Un fonctionnaire de police du commissariat de Mamoudzou a utilisé son arme à feu lors d’une intervention devant le lycée Younoussa-Bamana, le 8 février. Alors que celui-ci a déclaré qu’il avait simplement tiré en l’air pour disperser les jeunes qui s’affrontaient, il s’avère que le membre de la brigade anticriminalité (Bac) a pointé l’arme droit devant lui. La balle a fini dans le mur du lycée, alors que les élèves sortaient de l’établissement à ce moment-là. Une enquête est en cours, confirme le Parquet.
Des affrontements violents ont eu lieu à l’approche des vacances scolaires devant le lycée Younoussa-Bamana, à Mamoudzou. Le mercredi 8 février, un élève a été blessé à la tête avec une arme blanche, avant de réussir à se mettre à l’abri dans l’établissement. A midi, heure de sortie des classes ce jour-là, la peur n’était pas retombée et une nouvelle rixe a eu lieu. La police est intervenue pour disperser les deux groupes qui s’affrontaient. Toutefois, des images de la vidéosurveillance que nous avons pu visionner montrent qu’un des policiers a surgi et tiré en direction d’un groupe de jeunes qui s’enfuyait. La balle a ricoché sur le mur, à quelques centimètres de l’un de ses derniers. Une trace est toujours visible sur le mur de l’établissement. Du côté de la direction territoriale de la police nationale, il n’y a pas de commentaires. « Les faits ont été soumis au parquet en temps réel. Il est seul juge de l’opportunité des poursuites », a simplement répondu le commissaire Laurent Simonin. Le Parquet justement a confirmé qu’une enquête est en cours.
Le doute était institué sur la trajectoire du tir qui serait davantage tourné vers le ciel (c’est tout du moins la version du policier). Pourtant, au vu des images, « il n’y aucune légitime défense ni pour lui ni pour autrui. Il n’y a pas de simultanéité entre le lancement de la pierre et son tir, aucune proportionnalité. Et de plus, il est interdit de faire usage de son arme à feu sur la voie publique en tirant l’air », nous explique un policier. Le fonctionnaire concerné pourrait être poursuivi pour violences volontaires avec arme par personne dépositaire de l’autorité publique. S’il a maintenu sa version d’un tir en l’air dans son rapport et au cours de son audition, il pourrait aussi être poursuivi pour faux en écriture et parjure.
[Vidéo]. Un #policier de #Mamoudzou a fait usage de son #arme en pleine sortie des #classes. #Mayotte pic.twitter.com/YqAfbHONzN
— Mayotte Hebdo (@MayotteHebdo) March 31, 2023
Ce n’est pas la première fois que ce policier mahorais, par ailleurs chef d’équipe aujourd’hui, se retrouve au cœur d’une enquête. Le 13 juillet 2022, il faisait partie de l’équipe de la brigade anticriminalité qui a organisé le guet-apens ayant conduit à la mort de l’homme soupçonné de plusieurs viols à Bonovo, un quartier de M’tsapéré. La voiture dans lequel était le suspect de 37 ans avait été bloquée sur la route qui descend au rond-point de Tsararano. Les membres de la Bac, cagoulés, avaient alors encerclé la voiture et leur chef (muté à La Réunion depuis) avait tiré à plusieurs reprises sur l’homme recherché, provoquant sa mort comme l’autopsie l’a confirmée.
Les circonstances de l’intervention, ainsi que sa préparation les heures précédentes, font l’objet d’une enquête de la gendarmerie depuis. L’usage de l’arme à feu par le policier (par ailleurs neveu d’un député local), le guet-apens organisé sur la voie publique en plein après-midi et l’interpellation la veille de celui qui a servi d’informateur (il aurait été détenu illégalement au poste) ont été faits hors cadre de la procédure, selon nos informations. En outre, lors de l’assaut, le 13 juillet, un journaliste de Mayotte la 1ère aurait été également présent dans un deuxième véhicule de la Bac qui suivait la voiture du suspect. Lui, comme les membres de la Bac travaillant ce jour-là, ont été placés en garde à vue et entendus par les gendarmes, il y a quelques mois.
L’enquête confiée à un juge d’instruction du tribunal judicaire de Mamoudzou est toujours en cours.
Un « baqueux » transféré pour un vol de noix de coco
A la Bac, il n’y a pas que cette histoire de tir qui fait des vagues. Il y a deux semaines, un vendeur de noix de coco a été interpellé et emmené au commissariat de Mamoudzou. Voulant récupérer sa marchandise à la sortie, il s’est aperçu que l’un des policiers l’avait déjà revendue à sa place. Le fonctionnaire a alors été retiré des effectifs de la Bac et placé au sein des équipes de police secours. Une amende de cent euros lui aurait été aussi infligée.