À Coconi, la flore de Mayotte connaît un regain d’attention

Le pôle d’excellence rurale (PER) de Coconi se renforce cette semaine. Une équipe d’universitaires s’y trouve pour un projet financé par le conseil départemental de Mayotte, à savoir développer la pharmacopée et la cosmétopée de l’île. Au cœur du site, un premier laboratoire d’extraction et d’analyses est justement en train de voir le jour.

Les machines arrivées au cours du mois d’août sont encore dans le carton, le temps que les travaux du laboratoire se terminent. « C’est le premier laboratoire qui fera des analyses en cosmétique », présente Yannick Eveno, responsable du laboratoire et détaché de l’Université de Perpignan (Pyrénées-Orientales). Une salle d’extraction, attenante à une autre servant au séchage des feuilles, un local où seront effectuées les analyses, le laboratoire du pôle d’excellence rurale (PER) de Coconi prend forme, mais ne sera opérationnel qu’à partir de la fin de septembre, l’installation des outils étant très spécifique. « Sans solvant organique », mais avec de l’eau et des alcools, l’extraction de plantes mahoraises « sous tous les formats » va permettre d’isoler des molécules et vérifier l’étendue de leurs vertus. « L’idée, c’est de ne pas faire de la recherche pour de la recherche », prévient l’universitaire. Les producteurs sont ainsi associés pour que le laboratoire puisse contrôler la qualité de leurs produits et également comment ils pourraient être valorisés.

Ce nouvel outil se trouve en tout cas au cœur du projet mené par Cédric Bertrand. Le professeur de l’Université de Perpignan explique qu’il s’agit de la concrétisation d’une réflexion entamée il y a deux ans maintenant. « On va travailler à la fois sur la qualité et l’innovation », ajoute-il. Son équipe de six experts, dont lui, compte revenir (en fonction des financements) faire des missions de plusieurs semaines. « Avec les représentants de la vanille de Mayotte, on veut par exemple protéger cette production, l’aider à l’asseoir. » L’objectif économique est ainsi primordial. Selon Yannick Eveno, leur raison d’être est « de relancer l’ylang-ylang », la fleur jaune qui fait la réputation de Mayotte a subi la concurrence venue des Comores ou de Madagascar.

La pharmacopée mahoraise mise à l’écrit

Dans l’équipe débarquée sur l’île aux parfums cette semaine, deux membres de l’Institut de recherche pour le développement de Toulouse, Mohamed Haddad et François Chassagne, s’intéressent de près à la pharmacopée traditionnelle de Mayotte. Plantes utilisées localement, pratiques des tradi-praticiens, le domaine est large. François Chassagne prévient toutefois que les plantes présentent toujours « des risques allergiques, toxiques en fonction des dosages » et qu’il serait compliqué pour eux de mettre en valeur des vertus de telle ou telle plante, même si elles sont utilisés depuis des siècles localement. Les deux chercheurs ne seront pas là d’ailleurs pour juger de l’efficacité de telle plante ou telle pratique, ils veulent plutôt « mettre à l’écrit » ce qui se transmet d’habitude oralement et qui pourrait, peut-être, tomber dans l’oubli.

Des universitaires déjà sur le pont

Les travaux de l’équipe peuvent déjà s’appuyer sur ceux réalisés par Oumaynou Darouech et Slimane Chaïb. La doctorante et le post-doctorant travaillent sur la cosmétopée de l’île aux parfums. La première, qui a fait son lycée à Mayotte, réalise un inventaire de la flore mahoraise et surtout de ses vertus dans la dermo-cosmétologie. Son collègue planche davantage sur le développement de débouchés, notamment d’une gamme capillaire et de crèmes. « On a sélectionné cinq plantes », révèle-t-il, sans vouloir trop nommer les secrets de fabrication. Mais une fleur emblématique de l’île et déjà connue pour ses vertus en fera définitivement partie.

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