Deux porte-paroles de syndicats policiers regrettent le manque de concertation dans les derniers préparatifs de « Mayotte place nette », le nouveau nom donné à l’opération Wuambushu 2, et assurent ne pas avoir été associés. Onze semaines durant, « les policiers vont être mis à rude épreuve », estime Blandine Rostang, de l’Unsa Police Mayotte. Retrouvez cet article et l’ensemble du dossier sur la nouvelle opération dans le Mayotte Hebdo numéro 1085 : « Wuambushu : place (nette) au volume 2 ».
L’information n’a cette fois pas fuité. « Mayotte place nette », l’opération lancée mardi 16 avril aux alentours de 7h, a été présentée aux policiers en même temps qu’aux citoyens lambda : au cours d’une conférence de presse, donnée le jour même, par la ministre déléguée chargée des outre-mer, Marie Guévenoux. « Je comprends que le risque de fuite était important, des restrictions ont été imposées », suppute Affouwade Kolo, secrétaire départemental du syndicat Alliance Police Nationale. Ce qui dérange davantage le représentant syndical, c’est que les préparatifs du deuxième volet de Wuambushu à Mayotte ont, eux aussi, été réalisés dans le secret. « On n’a pas été invité », déplore le syndicaliste.
Même son de cloche du côté de l’Unsa Police Mayotte. « Les syndicats n’ont pas vraiment été associés à Wuambushu 2. On le regrette, on suit et on continuera à représenter », constate avec amertume Blandine Rostang, déléguée départementale adjointe du syndicat. Les policiers vont pourtant être « mis à rude épreuve » durant les onze semaines d’opération – le calendrier communiqué par Marie Guévenoux – avec entre autres l’impossibilité de poser des congés et un taux de présence obligatoire de 80% sur l’ensemble du personnel, rapporte la syndicaliste.
« Les collègues se sont parfois retrouvés en danger »
S’ils ne bénéficiaient pas de renforts pendant ce laps de temps, les fonctionnaires devraient composer avec une nouvelle force intermédiaire de cinquante policiers spécialistes de la lutte contre les violences urbaines, accompagnés d’unités canines. Sur le papier, ces fonctionnaires de police complètent ceux de la Brigade anticriminalité (Bac) et de l’antenne du Raid. Les syndicats, particulièrement Alliance Police Nationale, réclamaient cependant le déploiement et l’intervention de la CRS 8, une unité d’élite déjà envoyée à Mayotte lors de la première opération Wuambushu.
Un temps d’adaptation sera, dans tous les cas, nécessaire aux policiers fraîchement débarqués. « On a vu sur Wuambushu 1 que les renforts de métropole ne connaissaient ni la topographie ni les spécificités. Les collègues se sont parfois retrouvés en danger », souligne Blandine Rostang de l’Unsa Police Mayotte. Cette dernière pense qu’un « mixage avec d’autres collègues déjà affectés sur place » permettraient d’éviter ces situations.
Des résultats judiciaires attendus
Concernant le travail d’enquête et les poursuites judiciaires des personnes interpellées ou faisant l’objet de mesures administratives, les syndicats policiers espèrent que l’histoire ne se répètera pas. « Il faut qu’il y ait une bonne anticipation dans les affaires étrangères avec les autorités comoriennes, ça avait été un bon frein pour nous pendant Wuambushu », se remémore la représentante de l’Unsa. « On espère aussi qu’il y aura une meilleure coordination avec la justice, notamment au niveau des arrêtés de décasages. Qu’ils ne soient pas systématiquement cassés par le tribunal administratif. »
Quant aux objectifs chiffrés de Marie Guévenoux, particulièrement celui de l’interpellation de 60 « chefs de bande » en onze semaines, le syndicat policier Alliance estime déjà que les ressources vont manquer à l’appel. « On parle en réalité de tout ce qui nuit sur la voie publique », rappelle Affouwade Kolo. « Mais il y aussi plein de petits soldats qui font le travail pour les autres, c’est comme le trafic de stupéfiants. » Un roulement sans fin.