Mercredi, les communautés de communes du Sud et de Petite-Terre, le Département, la préfecture et les associations Oulanga Na Nyamba et les Naturalistes ont signé un pacte de sauvegarde des tortues, qui engage six axes prioritaires pour l’année 2021. Renforcement des effectifs et moyens matériels sont au cœur de ce partenariat qui doit permettre de lutter efficacement contre le braconnage.
Bien connue pour être un vivier de pontes de tortues marines, Mayotte subit avec effarement le braconnage de ces espèces. Quelques semaines après avoir dévoilé sur la plage de Grand Moya en Petite-Terre leur nouveau plan d’actions pour lutter efficacement contre ce fléau, les parties prenantes viennent de signer ce mercredi 16 décembre le fameux pacte de sauvegarde. « En un mois, j’ai déjà l’impression que nous avons un peu fait bouger les lignes », se félicite Jean-François Colombet, le préfet, au moment de parapher cet engagement avec les communautés de communes du Sud et de Petite-Terre, le Département, Oulanga Na Nyamba et les Naturalistes.
Un engagement évalué à 2.5 millions d’euros, dont la moitié à la charge de l’État, qui doit permettre d’afficher des résultats concrets. Comment ? En poursuivant un certain nombre d’objectifs durant l’année 2021. En premier lieu, il apparaît primordial de mieux connaître les raisons qui poussent à la consommation. D’où le financement d’une étude sur ces pratiques socio-culturelles réalisée par l’institut de recherche pour le développement de Nouvelle-Calédonie. Mais aussi d’accroître les recensements de braconnage et de les remonter systématiquement au réseau d’échouage mahorais de mammifères marins et de tortues marines (REMMAT).
Pour cela, les associations vont toutes les deux recevoir un chèque de 30.000 euros et bénéficier de 5 parcours emploi compétences et de 12 services civiques, formés par l’office français de la biodiversité. « Il ne s’agit pas d’installer des brigades qui vont verbaliser et se substituer aux polices environnementales déjà existantes », rassure le délégué du gouvernement. L’idée est d’intensifier les rondes la nuit sur les plages les plus exposées. « Les experts nous disent que la présence humaine dissuade les actes de braconnage. » Le tout sous la coupe de deux employés Fonjep (fonds jeunesses et éducation populaire), qui auront la lourde tâche d’assurer l’organisation des patrouilles. D’ailleurs, ces dernières seront mixtes dans le but de créer une synergie entre les différents partenaires.
La PAF au secours des tortues
Pour animer ce groupe de coordination opérationnelle, ce pacte prévoit l’arrivée au mois de mars prochain d’un nouvel élément à la direction de l’environnement, de l’aménagement et du logement, dans le cadre d’une mission inter-services de l’eau et de la nature (MISEN). Mais la préservation des tortues marines ne se joue pas seulement sur les plages. D’où la mise en place d’une cohérence entre la terre et la mer. « Le poste de commandement de l’action de l’État en mer, qui est beaucoup mobilisé sur la lutte contre l’immigration clandestine, pourra conduire quelque fois lors d’une opération Shikandra des actions de lutte contre le braconnage, lorsque les braconniers arrivent par voie maritime », complète Jean-François Colombet.
Pour mener à bien ces missions communes, des investissements vont suivre pour rassurer les patrouilleurs. À l’instar des agents du Département qui vont recevoir de nouveaux véhicules mais aussi des jumelles à vision nocturne. « Nous pourrons le cas échéant [les] autoriser à se doter d’armes de forces intermédiaires », ajoute le préfet. Des bombes à gaz pour être précis. « Les équiper de matériel de protection un peu plus militaire était l’une de leurs demandes », rappelle Raïssa Andhum, vice-présidente de la collectivité. Toujours dans la même lignée, le conservatoire du littoral et la communauté de communes du Sud réfléchissent à la construction d’un abri à Charifou et poursuivent la rénovation de la maison de Saziley.
Un arrêté pour interdire l’accès aux plages
Par ailleurs, le point fort de ce pacte est le renforcement de la protection réglementaire des sites les plus sensibles, grâce à la future adoption d’un arrêté de biotope pour Moya et Saziley. « C’est un acte assez fréquent en métropole, qui manque ici, c’est incontestable », souligne le préfet de Mayotte. Et ainsi interdire l’accès aux plages, comme le fait déjà l’intercommunalité de Petite-Terre.
Enfin, il est essentiel de communiquer le plus largement possible auprès du grand public sur la protection des tortues. Mais aussi de sensibiliser les scolaires grâce à la signature d’une convention avec le rectorat. Cerise sur le gâteau avec l’ouverture d’un centre de soins pour les tortues marines au début de l’année 2022, dont le montant de l’opération s’élève à 1.873.000 euros.
Aujourd’hui, les associations et les autorités ont toutes les cartes en main pour faire de ce vœu une réussite sans précédent. « Ce pacte a une approche globale, partenariale et cohérente. Et surtout, nous y mettons notre volonté et notre détermination », résume Jean-François Colombet. Qui donne rendez-vous le mois prochain pour tirer un premier bilan de ces engagements.
Quelle réponse pénale face au braconnage des tortues ?
Le préfet de Mayotte l’assure : « Ce plan ne se substitue pas à l’autorité judiciaire qui joue son rôle. » Un rôle rappelé par Sarah M’Buta, substitut du procureur en charge de l’environnement. « La politique pénale du parquet est ferme concernant le braconnage des tortues. Nous avons un déféremment systématique devant le procureur de la République et un envoi en comparution immédiate devant le tribunal correctionnel avec des peines fermes d’emprisonnement et un mandat de dépôt. »
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