{xtypo_dropcap}D{/xtypô_dropcap}es parents, des employées des crèches et des petits enfants faisant un sit-in au conseil général pour réclamer les subventions nécessaires à la survie de l'association, c'était fin 2007, alors que la crèche des Beaux Enfants luttait contre la fermeture. La même année, la crèche de Kani-Kéli avait du fermer quelques mois avant les grandes vacances pour les mêmes problèmes. A l'époque, on parle de mettre en place des conventions pluriannuelles pour éviter qu'un tel problème se répète et favoriser la création d'autres crèches, en très faible nombre sur l'île. Des discours mais pas d'action, et le problème se répète…
Privés de salaires depuis 3 mois à Kani-Kéli et 2 mois à M'tsahara, les employés lassés se sont mis en grève. A Combani, la crèche associative Kara Raouki Titi pense tenir jusqu'au mois de juillet, mais pas plus. "Le conseil général et la mairie se renvoient la balle", explique la directrice de Combani, Hélène Delarue. "Les présidents des différentes crèches se sont regroupés pour exiger une rencontre entre le président de l'Association des maires et le conseil général, pour qu'ils se mettent d'accord sur qui verse quoi."
Une rencontre devait avoir lieu mercredi, mais les directrices n'ont aucune nouvelle. "En 2008, le conseil général avait donné une enveloppe à chaque crèche censée couvrir uniquement les salaires", poursuit Hélène Delarue. "Ils nous avaient d'ailleurs averti que la subvention ne serait peut-être pas reconduite l'an prochain. Apparemment la Dass a accepté cette année de donner un financement pour pallier les manques du CG, mais selon les crèches nous avons des échos différents et ne savons pas vraiment à quoi nous attendre."
"Des tarifs très bas, selon les revenus"
Selon les communes dont elles dépendent et les tarifs qu'elles pratiquent, les situations diffèrent, mais toutes les crèches associatives sont menacées de fermeture. A l'intérieur même des communes, on constate des différences de traitement : la mairie de Tsingoni prend en charge le loyer et les charges de la crèche de Tsingoni, alors qu'elle ne verse que 800€ par an à celle de Combani.
L'autre grand financeur est la Caf, qui devrait voter cette semaine les subventions aux crèches pour 2009, mais leur doit toujours une partie du financement 2008. "Ils viennent juste de nous verser la subvention de 2006 qui n'était jamais arrivée", annonce, mi-amusée mi-consternée, Christelle Tlili, nouvelle directrice de la crèche de Tsingoni et adjointe à celle de Combani. "Au mois d'août, nous allons devoir payer les charges, et cela va devenir très difficile", prévient Hélène Delarue, alors que M'tsahara n'a pas réussi à payer le 4e trimestre 2008.
Si Combani et Tsingoni tiennent toujours, c'est surtout grâce aux cotisations des familles, alors que celles de M'tsahara ne suffisent plus. "Contrairement à ce que certains pensent, les crèches ne sont pas des établissements pour enfants de wazungus : chez nous, 99% des enfants sont Mahorais", rappelle la directrice de M'tsahara Sylvie Lecomte. "Pour leur être accessible, nous faisons des tarifs très bas, ils vont de 60 à 240€ par mois selon les revenus, avec une cotisation annuelle de 25€." Ce n'est donc que grâce aux subventions que l'association peut accueillir toute l'année 20 enfants et employer 8 personnes.
Les crèches de plus en plus prisées
A Combani, qui accueille environ autant d'enfants mahorais que wazungus à des tarifs allant de 700 à 4.000€ l'année et une cotisation annuelle de 70€, la direction souhaitait mettre en place des places à tarif "caribou", avec une participation minimale de la famille. Le contexte actuel ne permet évidemment pas une telle démarche.
"Notre seule solution pour augmenter la trésorerie serait d'augmenter les tarifs et les cotisations, mais cela fermerait l'accès à la crèche à certaines familles", déplorent les trois directrices. En Métropole, c'est la Caf qui verse une subvention par enfant, pour compléter l'écart entre ce que peut mettre la famille et le tarif de la prestation. Les crèches sont ainsi assurées de toucher une somme fixe par enfant accueilli. A Mayotte c'est chaque année le même mystère : qui versera combien et quand ? Un système, ou plutôt une inexistence de système, qui ne permet pas de projets à long terme.
"Jusqu'ici, les Mahorais avaient pour habitude de faire garder leurs enfants par la coco, ou d'embaucher une Anjouanaise, mais de plus en plus on voit une volonté des parents de voir leurs enfants encadrés et parler français le plus tôt possible", constate Sylvie Lecomte. "Il y a une liste d'attente importante dans les crèches, d'autant qu'il n'y a pas assez de places en maternelle : à M'tsahara nous accueillons aussi les enfants de 3 ans pour qu'il n'y ait pas un trou entre la crèche et l'école."
Un certain nombre de parents soutiennent la grève de M'tsahara, ceux de Combani et Tsingoni ne sont pas encore tous au courant des difficultés, mais seront associés si aucune solution n'est trouvée par les pouvoirs publics et que les associations décident de médiatiser leurs difficultés.
Hélène Ferkatadji
Mayotte Hebdo vise à contribuer au développement harmonieux de Mayotte en informant la population et en créant du lien social. Mayotte Hebdo valorise les acteurs locaux et les initiatives positives dans les domaines culturel, sportif, social et économique et donne la parole à toutes les sensibilités, permettant à chacun de s'exprimer et d'enrichir la compréhension collective. Cette philosophie constitue la raison d'être de Mayotte Hebdo.