Le 8 août dernier, le ministre comorien de l’Intérieur avait annulé par arrêté toutes les conventions de jumelage signées entre la municipalité de Mamoudzou et trois villes de la partie indépendante, dont Fomboni, Mutsamudu et Domoni. Saisie pour avis depuis juillet par un activiste de la société civile, la section constitutionnelle de la cour suprême reconnaît à son tour l’inconstitutionnalité de ces accords, décriés dès le départ par le collectif des citoyens de Mayotte, hostile à tout rapprochement avec Moroni.
Après avoir rejeté la requête à cause d’une erreur commise par l’auteur sur le nom de l’institution, la chambre constitutionnelle de la section constitutionnelle et électorale de la cour suprême s’est enfin prononcée sur la légalité des accords de jumelage liant la mairie de Mamoudzou et d’autres villes de l’archipel. La haute cour avait été saisie pour avis par Ahmed-Hachim Said Hassane. Ce membre de la société civile comorienne attendait donc depuis le 25 juillet dernier une réponse sur la constitutionnalité de ces conventions qui avaient suscité la controverse.
Samedi dernier, la section constitutionnelle a ainsi rendu son arrêt, lequel s’aligne sur la même ligne défendue jusqu’ici par l’unanimité des juristes comoriens. La plus haute juridiction des Comores estime de fait que « les accords de jumelage conclus entre la ville de Mutsamudu (Anjouan), le village de Tsidje (Grande Comore) et la commune de Mamoudzou, sur l’île comorienne de Mayotte encore sous administration de l’autorité occupante, ne sont pas conformes à la constitution ».
Un avis qui a été salué par les mouvements de la société civile, notamment le comité Maoré par la voix de son président. « Le comité Maoré accueille cette décision avec beaucoup de fierté pour notre haute juridiction. Le citoyen Said Hachim a fait valoir son droit, celui d’exprimer son amour envers sa nation. Un combat pareil ne reste jamais vain », a réagi Atick Youssouf.
« Les conventions n’étaient qu’un ballon d’essai »
Pour sa part, Ahmed-Hachim Said Hassane, auteur de la requête, parle de satisfaction « relative » puisque la cour suprême n’a pas eu le courage de prendre une décision dès le début, mais a attendu la réaction du gouvernement qui a rejeté les accords avant de se prononcer. Face au tollé, le ministre comorien de l’Interieur, Fakridine Mahamoud, avait annulé le 8 août les conventions pour non-respect normatif et des procédures applicables. « Maintenant, on se demande quelle stratégie le gouvernement va adopter pour mettre en place ces accords étant donné qu’on a compris qu’en fait les conventions n’étaient qu’un ballon d’essai destiné à sonder les politiques et la société civile sur la question », a analysé, Ahmed Hachim qui reste convaincu que sans l’aval du ministère de l’Intérieur, les communes n’auraient jamais ratifié les accords. « Il a préféré les annuler sachant que l’arrêté n’a aucune valeur juridique. ». En tournée dans les autres îles courant juillet, le maire de Mamoudzou, Ambdilwahedou Soumaïla, avait scellé plusieurs accords avec Domoni, Tsidje, Fomboni et Mustamudu. Le but de ces conventions : rapprocher les communes défendaient les signataires.
Capitulation et trahison nationale
Mais très vite, des voix ont commencé à s’élever pour les dénoncer. À Mayotte, des collectifs ont même accusé le premier magistrat de la commune de trahison. À Moroni en revanche, de nombreux juristes et activistes ont mis beaucoup plus en avant l’inconstitutionnalité des jumelages, contraires selon eux à la constitution comorienne qui ne reconnaît qu’une seule Union des Comores, composée de quatre îles, dont Mayotte. Les signer se serait résumé à reconnaitre la francité de l’île aux lagons.
Il faut noter que malgré cet avis de la section constitutionnelle rendu le 1er septembre, de nombreux citoyens n’arrêtent pas de pointer du doigt les gouvernements comoriens pour leur indolence dans la réclamation de Mayotte. Pas plus tard que le mois dernier, le discours prononcé par le président Azali Assoumani à la tribune des Nations Unies avait été perçu comme une « capitulation ». Au lendemain de la ratification des jumelages, le président du parti Ukombozi, Idriss Mohamed, était allé jusqu’à proposer l’enclenchement d’une procédure d’accusation contre le président Azali Assoumani pour trahison nationale.