En janvier 2021, l’association mangrove environnement avait lancé un grand plan de reboisement dans la mangrove de Tsimkoura au sud de l’île. Un an après, où en est l’équipe ? Quels sont les résultats ? Réponse avec Boina Said Boina, directeur de la structure et lauréat des Trophées mahorais de l’environnement en décembre 2021 dans la catégorie personnalité de l’année.
Fleur, rouge, jaune, blanc, gros poumon, pomme ou encore petites feuille… La mangrove de Tsimkoura offre une biodiversité unique avec pas moins de sept espèces différentes de palétuviers ! “On me demande souvent pourquoi je me concentre uniquement sur cet endroit”, s’amuse Boina Said Boina. “Mais si j’arrive à restaurer cette mangrove, je serais en capacité de venir en aide à toutes autres mangroves de Mayotte”, affirme-t-il. Dans son laboratoire à ciel ouvert, le trentenaire expérimente jours après jours de nouvelles méthodes pour tenter de sauvegarder cet écosystème qu’il aime tant.
Au total, 5.000 plants ont été mis en terre depuis un an. Au gré des vents et des marées, certains n’ont pas survécu tandis que d’autres arborent fièrement de jeunes feuilles d’un vert très tendre. “Selon les zones où nous avons planté, les palétuviers ont plus ou moins tenu et aujourd’hui, j’ai bon espoir pour ceux qui poussent”, se réjouit le directeur de l’association mangrove environnement.
La main verte
Après un tour dans son terrain de jeu favori, Boina Said Boina révèle sa méthode de travail. “En temps normal, les palétuviers devraient se régénérer eux-mêmes. Mais à cause de l’érosion, du réchauffement climatique et de nombreux facteurs extérieurs, nous sommes obligés de donner un coup de pouce à la nature et de mettre en terre nous-mêmes les plantules.” Sous les palétuviers en fleurs, Tadjidine Madi œuvre quotidiennement pour le reboisement des parcelles entre terre et mer. Habitant de la commune depuis de nombreuses années, il a vu le paysage se détériorer… « Là, la mangrove allait beaucoup plus loin et ici avant, il y avait des poissons”. Autant de souvenirs d’une nature préservée que l’on peine par endroit à imaginer.
Une “course contre la montre”
Heureusement, tels des médecins urgentistes, les membres de l’association mangrove environnement viennent panser les plaies de cet écosystème trop souvent mis à mal. “Nous ne nous rendons pas compte de tous les rôles qu’a la mangrove”, affirme Boina Said Boina. Barrière naturelle contre les marées, tsunamis et l’érosion, captation de carbone, nurserie de poissons… Les forêts de palétuviers sont des écosystèmes primordiaux pour l’île au lagon. Une richesse unique mais très difficile à recréer. “À cause du réchauffement climatique, beaucoup de plantes sont cuites sur place. Les crabes sont aussi nos grands ennemis car ils n’ont pas de prédateurs et raffolent des petites feuilles de palétuviers. Ajouter à cela la pollution liée à l’activité humaine, nous avons encore du pain sur la planche”, annonce le directeur.
Grâce à divers financements, la structure associative espère pouvoir bientôt reconquérir une vingtaine d’hectares et freiner l’érosion des côtes. “Ce sera un projet sur trois ans, nous souhaitons commencer les travaux au plus vite car c’est une véritable course contre la montre pour sauvegarder notre patrimoine naturel.” Toujours motivé, Boina Said Boina, reste positif et se félicite du travail déjà accompli entre vase et lagon. Son rêve à présent est de voir fleurir les palétuviers par milliers au pays des makis…