Semaine de l’environnement : « À Mayotte, 86% de l’électricité provient de l’énergie thermique »

La dernière journée de conférence de la semaine de l’environnement s’est tenue ce jeudi, dans les locaux de la communauté d’agglomération Dembéni Mamoudzou (Cadema), à Mamoudzou. Pour clôturer ce cycle, différents intervenants sont venus parler de la transition énergétique.

La transition énergétique était au cœur de cette dernière journée de conférences de la semaine de l’environnement. À cette occasion, Karim Halimo, directeur de l’agence Albioma Mayotte, a présenté les différents chantiers sur lesquels travaille son entreprise. Implantée sur l’île depuis 2007, Albioma est également installée dans l’Hexagone, au Canada, au Brésil, dans les Caraïbes et en Turquie. Elle produit, dans l’ensemble de ces secteurs, de l’énergie renouvelable en exploitant la biomasse, l’énergie solaire et la géothermie.

À Mayotte, elle exploite un parc photovoltaïque d’une capacité de quinze mégawatts, avec des installations sur le marché de Mamoudzou ou encore au lycée de Pamandzi. Une activité qui a pour but de transformer le mix énergétique de l’île, qui s’appuie majoritairement sur les énergies fossiles. « À Mayotte, 86% de l’électricité provient de l’énergie thermique, 13% du photovoltaïque et 1% du biogaz », détaille Karim Halimo. Pour optimiser l’électricité produite par les centrales photovoltaïques, Albioma a mis au point des batteries de stockage. Cela permet d’utiliser cette énergie intermittente, car dépendante de la météo, lorsqu’on en a le plus besoin dans le réseau.

La société est également en train de travailler sur un projet centré sur la géothermie. En forant jusqu’à 1.700 mètres de profondeur, cela permet d’accéder à du fluide très chaud, jusqu’à 150 degrés. Cette chaleur fait ensuite fonctionner la centrale géothermique en surface, qui produit de l’électricité. Albioma a pour charge d’identifier et d’étudier le potentiel géothermique à Mayotte. Et deux zones en Petite-Terre ont été désignées comme très favorables par l’entreprise. « C’est une énergie utilisable indéfiniment et décarbonée », insiste Karim Halimo.

Enfin, l’entreprise devrait aussi mettre en service une centrale biomasse d’ici 2028 à Longoni, dans la commune de Koungou. Grâce à la chaleur créée par la combustion de déchets verts, ces centrales permettent de produire de l’électricité à partir d’une ressource sans intermittence.

EDM présente le projet Maesha

Électricité de Mayotte (EDM), était également présente, à travers la personne de Ben Wafique Omar, en charge du projet Maesha à EDM. Ce projet européen part du constat que les îles sont encore très dépendantes de l’importation d’énergies fossiles. Le projet Maesha, déployé à Mayotte, a pour but d’intégrer les énergies renouvelables dans le mix énergétique de ces territoires et d’améliorer la flexibilité du réseau électrique. « Pour décarboner notre système énergétique, il faut qu’il soit plus flexible. Cela passe par des batteries de stockage pour les énergies intermittentes dont on ne peut pas prévoir la production », explique Ben Wafique Omar.

Dans le cadre de ce projet, EDM a, entre autres, amélioré ses prévisions de consommation d’électricité de la part de la population, désormais journalières contre mensuelles avant. Elle va aussi mettre en place des bornes électriques pour les véhicules. Par exemple, elle vise aussi à ce que certains consommateurs soient effacés du réseau. Pour les industriels, en produisant eux-mêmes leur énergie, et pour les particuliers, en autorisant EDM à prendre le contrôle de la consommation de leurs appareils énergivores.

Le bambou, un isolant en expérimentation à Mayotte

L’après-midi, Arnaud Lezer représentait l’association BAM – Bambou Mayotte, dont il est co-trésorier, afin de décrire les avantages du matériau bambou. « On peut tout utiliser dans le bambou, rien ne se perd », souligne-t-il. Il a également la vertu de produire 30% d’oxygène en plus que les arbres. Les entretenir pour s’en servir ensuite dans la construction est donc un moyen de lutter contre le dérèglement climatique.

Point de vue solidité, cette matière est plus résistante que l’acier et isole de la chaleur. Il s’avère ainsi être une solution pour réduire la consommation d’énergie importante de la climatisation. L’association préconise d’utiliser le bambou déjà présent, qui pose parfois des problèmes en poussant de façon anarchique, n’étant plus entretenu. Elle prend soin aussi de ne pas le traiter avec des produits chimiques. « Nous, on le plonge quatre à six semaines dans l’eau de mer », précise Arnaud Lezer.

L’association s’essaye à différents chantiers, afin de déterminer à quels besoins pourrait répondre le bambou, dont l’utilisation est encore en expérimentation sur l’île. En effet, cette plante peut être utilisée dans sa forme originelle ou en fibre, et peut être associée à une variété de matériaux. BAM – Bambou Mayotte participe ainsi actuellement à la construction du lycée Tani Malandi, à Chirongui.

La brique de terre compressée se développe

La dernière intervention était celle de l’association Art.Terre Mayotte, qui a pour objectif de promouvoir la fabrication et l’utilisation de la brique de terre compressée (BTC), issue du savoir-faire traditionnel mahorais. Cette brique fabriquée à partir de terre de remblais isole de la chaleur et permet, comme le bambou, de réduire la consommation d’énergie d’un bâtiment. « La filière est désormais en route, avec des équipements modernisés. Ce n’est plus manuel comme avant. Cela permet de produire plus car les commandes sont plus importantes », constate Melvyn Gorra, coordinateur de l’association.

Il y a actuellement huit producteurs en coopérative qui fabriquent ce matériel. L’association projette qu’entre 600.000 et 1,2 million de briques seront prochainement produites par an.

Art.Terre travaille sur le projet Logement innovant Mayotte (Lima), qui consiste à formuler un guide pour accompagner les constructeurs du début à la fin dans le processus d’utiliser la BTC. L’association travaille aussi sur le projet Atelier mahorais des terres à construire (Amateco), qui consiste en la construction d’une infrastructure à M’tsapéré, Mamoudzou, dédié à la BTC. « On pourra y trouver un centre de coworking industriel où il sera possible de fabriquer de la BTC », projette Melvyn Gorra.

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