L’accusé, âgé de 17 ans au moment des faits, n’a pas bénéficié de l’excuse atténuante de minorité. Il repart à Majicavo pour sept ans supplémentaires.
Le verdict est tombé vendredi, après un jour et demi de procès. La cour d’assises des mineurs a condamné à dix ans de prison – et autant d’interdiction de territoire français – l’homme accusé d’avoir éborgné le major de la brigade anti-criminalité (BAC) Philippe Meyer en 2018. À l’annonce de la décision, c’est comme un soupir de soulagement collectif qui a été relâché du côté de la victime et de ses proches. “Je suis soulagé ! Quand je suis venu, je n’attendais rien de ce procès car je pensais qu’il n’allait écoper que de quatre ou cinq ans, étant donné qu’il était mineur. Et il a finalement pris plus que les réquisitions de l’avocat général”, a soufflé Philippe Meyer après une accolade avec ses anciens collègues, venus le soutenir dans cette étape difficile de sa reconstruction.
“Après ça, il n’a plus jamais été le même”
Le policier avait reçu un projectile au visage, lors d’une intervention le 24 mai 2018 à Passamaïnty après des troubles à l’ordre public à la sortie d’un mourengué. Avec plus d’une dizaine de fractures à la mâchoire, au visage, et au plancher orbital de son œil gauche, le major avait finalement perdu l’usage de son œil. Depuis trois ans, la victime enchaîne donc les opérations, au CHM la nuit de l’agression, puis à La Réunion où il avait été évasané, et encore en métropole. Des blessures qui ont eu des séquelles irréversibles tant sur les plans physiques, psychologiques que professionnels ou familiaux. “À l’époque, mon père, il savait faire la part des choses entre son travail et quand il rentrait à la maison. Après ça, il n’a plus jamais été le même”, témoigne son fils, qui s’est constitué partie civile, comme l’un de ses collègues présent la nuit de l’intervention.
“La peine est légitime sans que cela ne répare jamais le préjudice subi par la victime, ni n’atténue le sentiment de colère et d’injustice”, confirme à la sortie de l’audience Maître Le Bonnois, l’avocat du major Philippe Meyer, avec un regard en direction du garçon toujours marqué par cette agression. Plusieurs fois à la barre, l’accusé avait tenté de présenter ses excuses au policier ainsi qu’à son fils. “À la fin, il s’est retourné vers mon père et moi et je bouillonnais, je me suis dit ‘‘comment il ose s’adresser à nous ?’’”, enrage le jeune homme, qui s’est retrouvé seul du jour au lendemain à 17 ans, à Mayotte.
Pas d’excuse de minorité pour l’accusé
Ces mots n’auront donc pas trouvé d’écho salvateur, ni chez les victimes, ni du côté de la cour et des jurés… Accusé de violences volontaires ayant entraîné une infirmité permanente sur personne dépositaire de l’autorité publique, l’homme, qui avait 17 ans au moment des faits, aurait pu bénéficier d’une atténuation de sa peine, à savoir la moitié de celle encourue par un majeur pour des faits similaires (15 ans de réclusion criminelle). Mais la cour d’assises a choisi d’exclure l’excuse atténuante de minorité, et a même alourdi les réquisitions de l’avocat général, qui demandait huit ans de prison ferme. L’accusé, qui a déjà effectué trois ans de détention provisoire, repart donc à Majicavo pour les sept prochaines années. “J’espère qu’il prendra ce temps pour réfléchir à ses actes”, hausse les épaules Philippe Meyer, d’un air un peu contrit. Comme s’il n’osait trop y croire…