Alors que Mamoudzou a connu une nouvelle semaine noire avec deux agressions mortelles à Kawéni et à Cavani, le maire de la ville chef-lieu, Ambdilwahedou Soumaïla, a adressé un courrier au Garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti, ce mardi 1er février, dans lequel il sollicite une demande d’audience dans les plus brefs délais.
En l’espace de quatre jours, Mamoudzou a été le théâtre de deux nouvelles agressions mortelles. L’une à Kawéni le jeudi 27 janvier, l’autre à Cavani le lundi 31 janvier. Si les circonstances sont distinctes selon les premiers éléments de l’enquête, ces affaires tragiques confirment l’enlisement, mainte fois dénoncé par une population désormais apeurée, d’une violence devenue incontrôlable. Face à cette série noire, le maire de la ville chef-lieu Ambdilwahedou Soumaïla a adressé ce mardi 1er février un courrier, que nous nous sommes procuré, au Garde des Sceaux Éric Dupond-Moretti dans lequel il sollicite une audience dans les plus brefs délais. Son but : évoquer « les réponses judiciaires circonstanciées qui permettraient aux Mahorais de ne pas se sentir abandonnés par la République ».
En préambule, l’élu a ainsi rappelé que sa commune « vit une situation qui ne saurait durer sans risquer de dégénérer en guerre civile ». Un climat devenu étouffant malgré la mobilisation sans discontinuer des forces de l’ordre, qui « paient ainsi un lourd tribut pour faire face ». En témoigne l’hospitalisation en seulement une semaine de 15 policiers et gendarmes pour des blessures à l’occasion d’interventions. « Aucune amélioration n’est perceptible, et c’est aussi en cela que cette délinquance est hors norme. » Une délinquance principalement composée d’adolescents et d’enfants prêts à tout pour en découdre. À tel point que, selon le premier magistrat, « 40% des interpellations de l’année 2021 ont été faites sur des mineurs ».
Interpellés puis relâchés
Un point qui n’est pas anodin puisque l’ordonnance de 1945 et l’absence de structure d’accueil en centre éducatif fermé sur le 101ème département ne permettent pas d’apporter – systématiquement – de réponses pénales adaptées. En clair, cela a plutôt tendance à « renforcer le sentiment d’impunité de ces jeunes relâchés quelques heures plus tard ». D’autant plus que les magistrats se déclarent eux-mêmes « impuissants » face aux vagues incessantes de mineurs qui leur sont déférés.
Ce constat, Aldric Jamey, délégué départemental pour Alternative Police, le partage amèrement. « Il faudrait une vraie volonté de l’État ! Il faudrait enfin mettre les moyens humains pour éradiquer le problème de ces bandes qui sévissent un peu partout. » En ce sens, le gardien de la paix réclame, à l’instar de son organisation syndicale, des opérations SLIC – structure légère d’intervention coordonnée – pour faire face aux différentes attaques dans les quartiers délaissés et ainsi faire en sorte d’affirmer la présence policière sur le terrain.
Quoi qu’il en soit, la tension palpable de ce début d’année ne risque pas de s’atténuer avec le temps. Le maire de Mamoudzou a ainsi partagé l’une de ses craintes à court terme au ministre de la Justice. « Si une partie des habitants se terre et ne sort de chez elle que pour aller travailler, une autre s’arme et prépare une riposte. » L’essence même de la loi du Talion qui tente de plus en plus une population à bout de nerf…
Meurtre de Cavani : six individus déférés devant le juge des mineurs
Après le meurtre de Maoulida Boinaidi ce lundi soir dans la rue Selemani à Cavani, l’enquête s’est accélérée au cours de ces dernières 48 heures. Pas moins de sept interpellations ont eu lieu dès le lendemain. Bien connus des services de police, six individus, un majeur et cinq jeunes âgés de 13 à 17 ans, ont été immédiatement placés en garde à vue. Selon nos informations, les interrogatoires menés par la police judiciaire auraient permis d’identifier celui qui aurait porté les coups mortels sur la défunte victime. Ce jeudi 3 février à midi, le groupe a été déféré devant le juge des mineurs pour être entendu individuellement.