Mais au-delà de ce rejet, c’est une réflexion globale sur l’école mahoraise qu’ils semblent vouloir en filigrane.
Quelle école pour Mayotte quand on accuse toujours le déficit des centaines de salles de classe dans le département. Une situation inexistante dans aucun autre territoire français.
Mais il faut dire que la situation mahoraise est hors du commun de la France hexagonale.
Des écoles se construisent, mais elles ne sont pas suffisantes et sont de moins en moins suffisantes compte tenu de la pression de l’immigration clandestine. Désormais, les mairies construisent en hauteur, afin de pouvoir pallier le problème foncier avec la forte pression des effectifs, d’autant plus que 80% d’entre elles ne sont pas aux normes de sécurité et qu’aucune ne dispose de cantine scolaire. Mais déjà avoir une restauration scolaire est considérée comme un luxe parce que même des cahiers et des livres, elles en manquent bien souvent.
C’est dans ce contexte que le gouvernement décide de la mise en place d’un nouveau rythme scolaire. Si Mayotte est parfois exemptée de certaines lois républicaines, elle ne dérogera pas à celle-ci. Ne dit-on pas que le rythme scolaire tel qu’il est appliqué à Mayotte est en opposition complète avec le biorythme de l’enfant ? L’État a donc décidé d’y remédier.
De nombreuses communes scolarisent les enfants au rythme des rotations, seuls moyens pour respecter la loi sur la scolarisation des enfants de trois à seize ans.
Que les rythmes scolaires ne s’appliquent qu’en 2015
À partir de la rentrée prochaine, les écoles en rotations bénéficieront, elles, d’une dérogation, mais pour les autres, les maires ont l’obligation d’appliquer la loi. Sinon, ils seront dans l’illégalité et seront condamnés comme l’a souligné Benoit Hamon le ministre de l’Éducation nationale le 12 juin dernier.
Dans ces conditions, les maires de Mayotte avec à leur tête, leur président Saïd Omar Oili se sont réunis lundi dernier et ont examiné la réforme. Dans la foulée, ils ont écrit une missive adressée au préfet Jacques Witkowski pour expliquer leur refus d’appliquer les rythmes scolaires. En premier lieu, ils reviennent sur les rotations scolaires, dues, disent-ils à l’arrêt des programmes sur les constructions scolaires.
Mais les maires reviennent surtout sur l’absence de moyens financiers et « personnels formés et compétents pour la prise en charge des enfants dans les activités périscolaires ».
Ils mettent également en avant « les charges inhérentes à la mise en oeuvre de la réforme et l’inexistence de la restauration scolaire ».
Dans ces conditions, les élus demandent au gouvernement de « prendre en compte leurs préoccupations » qu’ils disent « fondées ». Et dans le fond, ils proposent l’introduction « d’une nouvelle réflexion et une concertation poussée avec l’ensemble des collectivités locales, les acteurs concernés dans le domaine éducatif et celui des activités périscolaires » pour réellement faire reculer l’échec scolaire. Ils espèrent que l’État acceptera de repousser « peut-être en 2015 » l’application de la réforme à Mayotte.
Dans la salle de réunion du Smiam où s’est déroulée la rencontre avec la presse, une délégation du Snuipp était présente pour surveiller ou voir si les élus disaient bien ce qui a été convenu. Même si ça n’est pas avoué, le Snuipp n’est pas étranger au positionnement des élus.
8500 heures de cours pour l’écolier métropolitain contre 4500 pour le Mahorais
Le syndicat a déjà déposé une notification de grève pour le 26 août prochain à cause de la réforme. L’élève mahorais est visiblement le dernier de la République à tout point de vue.
Quand un élève métropolitain reçoit 8500 heures de cours de la maternelle au CM2, le jeune mahorais quant à lui en suit 4500, soit moitié moins. « On demande l’application des principes de réalité » expose Saïd Omar Oili, qui appuie les difficultés financières que les mairies subissent. Le maire de Pamandzi, Mahafour Saïdali, assure quant à lui venir d’une réunion à l’établissement d’allocation familiale de Mayotte et il s’avère selon lui que jusqu’alors, il n’est pas sûr que les mairies de Mayotte puissent bénéficier des 90 euros alloués par enfant et par an, mais seulement de 40 euros.
« Les élèves de Mayotte sont lésés, on est dans l’impossibilité de mettre ça en oeuvre » explique l’élu sous le regard approbateur des ses homologues présents. Pratiquement toutes les mairies de l’île ont affiché leur détermination et étaient présentes. Saïd Omar Oili conclut en demandant que « les vrais problèmes de Mayotte ne soient pas esquivés ».
Kalathoumi Abdil-Hadi
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