{xtypo_dropcap}"S{/xtypo_dropcap}top aux violences". C'est le slogan inscrit sur une banderole accrochée à l'entrée du collège de M'tsangamouji, c'est aussi celui du petit film réalisé par First Prod et diffusé aux élèves lors des interventions sur la justice. Destiné à informer les futurs citoyens de leurs droits et devoirs, ce partenariat Justice-Education est en place depuis deux ans.
L'année dernière, le procureur Thomas Michaud et le juge pour enfants Michel Sastre étaient intervenus dans plusieurs établissements, auprès des élèves mais aussi de leurs parents, "pour travailler avec eux sur l'autorité, les empêcher de démissionner", explique la présidente du TPI Marie-Thérèse Rix-Geay.
Les deux hommes ont quitté Mayotte mais les actions continuent. Cette année c'est Caroline Ballerini, capitaine de police et chargée de mission territoriale d’accès au droit, qui intervient dans une dizaine de collèges depuis janvier et jusqu'à la fin de l'année, touchant ainsi plus de 1.500 élèves. Axée sur la prévention des phénomènes de violence, l'intervention de Mme Ballerini a profité mardi matin à tous les élèves de quatrième du collège de M'tsangamouji, une commune qui a connu récemment des épisodes de violences entre jeunes, qui n'ont toutefois pas touché l'établissement.
En introduction de l'intervention, le court-métrage de 3minutes "stop violences" est projeté aux élèves. Sur le modèle des spots de prévention anglo-saxons très "choc", ce spot présente trois personnages qui racontent leur histoire. Un petit garçon battu par son père devant sa mère silencieuse, une adolescente hébergée chez son oncle, exploitée et battue par la femme de celui-ci, et une jeune mariée enceinte battue par son mari. Les personnages sont filmés de dos, on ne voit que leurs cicatrices et leurs hématomes.
Droit local et droit commun
Les différentes situations du film permettent à Mme Ballerini d'aborder la violence sous différents thèmes. Celui des punitions par les parents tout d'abord. Les jeunes semblent conscients du fait que la gifle est autorisée, mais pas les coups de ceintures que reçoit Karim, le petit garçon du film. L'intervenante fait un parallèle entre le rapport bêtise-punition et le rapport infraction-sanction. Elle apprend ainsi aux jeunes que les violences volontaires peuvent conduire à la prison et, au grand étonnement de plusieurs, que le viol est considéré comme aussi grave que le meurtre.
Tout au long de son dialogue avec les jeunes, très participatifs, Mme Ballerini leur fait comprendre la différence entre le droit local et le droit commun. "Vous êtes bientôt des adultes, vous devez connaître les lois françaises." Ainsi, le cas de la jeune mariée lui permet d'aborder les violences conjugales, de rappeler que dans le droit français on ne peut arranger de mariage, que le consentement de l'épouse est obligatoire, de même que pour les rapports sexuels entre mari et femme. Le concept de viol conjugal fait tiquer les jeunes, qui, comme leurs aînés masculins, ont du mal à concevoir qu'un homme doive avoir l'autorisation de sa femme pour avoir des rapports sexuels avec elle.
L'intervenante rappelle également les conditions d'âge : 18 ans pour se marier, 15 ans pour avoir des rapports sexuels, et tente de leur faire comprendre qu'un majeur qui épouserait devant le cadi une fille de moins de 15 ans serait condamnable par la justice pour détournement de mineure.
Parler
Point commun à tous les personnages du film : le silence. Le petit Karim n'ose même pas dire à son meilleur ami qu'il est battu; l'adolescente se heurte au refus de l'écouter de sa mère et ne va pas au lycée quand ses marques sont trop visibles; la jeune mariée pleure en silence, sans comprendre pourquoi son homme la bat… Caroline Ballerini incite les jeunes à la parole, leur fait énumérer les adultes auprès de qui ils peuvent s'adresser, leur apprend comment on porte plainte, en précisant qu'une victime sans papier reste une victime, et qu'elle sera entendue par la police.
La discussion se poursuit sur les violences autres que physiques : verbales, psychologiques,… et sur le casier judiciaire. Car l'intervention consiste à leur apprendre leurs droits et à délier les langues des victimes, mais aussi à leur faire comprendre à quoi ils s'exposent en se rendant coupables de violences, ou pire. Mme Ballerini leur explique ainsi que plusieurs professions leurs seront interdites s'ils ont un casier. "Vous n'avez pas forcément été éduqués dans la loi française, vous devez la connaitre pour votre vie d'adulte."
Exceptionnellement lors de cette séance, les jeunes ont ensuite pu poser leurs questions au vice-recteur, à la présidente du tribunal de première instance, à l'assistante sociale et à l'infirmière du collège. Dans la plupart des établissements, ces séances ont été précédées d'un travail avec les personnels d'éducation sur le règlement, le respect et la prévention de la violence.
Hélène Ferkatadji
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