Des pneus transformés en fauteuils aux machines à laver remises sur pied, le pôle environnement de la Régie territoriale de Tsingoni, à Combani, lutte contre les déchets en les revalorisant.
« C’est joli ! Mais c’est lourd ça, non ? », demande, amusée, Amninata Djae, une employée de la brigade verte, l’un des trois services du pôle environnement de la Régie territoriale de Tsingoni (RTT). Rien d’étonnant, « ça », c’est une table basse réalisée à partir d’un pneu de bus : un prototype artisanal d’une petite vingtaine de kilos. Dans ce nouveau local basé à Combani depuis 2023, au quartier Décasé, quelques piles de pneus de toutes tailles meublent le sol de la cour extérieure et attendent de connaître leur nouvelle forme. Ils ont été en grande partie sortis d’une rivière lors d’une maraude de ramassage et de sensibilisation que réalise la brigade verte auprès des habitants des villages de Miréréni, Mroalé, Combani et de Tsingoni. C’est le déchet sauvage qu’elle rencontre le plus sur le terrain – avec les déchets ménagers – et qu’elle amène ensuite au chargé de mission artisanat, Antoine-Speyer Mouhoutard Houmadi, recruté en septembre.
De ce mois-ci à ce mercredi 27 mars, c’est environ une trentaine de nouveaux pneus qui sont arrivés dans la cour. Sur la même période, une quinzaine a été revalorisée : en table basse, mais aussi en objets de décoration (un tableau) et en fauteuils. « C’était un challenge pour moi », admet ce jeune homme, formé aux métiers manuels, en métallurgie et soudure, mais pas spécifiquement au travail de la gomme.
À la façon indonésienne, comme il l’a appris en faisant ses recherches, il vient insérer une lame de cutter dans une planche en bois, où un clou est également enfoncé pour découper de façon égale le flan d’un pneu. Si le démarrage est compliqué, une fois la lame rentrée dans la matière, il suffit de poursuivre la découpe jusqu’à temps d’obtenir des lanières… Qui serviront pour le dossier d’un fauteuil, ou la création d’un tableau qu’il a déjà confectionné, représentant une tête de cheval. Elles peuvent aussi servir à compléter les dossiers et assises des fauteuils composés d’environ cinq pneus de voiture chacun. « Mais elles pourraient aussi servir d’antidérapants », propose cet employé, qui utilise un couteau ou une lame de cutter pour les pneus de voiture, aussi récupérés au sein de garages, mais une meuleuse pour ceux de bus, constitués aussi de ferraille et issus de compagnies de transport.
Du mobilier pour les quartiers
« Là, on est complet en pneus de bus mais ce qui nous intéresserait c’est des pneus de mobylettes car c’est plus facile à manipuler », lance celui qui décrit-là sa « façon à [lui] de contribuer au recyclage » et aimerait désormais se lancer dans la fabrication de statues. Pour compléter les objets, « on ramène aussi tout ce qui est métal, bois, tôle », ajoute Hugo Canet, le chargé de mission de la brigade.
Le mobilier urbain ainsi créé pourra être, à terme, vendu dans la boutique du local où sont également vendus les appareils électroménagers et machines à laver réparés au même endroit. Mais il sera dans un premier temps installé dans les quartiers où les habitants sont sensibilisés par la brigade verte. De quoi attiser la curiosité et « donner aux gens l’envie de faire », livre le chargé d’artisanat qui a déjà initié une quinzaine de jeunes à la revalorisation de pneus, « pour en retrouver moins dehors », glisse-t-il. Le restant non utilisé part ensuite en direction du centre d’enfouissement de Dzoumogné.
Douze salariés en insertion
Dans son atelier de réparation, autre service du pôle environnement de la Régie territoriale de Tsingoni (RTT), Soifaoui Saïd Soilihi encadre 12 salariés en insertion pour réparer des équipements électroménagers. Des machines à laver majoritairement, ramassées par Maore Territoire ou bien amenées par des habitants. Ce qui est réparé et pas récupéré par les habitants part dans la petite boutique de l’association. Deux d’entre elles servent en revanche à une laverie sociale, les habitants peuvent les utiliser pour réaliser une lessive à 2 euros. Le même système est disponible chez un des référents de quartier sur lesquels s’appuie l’association. L’argent collecté lui sert à payer le loyer et l’électricité.
C’est aussi une façon de compléter leur action de suivi des lavandières et des produits utilisés. Hugo Canet, chargé de mission de la brigade verte informe : « On a remarqué une diminution de presque 80 % d’utilisation de produits toxiques là où on fait les relevés », dans les rivières. Comme celle qui traverse le quartier de Mogoni, à Combani.