Les élèves du lycée Younoussa Bamana ont décidé de rendre un nouvel hommage à leur camarade Momix ce lundi 19 avril. Environ 600 jeunes ont entamé une marche partant de leur établissement scolaire jusqu’au rond-point Zena Mdere. Les lycéens, entendus par le maire de Mamoudzou et leur proviseur, demandent plus de sécurité.
L’émotion ne retombe pas au lycée Younoussa Bamana. L’agression mortelle de Momix, âgé de seulement 17 ans, à Cavani, a été un choc pour tous les élèves. Ses camarades les plus proches ont souhaité lui rendre un nouvel hommage en organisant une marche dans les rues de Mamoudzou. Dès 6h du matin ce lundi, les élèves se sont rassemblés devant l’établissement scolaire. Environ 600 jeunes, selon la police municipale de Mamoudzou, se sont dirigés par la suite vers le rectorat puis la mairie de la commune chef-lieu.
Les lycéens observent alors une minute de silence. Visages fermés, quelques larmes coulent sur les joues de ceux qui connaissaient Momix. Il est plus que jamais présent dans les esprits de ses camarades. « Quand j’ai appris la nouvelle, j’ai beaucoup pleuré, j’étais triste », raconte un ami de la victime. « J’étais tout le temps avec lui, je n’arrive pas à y croire… », marmonne-t-il, visiblement encore sous le choc. Le cortège lit ensuite des versets du Coran en guise d’offrande pour le défunt, puis poursuit son parcours jusqu’au rond-point Zena Mdere.
Le maire de Mamoudzou, Ambdilwahedou Soumaïla se joint à la manifestation et adresse quelques mots. Mais il est rapidement conspué. Les élèves en colère scandent « Maire, démissionnez ». « Je pense que la foule était agacée parce qu’on s’attendait à ce qu’il propose des solutions, mais il n’a fait que répéter ce qu’il avait déjà dit dans les médias », explique Haddad, l’un des organisateurs du mouvement. Mais le premier magistrat n’en démord pas et essaye d’apaiser les tensions. Certains l’écoutent attentivement, alors que d’autres n’en voient pas l’intérêt. L’édile prononce alors une phrase qui ne passe pas inaperçue auprès des jeunes. « Votre sécurité est la responsabilité de la mairie, du Département, de l’État, mais aussi de vos parents ! » La réponse des élèves ne s’est pas faite attendre puisque tous se mettent à le huer en signe de désaccord. La pression monte d’un cran, Ambdilwahedou Soumaïla est chahuté, avant d’être rapidement “exfiltré”.
« Les paroles, on les a trop entendues, on veut des actes »
Le cortège, qui devait se rendre par la suite à la préfecture, est immédiatement redirigé vers le lycée Younoussa Bamana par les forces de l’ordre pour éviter d’éventuels débordements. Fiers d’avoir marqué le coup, les élèves attendent désormais des réponses de la part des autorités. « Les paroles, on les a trop entendues, on veut des actes, on veut se sentir en sécurité quand on va à l’école ou qu’on en sort » indique une jeune manifestante. Depuis vendredi dernier, certains élèves ont décidé de ne plus se rendre en cours tant que le lycée n’aura pas trouvé des mesures plus fermes pour assurer leur sécurité.
Un choix soutenu par certains parents qui ont voulu manifester avec leurs enfants. « Nous sommes fatigués que nos enfants vivent ce genre de violence. Quand on les envoie au lycée, on a peur, on se demande s’ils rentreront sains et saufs », raconte Raïssa, une mère. Cette dernière aimerait voir la police et la gendarmerie devant l’établissement scolaire dès la première heure de cours jusqu’à la dernière. Une hypothèse difficilement plausible, mais Laurent Prevost, le responsa ble du lycée Younoussa Bamana, est ouvert à toute proposition. Il a d’ailleurs reçu un petit groupe d’élèves pour les rassurer. « Le proviseur nous a beaucoup parlé de l’implication du lycée dans ces affaires. Il maintient le fait que les élèves sont en sécurité devant l’établissement, ce qui est relativement vrai », relate Haddad.
Pendant la manifestation, tout le monde a pu ressentir non seulement la douleur des jeunes mais surtout leur colère. À leur jeune âge, beaucoup ne croient plus en l’efficacité des autorités. « Nous sommes satisfaits de l’ampleur que le mouvement a pris, mais pas du résultat. On sera réellement satisfaits quand on n’aura plus la boule au ventre pour aller à l’école, quand on pourra vivre en paix sur cette île », poursuit ce lycéen qui porte la voix de ses camarades. Son autre regret ? Le silence du délégué du gouvernement. « Le préfet n’a pas pris la parole depuis le début de ces événements, on s’est sentis offensés .» Ironie du sort, la manifestation qui s’était déroulée sans accroche a été entachée vers la fin par des individus qui ont essayé de s’introduire dans le lycée Younoussa Bamana en essayant d’enfoncer l’un des portails. Présente, la police a rapidement réagi. Mais la panique a poussé une grande partie des lycéens à quitter les lieux plus tôt que prévu. Comme par réflexe.