Climat sous haute tension à Kahani

Depuis samedi dernier, Kahani est le théâtre de scènes de violence à répétition. Un accident de la route impliquant un automobiliste est une fillette de 5 ans en serait l’origine. Barrages, caillassages et cambriolages rythment le quotidien des habitants depuis trois jours malgré la présence des forces de l’ordre. 

“La goutte d’eau qui a fait déborder le vase” : le maire de Ouangani, Ahmed Combo Ali, ne trouve pas d’autres mots pour qualifier la situation dans laquelle se trouve le village de Kahani, dans la commune de Ouangani, depuis le week-end dernier. 

Samedi dans la matinée, en effet, un automobiliste percute une petite fille de 5 ans. Cette dernière, grièvement blessée, est amenée par les secours, mais l’évènement met le feu aux poudres. Les habitants du village érigent aussitôt un barrage sur la route départementale qui relie Kahani à Chiconi. Du vieux mobilier, de l’électroménager, des poubelles et des carcasses de voitures jonchent alors la route dans le seul objectif de faire entendre les revendications des habitants. Ils réclament des bandes ralentisseurs ou un dos d’âne sur cet axe car les automobilistes roulent trop vite et des accidents sont déjà survenus au même endroit par le passé. “Il y avait des ralentisseurs sur cette route, mais le Conseil départemental l’a rénovée l’année dernière et il n’a pas remis les bandes ralentisseurs. Je l’ai signalé et on m’a dit qu’ils allaient les remettre. Cela fait un an mais ils me disent toujours que c’est en cours”, explique le maire de la commune. S’il dit comprendre la colère des habitants le jour de l’accident – “c’était compréhensif” indique-t-il – la suite des événements dégénère rapidement. La gendarmerie intervient et dégage la route, mais les barrages sont réinstallés dans la soirée de samedi et des individus y mettent le feu. Le climat dans le village se détériore d’heure en heure, mettant en opposition les habitants et les gendarmes. Ces derniers doivent faire usage de bombes lacrymogènes pour disperser les individus. 

Dimanche en fin d’après-midi, le blocage de la route reprend de plus belle et la gendarmerie déploie les grands moyens afin de maîtriser la situation. Entre 30 et 80 gendarmes sont engagés sur les lieux. Un hélicoptère survole également la zone. “L’opération a duré jusqu’à lundi matin puisqu’il y a eu d’autres affrontements dans la nuit de dimanche à lundi. Cinq individus ont été interpellés et mis en garde à vue”, annonce le général Philippe Leclercq, commandant de la gendarmerie de Mayotte. Parmi eux, un mineur et quatre jeunes majeurs. Le secteur restera sous haute surveillance durant plusieurs jours. De son côté, la municipalité affirme “avoir fait son travail”. Désormais, seul le Département pourrait calmer la colère des habitants de Kahani. Selon le maire, “la solution à long terme est de mettre des bandes ralentisseurs sur cette route départementale. Et c’est le Département qui doit le faire.” 

La caserne de pompiers de Kahani vandalisée 

Cette recrudescence de violence ne s’est pas arrêtée aux barrages et affrontements entre les habitants et la gendarmerie. Dans la nuit de dimanche à lundi, la caserne de pompiers qui se trouve à quelques mètres du tronçon de route en question a été visitée par une cinquantaine d’individus alors que les soldats du feu se trouvaient sur les lieux. “Les pompiers ont clairement été pris pour cible. Des véhicules d’intervention ont été pillés et vandalisés. Il y a eu des jets de pierres sur les pare-brises, le petit magasin a également été pillé”, affirme le syndicat des pompiers, SNSPP-PATS. Les malfaiteurs ont emporté un groupe électrogène et une multitude de matériels. Fort heureusement, aucun blessé n’est à déplorer, mais les dommages psychologiques sont bien 

présents et les pompiers pointent du doigt leur direction. “Les collègues sont presque anéantis car le service ne fait rien pour la sécurisation des lieux. L’intrusion s’est faite par le portail car celui-ci ne ferme pas à clé. Pour eux, ce n’est que du mépris. Cet évènement engendre un état d’esprit de méfiance envers la direction”, explique le syndicat des pompiers, SNSPP-PATS.

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