelle fois. Voyant qu’elle reste tétanisée, il finit par la laisser partir. Mais alors qu’elle se dirige vers chez elle, il la suit. « Je me suis dirigé vers le centre commercial Baobab pour demander l’aide d’un vigile. Il s’est dirigé vers [l’agresseur] et celui-ci a simulé un malaise », rappelle-t-elle. Quelques heures après, en voyant son état psychologique et médical, c’est l’hôpital qui a prévenu la police.
Des faits qui auraient pu être qualifiés de viol
Alors que la jeune femme est en métropole, le prévenu, un Comorien âgé de 29 ans aujourd’hui, est le seul à témoigner, ce mardi matin. Celui-ci n’en démord pas, il s’agit d’une relation sexuelle consentie selon lui. « Désolé, elle n’a pas perdu sa langue, elle pouvait dire non », répond-il aux juges, qui lui demandent pourquoi il ne s’est pas arrêté quand elle a essayé de replier ses jambes. « La seule question qui nous occupe, c’est celle du consentement », fait observer Yann Le Bris. Le procureur de la République rappelle que la relation sexuelle était bien « contrainte » et que les faits auraient pu être caractérisés en viol. En effet, la victime a accepté qu’ils soient requalifiés en agression sexuelle, le viol étant jugé par une cour d’assises. Pour le magistrat, plusieurs éléments confirment la version de la victime. « Il y a d’abord la révélation des faits. C’est en allant au centre hospitalier de Mayotte que les faits ont été révélés. Le praticien a vu les pleurs, l’état de sidération et a fait des constatations objectives », énumère-t-il. La jeune femme présente effectivement des hématomes au niveau des cuisses, du bras gauche et du pied gauche au moment de son examen. Les témoignages sont également en sa faveur puisque ses colocataires observent son changement de comportement. « L’une d’elles évoque même un fantôme », souligne le procureur.
A l’opposé, le prévenu a changé plusieurs fois de versions, même le jour de l’audience. Il avait, par exemple, reconnu le viol au cours de sa garde à vue, puis il s’était rétracté. Le président du tribunal évoque des « fluctuations », quand le Parquet parle d’« incohérences ». « L’expertise psychiatrique a été une catastrophe. Il ment et est incapable de se remettre en question », ajoute ce dernier. Son avocate, maître Élodie Gibello-Autran, a bien tenté de défendre son client en rappelant « qu’il a sa grille de lecture à lui. Pour lui, on est à des kilomètres du viol ». Le tribunal a préféré suivre les réquisitions du Parquet. Mohamed Ali a été condamné à cinq ans d’emprisonnement avec mandat de dépôt. Il devra indemniser la victime à hauteur de 10.000 euros. En situation irrégulière à Mayotte, une interdiction de territoire français (ITF) de cinq ans a été prononcée à son encontre et sera appliquée dès la fin de sa peine de prison.
Un convoyeur de fonds condamné pour vol
Un ex-salarié de la Brinks, âgé de 44 ans, a écopé d’une peine de huit mois de prison avec sursis. Son employeur et les banques qu’il réapprovisionnait se sont aperçus qu’il avait volé près de 5.000 euros en décembre 2020. Licencié depuis, il ne s’est pas présenté à la barre du tribunal correctionnel de Mamoudzou, ce mardi. C’est donc le président du tribunal, un représentant de la Brinks et l’avocat de la société, maître Guillaume de Géry, qui ont tenté d’expliquer ce qu’il s‘est passé le 28 décembre 2020, puis le 13 janvier 2021. Car, à chaque fois, c’est le même salarié impliqué. Le premier jour, par exemple, c’est la somme de 5.000 euros qui manquait dans le distributeur de billets, 6.650 euros la deuxième fois. Si le premier vol est facilement avéré, ce n’est pas le cas du deuxième. En effet, l’agent qui a réapprovisionné la machine avant le prévenu a fait « une erreur de tabulation » et a donc mis 70.000 euros en trop dans le gabier. Le prévenu, qui n’a pas fait de tickets d’intervention, n’en a retrouvé que 63.000 environ. Toutefois, il n’y a pas de preuve qu’il s’agit d’un vol perpétré par lui ou son collègue intervenu avant. Les juges se sont alors interrogés sur les procédures de la société qui laisse agir seul ses hommes lors des réapprovisionnements. « Je rappelle que la Brinks n’est pas prévenue dans cette affaire », a plaidé l’avocat. Le tribunal a choisi la relaxe pour le deuxième fait et condamné le convoyeur à une peine de huit mois de prison avec sursis pour le premier. Il devra payer également 11.000 euros à son ex-employeur (5.000 euros pour le préjudice financier, 4.000 euros pour le préjudice moral et 2.000 euros en frais d’avocat).