À Mayotte, un projet inédit d’études des coraux

Dans le monde de la plongée, le nom de Gaby Barathieu est déjà bien connu depuis plusieurs années. Aujourd’hui, le photographe sous-marin, à travers son association scientifique Deep Blue Exploration, lance un projet inédit visant à étudier les coraux de Mayotte et leur capacité à trouver refuge à des profondeurs encore très méconnues.

Le projet a vu le jour à 120 mètres de profondeur, là où seuls quelques plongeurs parviennent à descendre. Parmi eux, Gaby Barathieu s’est installé à Mayotte il y a cinq ans. Il n’en est jamais reparti. Depuis, il arpente la zone crépusculaire dite mésophotique, où la lumière du soleil peine à percer l’eau et où l’être humain ne peut demeurer que quelques dizaines de minutes. Dès lors, près de trois heures de décompression sont nécessaires, rendant l’exercice particulièrement délicat.

Au gré de ses explorations, Gaby Barathieu découvre une vie sous-marine très largement méconnue, tant les recherches sont rares à cette profondeur. Alors, en 2017, le photographe sous-marin, nommé le meilleur de cette année-là, crée Deep Blue Exploration, une association à visée scientifique, qui œuvre pour la découverte et l’étude des peuplements coralliens à différentes profondeurs. Avec son appareil, il immortalise des espèces que jamais personne avant lui n’avait observées à travers les eaux du globe.

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Quatre ans plus tard, soit il y a quelques semaines, Deep Blue Exploration dévoile un projet d’ampleur intitulé CORCOMA pour parfaire la connaissance des récifs mahorais et surtout, leur évolution au fil du temps, jusqu’à 120 mètres de profondeur. “La plupart des données scientifiques concernent des zones situées jusqu’à 30 mètres sous la surface de l’eau”, commente Gaby Barathieu. “Au-delà, il faut des moyens techniques très importants…”

Ainsi, l’équipe de dix personnes, composée de plongeurs et de scientifiques, sera chargée d’installer différentes stations de recherche, dont la première sera située dans la passe en S, naturellement. Là, seront mesurés tous les facteurs qui agissent sur la vie des coraux : température de l’eau, salinité, réaction des animaux au stress, génétique… Tout en modélisant en 3D la surface et le volume des récifs tous les six mois. “Il s’agit dans un premier temps de dresser un état des lieux, ce qui n’a jamais été fait, pour ensuite suivre les coraux à long terme.

Ces coraux, Gaby les connaît déjà partiellement, pour les avoir observés et photographiés régulièrement depuis cinq ans. “À Mayotte, il y a des endroits dévastés, notamment au bord des villes, mais d’autres zones débordent encore de vie !” Mais un jour, alors qu’il plonge à 80 mètres de profondeur dans un secteur qui lui est déjà familier, il découvre un récent phénomène de blanchissement des coraux. “J’étais très étonné : la première cause du blanchiment, c’est le réchauffement des eaux. On l’observe généralement en surface, car il y a peu de variations de température en profondeur”, développe le plongeur aguerri.

Dans ces mêmes profondeurs, les connaissances scientifiques manquent encore. Alors, le projet CORCOMA revêt un second objectif : “voir si les espèces récifales peuvent descendre plus bas pour s’installer dans d’autres zones refuges en cas de pollution ou de réchauffement des eaux.” En d’autres termes, étudier comment et dans quelle mesure la biodiversité corallienne est capable de s’adapter face à un environnement soumis à de nombreux risques et parfois même, menacé de disparition. “Encore une fois, comme peu de plongeurs descendent à 120 mètres, c’est un phénomène qu’on connaît très mal aujourd’hui.

Le projet, soutenu par l’office français de la biodiversité et la Deal, pourra également compter sur l’appui d’Héloïse Rouzé et Michel Pichon, deux des biologistes ayant participé au projet Under the Pole qui, en 2019, a permis d’identifier l’espèce de corail la plus profonde jamais observée, à 172 mètres, en Polynésie française. Une découverte inédite, puisque jusqu’alors, la communauté scientifique estimait ce type de corail ne se développait qu’entre 30 et 40 mètres, venant soutenir l’hypothèse d’une zone refuge pour les coraux de surface, et un espoir supplémentaire de les préserver.

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