Crise de l’eau : l’association des maires propose ses propres solutions pour dessaler

Avec les deux retenues collinaires étant à un niveau très bas, les têtes se tournent évidemment vers le dessalement de l’eau de mer comme solution. A Mayotte, seule l’usine de Pamandzi fournit péniblement 1.300 mètres cubes d’eau par jour. L’association des maires de Mayotte préconise donc de s’adresser à la société SM2D, qui promet un projet opérationnel en trois mois et une production de 5.000 m3 d’eau quotidiennement.

A peine arrivé sur le territoire, Gilles Cantal a rencontré les élus mahorais. Le préfet en charge de l’eau s’est entretenu notamment avec l’association des maires de Mayotte présidée par Madi Madi Souf. « Vous m’avez fait comprendre que la crise s’aggravait de jour en jour puisque les mesures prises pour économiser la consommation d’eau notamment par l’intensification des coupures n’apportaient toujours pas les effets escomptés. Vous avez également rappelé que les retenues collinaires étaient au plus bas de leurs capacités et qu’à ce rythme, notre île risquait de manquer d’eau vers le mois de septembre si la trajectoire de la consommation n’était pas inversée », raconte le maire de Pamandzi, dans un courrier en date du 25 juillet. Ni une ni deux, il lui propose « d’autres mesures complémentaires qui doivent être prises en urgence pour éviter ce scénario ».  Brochure à l’appui, l’élu lui présente la solution proposée par la société SM2D. « Elle pourrait être opérationnel sous trois mois et serait en capacité de renforcer l’offre en eau actuellement disponible en attendant la mise en œuvre des projets structurants de long terme », avance-t-il, espérant ainsi une production de « 5.000 mètres cubes d’eau par jour » supplémentaires.

Un pied de nez à la SMAE

Le courrier de l’association des maires est un camouflet pour la SMAE, le délégataire du syndicat des Eaux de Mayotte (ex-Smeam). La filiale de Vinci gère la seule unité de dessalement d’eau de mer, installée à Pamandzi. Cette dernière produit 1.300 mètres cubes d’eau par jour, alors qu’elle devrait en faire trois, voire quatre fois plus. Pire, en 2018, une rallonge de huit millions d’euros avait été accordée pour améliorer la productivité, mais celle-ci n’avait pas eu l’effet escompté. A ce jour d’ailleurs, le syndicat des Eaux de Mayotte refuse toujours la réception des travaux. En 2022, un nouvel avenant d’une valeur de quatre millions d’euros, soumis cette fois à des pénalités en cas de retard ou d’une production trop faible, a été signé entre les deux parties. Dans sa récente réponse au député Mansour Kamardine, le ministère de l’Intérieur et des Outre-mer indiquait que ces nouveaux travaux « en cours » devraient être achevés en « novembre 2023 » (voir par ailleurs). En déplacement à Mayotte en juin, le désormais ex-ministre délégué aux Outre-mer, Jean-François Carenco, tablait plutôt pour « décembre ».

En parallèle, d’autres projets doivent toujours voir le jour, dont des nouvelles usines de dessalement à Ironi Bé, Longoni et Sada, ou la retenue collinaire d’Ourovéni. « D’autres investissements, financés également en grande partie par l’État et le Feder [N.D.L.R. Fonds européen de développement régional], viendront également augmenter la capacité de production d’eau quotidienne afin de limiter au maximum les tours d’eau à l’avenir », avait promis l’État en août 2022, lors de la signature de l’avenant pour Pamandzi. La sécheresse s’est installée et aucune de ces usines n’est en travaux actuellement. Pourtant, d’autres sociétés sont intéressées. C’est le cas du groupe Suez, déjà présent à Mayotte dans le domaine des déchets (avec la Star). Si celui-ci n’est pas motivé pour le moment à reprendre la délégation pour tout le réseau mahorais (la DSP doit se terminer en 2026), la maîtrise d’ouvrage de nouvelles usines l’intéresse davantage, sachant qu’il développe des solutions dans les pays du Golfe.

Est-ce que la proposition de l’association des maires d’une autre société sera donc entendue ? Rien n’est moins sûr.

Romain Guille est un journaliste avec plus de 10 ans d'expérience dans le domaine, ayant travaillé pour plusieurs publications en France métropolitaine et à Mayotte comme L'Observateur, Mayotte Hebdo et Flash Infos, où il a acquis une expertise dans la production de contenu engageant et informatif pour une variété de publics.

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