L’usine de dessalement d’Ironi Bé toujours dans le viseur du collectif « Un lagon sans poison ! »

Dans une lettre adressée au préfet de Mayotte, le collectif citoyen « Un lagon sans poison ! » demande la suspension du projet d’usine de dessalement à Ironi Bé, qu’il juge dangereux pour l’environnement et le lagon, appuyé par une pétition de plus de 14.000 signatures et 400 avis défavorables lors de la consultation publique.

Le collectif citoyen « Un lagon sans poison ! » a adressé ce vendredi 16 mai une lettre au préfet de Mayotte François-Xavier Bieuville pour s’opposer au projet d’usine de dessalement à Ironi Bé, “projet dont les impacts écologiques, sociaux et sanitaires suscitent une vive inquiétude parmi les Mahorais”, affirme la lettre. Le collectif s’appuie sur une pétition qu’il a lancée, ayant récolté plus de 14.000 signatures.

L’usine de dessalement d’Ironi Bé toujours dans le viseur du collectif « Un lagon sans poison ! »
La ministre de l’Écologie, Agnès Pannier-Runacher, avait visité l’usine de dessalement de Petite-Terre lors de sa venue à Mayotte en avril.

Il rappelle aussi que lors de la consultation publique, “400 avis défavorables ont été déposés” aussi bien par des citoyens que des ONG. Le collectif demande donc la suspension immédiate des travaux en cours et de considérer les avis rendus lors de la consultation publique. Face à la crise de l’eau, le projet d’usine de dessalement d’Ironi Bé, qui doit produire 10.000 m3 d’eau potable par jour, a pour but d’augmenter la capacité de ressource en eau pour l’heure principalement assurée par les deux retenues collinaires et l’usine de dessalement de Petite-Terre. Lors de sa visite à Mayotte en avril, la ministre de l’Écologie Agnès Pannier-Runacher avait annoncé être intervenue personnellement pour accélérer davantage les procédures administratives liées au chantier et a estimé une livraison pour l’année 2027. « L’objectif est de stabiliser l’approvisionnement en eau de manière structurelle », déclarait-elle à la presse le 15 avril.

Des alternatives proposées

Dans sa pétition, le collectif alerte sur la procédure d’urgence civile employée pour la construction de l’usine, qui dispense le projet de l’ensemble des études d’impact et environnementales généralement requises pour ce genre de chantier. “Un lagon sans poison !” enjoint également la préfecture à considérer deux alternatives : des barges de dessalement off-shore rejetant la saumure (eau fortement salée) au large, ou bien des unités de dessalement à osmose lente, qui rejette une eau à salinité équivalente ou inférieure à celle du milieu naturel. Dans sa pétition, le collectif précise d’autres alternatives face au manque de ressource en eau, comme la lutte contre la déforestation qui empêche l’eau de s’infiltrer dans le sol et nourrir les nappes phréatiques, ou encore la multiplication des récupérateurs d’eau de pluie pour les usages domestiques.

Le collectif écrit également sa “profonde préoccupation quant à la gestion actuelle du dossier, qui donne le sentiment que la situation est volontairement laissée sans réponse, afin de faire passer ce projet en force, au mépris de la société civile, des scientifiques et des ONG qui alertent depuis des mois”. Si pour ces citoyens l’eau est un droit fondamental, elle ne peut être produite en détruisant le patrimoine naturel.

“Un risque écologique majeur”

Pour produire de l’eau douce à partir de l’eau de mer, l’usine doit puiser l’eau salée et, après traitement, relâcher l’eau avec excès de sel dans le lagon. Or, le collectif affirme qu’”un concentré d’eau de mer plus chaude, plus salée, et surtout bourrée de produits chimiques (anti-tartre, antichlore, anti- mousse…) représente un risque écologique majeur” en perturbant l’écosystème. Un véritable manque à gagner, selon eux, pour l’île dont l’activité économique de plusieurs acteurs repose sur le lagon.

De son côté, en novembre 2024, le conseil de gestion du Parc naturel marin avait émis un avis favorable au projet, avec 23 votes pour et 8 contre, mais avec des réserves notamment dûes à des « lacunes » dans le dossier et concernant la modélisation des rejets dans le lagon.

Journaliste à Mayotte depuis septembre 2023. Passionnée par les sujets environnementaux et sociétaux. Aime autant raconter Mayotte par écrit et que par vidéo. Quand je ne suis pas en train d’écrire ou de filmer la nature, vous me trouverez dedans.

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