Déchets sauvages à Mayotte : avec le confinement, les associations ont les mains liées

Une vidéo où l’on voit l’étendue des détritus sur la plage de Majicavo a provoqué l’indignation sur les réseaux sociaux ce week-end. Mais en plein confinement, les marges de manœuvre des associations et des collectivités sont limitées.

Des cadavres de bouteilles au milieu des canettes éventrées, comme un océan de plastique en devenir. Filmé à Majicavo Koropa, ce spectacle aussi coloré que désastreux a fait le tour des réseaux sociaux de Mayotte depuis samedi. Et pour cause : des centaines de déchets attendent patiemment dans le sable, à quelques mètres de la route de la commune de Koungou, d’être emmenés par le ressac jusqu’au lagon. Une catastrophe environnementale, en plein confinement, alors que les associations ne peuvent plus mener d’opérations de ramassage. “Malheureusement, beaucoup de plages à Koungou mais aussi partout sur l’île sont dans un état similaire. C’est navrant et c’est d’autant plus frustrant que nous ne pouvons pas agir”, déplore Faissal Saïd Adinane, le président de l’association Rando Clean.

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La faute du confinement ? Un peu. Avec les nouvelles restrictions de déplacement, plus question d’organiser ces fameuses randonnées à visée à la fois “écolo et sportive”. “Dimanche, nous devions être à la mangrove de Chirongui pour la septième édition de la Rando Clean”, poursuit cet enseignant qui s’est lancé en septembre 2020 dans ce concept de balades “propres”, pendant lesquelles les participants sont amenés à ramasser les déchets sauvages. Déjà, avec l’état d’urgence sanitaire, l’association avait réduit la jauge pour respecter au mieux les gestes barrières. “Mais là, tout a été annulé”, confirme-t-il. Adieu les randonnées, mais aussi les autres événements de la jeune organisation, comme une après-midi avec les élèves du collège de M’Gombani, initialement prévue ce mercredi pour nettoyer les hauteurs de Mamoudzou.

 

Effet “chasse d’eau” à chaque grande pluie

 

Même son de cloche pour l’association locale Longoni Nature Et Découverte, qui œuvre dans la commune de Koungou et connaît bien le problème. “Si nous avions l’autorisation, nous pourrions nous organiser pour nettoyer tout en respectant les gestes barrières”, fait valoir Mattéo Saindou, son secrétaire général. Reste que la situation ne date pas d’hier. “Cette plage-là, je l’ai toujours connue comme ça… Seulement avec la crise sanitaire, il y a eu des difficultés à tout faire, cela n’a pas été nettoyé jusqu’à aujourd’hui donc on se rend soudain compte de l’ampleur des dégâts« , souligne-t-il encore.

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Surtout, la saison des pluies, et la semaine particulièrement diluvienne qui vient de s’écouler, n’ont pas arrangé les affaires de la mangrove. “Comme j’aime à dire, la nature, c’est l’arbre qui cache la forêt”, soupire Faissal en filant la métaphore. En l’occurrence, tous les déchets jetés plus hauts en amont de la rivière sont entraînés jusqu’à la plage quand le temps le permet… “À chaque grande pluie, cela fait un effet chasse d’eau, tout passe dans la ravine et nous retrouvons ces détritus sur la plage de Majicavo”, déroule, sur une note un peu moins poétique, Michel Charpentier, le président des Naturalistes.

Bien sûr, tout ne repose pas sur les quelques bras bénévoles qui acceptent de mettre la main dans le cambouis ! En temps normal, les associations travaillent en coordination avec les services de l’État, de la mairie, et du Sidevam, pour obtenir les sacs poubelles par exemple, ou encore pour être sûrs que les déchets ramassés à la sueur de leur front soient effectivement traités par le syndicat… Sans ce travail de colibris, la collectivité se retrouve donc au pied du mur. “Évidemment que nous allons intervenir, quelle question !”, balaie avec agacement Alain Manteau, le directeur général des services à la mairie de Koungou.

 

Des pièges à déchets comme première solution

 

Le problème ? La municipalité elle aussi subit de plein fouet l’impact du confinement et de la crise sanitaire. “Beaucoup de nos agents sont arrêtés car ils sont cas contacts ou ont eux-même attrapé le Covid”, explique le responsable. Et le matériel vient lui aussi à manquer tandis que les fournisseurs habituels ont parfois baissé le rideau. D’où une logistique de la “débrouille”, en ces temps difficiles. D’ici la fin de l’année, Alain Manteau a bon espoir de résoudre une partie du problème grâce à la mise en place de pièges à déchets dans la ravine, pour éviter qu’emballages et autres bouteilles finissent leur route dans la mangrove. Une bonne solution sur le papier, mais qui devra faire ses preuves sur le long terme. Car il faut aussi s’assurer que tout soit bien récolté pour éviter d’obstruer l’installation. “Quand on sait l’efficacité des services pour relever les poubelles, je ne me fais pas trop d’illusion sur ceux qui vont contrôler l’état des filets… Il faudrait peut-être déjà mettre des poubelles en amont !”, analyse Michel Charpentier. Visionnaire ?

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