Ce lundi 15 novembre, le lycée de Kahani a connu un épisode d’une violence inédite. Dès 6h30, les rixes entre élèves ont commencé, se transformant en véritables émeutes. Peu avant 8h, les forces de l’ordre sont intervenues et près de 80 gendarmes ont été déployés pour sécuriser l’établissement et tenter d’apaiser les tensions.
« Ça a été la pire journée dans l’établissement depuis que j’y travaille”, se désole Jérémie Saiseau, enseignant de Français au lycée polyvalent Gustave Eiffel de Kahani et secrétaire CGT, pour évoquer son premier jour de la semaine. Une fois de plus, l’enceinte a été le théâtre de terribles scènes de violences. Loin du calme nécessaire à l’apprentissage, les cours ont été une nouvelle fois perturbés par des bagarres et des actes de vandalisme à répétition. Des événements qui ont provoqué la fermeture des grilles par le rectorat pour deux jours et une réunion d’urgence du corps enseignant ce mardi 16 novembre. Conséquence : le retour des élèves, en jauge réduite à 50%, n’est prévu que ce jeudi.
Confinement dans les classes
Des mesures drastiques en réponse à ce lundi noir. À peine le soleil s’était levé sur la malavoune que déjà les grenades lacrymogènes claquaient dans la cour du lycée de Kahani. “Les pierres pleuvaient de toute part, les jeunes sortaient des tiges en métal et chumbo de leur sac, c’était le KO total”, affirme le professeur, encore sous le choc. Un sentiment partagé par un collègue de mathématiques et sciences. “Dès lors qu’on entend la sonnerie de confinement, un sentiment de panique envahit les élèves. J’étais en classe avec dix élèves de seconde qui étaient terrifiées et m’ont demandé paniquées de les protéger et de ne pas quitter la classe.”
Un climat de tension insoutenable pour les lycéens, les professeurs, mais aussi les parents d’élèves qui s’inquiètent chaque matin de laisser leurs progénitures prendre le chemin de l’école. “Tout le monde a le droit à l’éducation et à cause d’événements comme ceux-ci, celle de nos enfants est en péril« , s’insurge Rafza Youssouf Ali. La présidente de l’union départementale de la confédération syndicale des familles demande un dialogue entre les différentes institutions de l’île et une table ronde afin de penser ensemble à un avenir meilleur pour les jeunes du 101ème département français.
Des effectifs renforcés
Sur ce véritable champ de bataille, la gendarmerie nationale a déployé ses équipes ainsi qu’un hélicoptère. “Nous avons calmé la situation et sécurisé la zone afin que les élèves enfermés dans les classes depuis le début de matinée puissent regagner les bus et leurs domiciles à midi”, témoigne un officier de gendarmerie, sur le terrain au moment des faits. Des forces de l’ordre présentes quotidiennement devant l’enceinte de l’établissement comme le rappelle le recteur, Gilles Halbout. “Notre objectif à présent est de renforcer les équipes mobiles de sécurité, mais aussi le nombre de personnels scolaires, comme les assistants d’éducation et les assistants de conseiller principal d’éducation.”
Malgré ces renforts, le responsable de l’académie privilégie avant tout un travail de fond avec les élèves dans le but d’éviter que les querelles extrascolaires ne se cristallisent au sein du lycée. “Lorsque les jeunes reprendront les cours jeudi, des professeurs et des professionnels habilités réaliseront un travail avec eux. Ainsi, ceux qui ont été choqués auront un espace de discussion et ces temps d’échanges permettront de rappeler les règles du vivre ensemble et les valeurs de la République.” En effet, la seule multiplication des forces de sécurité ne permet plus d’enrayer la violence à Mayotte. À ce stade, une véritable mobilisation des associations de parents d’élèves et de quartiers semble pouvoir inverser la tendance et aider à déconstruire ce modèle de réponse à toutes les situations par la violence… Qui n’est, on le sait, jamais la solution.