Assises de la sécurité et de la citoyenneté à Mayotte : dernière étape avant l’envoi au premier ministre

Ce mercredi 28 avril, le comité de pilotage des Assises de la sécurité et de la citoyenneté s’est réuni à l’hôtel de ville de Mamoudzou pour valider le plan partenarial d’actions. L’occasion de peaufiner une dernière fois les 67 propositions recensées, avant d’envoyer le document au premier ministre. Si tous les acteurs veulent parler d’une seule et même voix, la décision finale revient au plus haut sommet de l’État.

« C’est l’ultime réunion de validation », annonce d’emblée le maire de Mamoudzou, Ambdilwahedou Soumaïla, co-président du comité de pilotage des Assises de la sécurité et de la citoyenneté, réuni ce mercredi 28 avril 2021. Une manière d’apercevoir le bout du tunnel après le lancement de la démarche commune en novembre dernier, dans le but de « prévenir et sécuriser notre territoire ».

À ses côtés, la directrice de cabinet du préfet de Mayotte, Laurence Carval, évoque un « plan qui fait un consensus entre les différents participants ». Avant de prévenir les acteurs concernés. « Les mesures régaliennes sont souhaitables, mais je ne peux m’engager à leur mise en place. » En d’autres termes, la décision finale ne revient pas uniquement à la préfecture du 101ème département. « Votre appui pourra tout de même débloquer beaucoup de choses dans les administrations centrales », renchérit Mohamed Sidi, 6ème vice-président au conseil départemental. « Nous ne pouvons plus attendre que des jeunes s’entretuent pour avoir des réactions de la part de l’État. Les institutions doivent parler d’une seule et même voix ! »

Fini le temps de l’attentisme, place à celui de l’action. Comprendre : partir des réalités du terrain et être force de propositions, pour inciter le gouvernement à prendre des mesures drastiques. « L’urgence est maintenant », insiste Mohamed Moindjié, en tant que représentant de l’association des maires. Pour apporter des solutions rapides et pérennes, le comité de pilotage se base sur le recensement de 67 propositions et de 11 thématiques, déjà présentées le 15 décembre. L’idée de la rencontre du jour : débattre une dernière fois sur le plan partenarial dans le but que le dossier soit carré pour le remettre en mains propres au premier ministre.

 

Une évolution législative et une responsabilité des collectivités

 

Pêle-mêle. Le premier volet réunit des demandes au sujet des forces de l’ordre (prise en compte de la population réelle, pacte de sécurité), de l’administration judiciaire (cour d’appel, cité judiciaire, délinquance juvénile, TIG) ou encore de l’immigration (mineurs non accompagnés, interventions en mer), qui concernent directement les compétences de l’État. Un premier volet qui pourrait avoir peut-être comme conséquence « une évolution législative », selon Philippe Prudhomme, associé de la société Territoires Citoyens Conseils, en charge de la rédaction du document. Et qui rejoigne le projet de loi « Mayotte », annoncé par Sébastien Lecornu, le ministre des Outre-mer, à l’occasion des dix ans de la départementalisation. Suivi dans le même temps par l’envoi de deux missions sénatoriale et interministérielle à ce sujet.

Le deuxième volet concerne un plan d’actions dans lequel « les collectivités s’engagent à prendre leur responsabilité », rappelle-t-il. À l’instar de l’activation des CLSPD (conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance), que la ville chef-lieu a remis au goût du jour il y a de cela deux semaines, le développement de la médiation citoyenne (citoyens vigilants, comité des sages), l’éducation, l’insertion sociale, la parentalité, la culture et la religion (rôle des cadis, école coranique), la lutte contre la pauvreté et l’exclusion ou encore la politique d’aménagement de la ville (vidéoprotection, éclairage public).

 

Des actions mises en place, d’autres à revoir

 

Place ensuite aux réactions de l’assemblée. Avec en premier lieu, le député LR Mansour Kamardine qui débute sur une pointe d’humeur pour démontrer l’absence de stratégie de la part des gouvernements successifs au cours des dernières décennies : « Nous avons épuisé plus de 30 préfets. » Avant de souligner que « la délinquance à Paris n’est pas la même que celle à Mamoudzou ». Aussi plaide-t-il pour un renforcement des liens entre « les polices nationale et municipale pour apporter des résultats concrets ». Un souhait également valable « dans les zones gendarmerie ». En réponse à ces propos, le commissaire de police, Sébastien Halm, apporte quelques observations, notamment sur le fait que plusieurs actions sont déjà en ordre de marche, comme l’augmentation des effectifs au sein de la compagnie d’intervention ou l’accueil de 3.000 mineurs dans les centres de Kawéni et de Doujani pendant les vacances scolaires, qui « porte ses fruits ».

De son côté, le directeur de la chambre de commerce et d’industrie, Zoubair Alonzo, propose de mettre l’accent sur la coopération régionale à destination des jeunes sortis du système scolaire « pour les accompagner dans leur intégration ». Tandis qu’Ali Nizary, le président de l’union départementale des affaires familiales, s’attaque à la polémique des enfants placés et demande une révision du dispositif, mais aussi aux politiques publiques à l’égard de la prévention spécialisée. « Deux millions d’euros sont attribués à des structures auxquelles on ne demande pas de compte. » En ligne de mire : le Département. « Nous devons avoir une discussion franche avec les associations bénéficiaires », admet Mohamed Sidi. Qui tente de la jouer collectif. « Nous devons travailler en synergie et optimiser les moyens pour l’attribution des fonds européens. »

 

Attention à l’amnésie

 

En guise de conclusion, Ambdilwahedou Soumaïla prévient les acteurs présents : « Au-delà du nombre d’actions et de dispositifs déployés, à la fin, seule l’efficacité comptera », martèle-t-il. En ce sens, le comité de pilotage décide de se revoir le mardi 26 octobre prochain dans le but de dresser « un suivi et une évaluation pour veiller à nos engagements ». Alors au boulot, pour ne pas décevoir une fois de plus les habitants de l’île aux parfums ! Dernière mise en garde, signée l’écrivain Issihaka Abdillah : « À la fin de ces travaux, [en général], on est tous frappés d’amnésie et on recommence l’année suivante. » Du vrai Sisyphe !

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