Place du marché de Mamoudzou, 7h00 du matin. De nombreux ressortissants anjouanais soutenus par quelques grands comoriens prennent possession de la gare maritime de Mamoudzou, arborant des pancartes sur lesquelles on pouvait lire : "Nous voulons son retour aux Comores" (Mohamed Bacar, ndlr) ou en alors "Nous luttons contre la corruption, le racisme et l’esprit satanique de France".
Objectif principal : se rendre en Petite Terre à la préfecture pour demander au représentant de l’Etat le transfert de Mohamed Bacar à Moroni. Devant cette cacophonie, la direction du service des transports maritimes (STM) prend la sage décision de suspendre la rotation des barges afin d’éviter tout incident, empêchant ainsi un certain nombre de travailleurs de se rendre sur leur lieu de travail.
La foule s’amasse de plus en plus et les esprits s’échauffent. Animés d’une réelle volonté de nuire, certains manifestants commencent par bloquer la circulation du rond-point de la place du marché à une heure où la circulation est dense. Aucune intervention des forces de l’ordre n’est perceptible à cet instant. Certains Mahorais s’énervent, déplorant l’inertie des autorités de l’Etat. "Quand il s’agit d’une manifestation de Mahorais, les gardes mobiles interviennent immédiatement", lâche un jeune chef d’entreprise. "Il faut que les autorités françaises arrêtent de jouer un double jeu", martèle une jeune femme excédée de voir la capitale livrée aux "voyous".
Vers 9h00 du matin, la situation prend une autre tournure. Un collègue journaliste de RFO qui cherche à recueillir des informations est pris à partie par les manifestants. Son péché : avoir simplement essayé de faire son métier. Il devra son salut à l’intervention des clients d’un bar restaurant de la place. Le ton monte, les insultes racistes et xénophobes fusent, les poubelles s’envolent. Les voitures garées aux abords de la rocade de Mamoudzou sont saccagées, les pare-brises détruits. La circulation reste coupée. Une fourgonnette de la gendarmerie qui essaye de se frayer un passage sur le rond-point a eu les vitres littéralement explosées à coups de pierres. Pour éviter tout saccage, les commerces et les bureaux la place baissent leurs rideaux vers 9h30.
Sale temps pour les Mzungus
La situation vire à cet instant au cauchemar. Les assaillants déterminés à en découdre s’en prennent à tous les Mzungus qui circulent sur Mamoudzou et ses alentours. Toujours aucune intervention des forces de l’ordre à l’horizon. La capitale est sous le contrôle des clandestins. Un jeune métropolitain est passé à tabac à la rocade de Mamoudzou. Son scooter est traîné jusqu’à la devanture de la BFC avant d’être brûlé. Une jeune femme qui aborde la descente du Caribou en moto est également attaquée sans comprendre pourquoi. Elle se fait elle aussi lyncher à son tour. Sa moto est écrasée à coups de galets avant d’être brûlée. Les sapeurs pompiers viendront à sa rescousse.
Des manifestants armés de barres de fer et de cailloux crient "A mort les Mzungus !", "Les Mzungus dehors !". C’est la panique totale dans la capitale. La foule qui s’est amassée aux alentours crie au scandale. "Le préfet doit prendre ses responsabilités", clame un jeune cadre du conseil général. "Si personne ne réagit, la situation risque d’avoir des conséquences dramatiques", renchérit un autre.
Vers 10h00, les forces de l’ordre décident d’intervenir. Trois fourgonnettes de la police font leur apparition sur la place du marché. Les bombes lacrymogènes commencent à pleuvoir comme une pluie torrentielle en période de Kashi kasi. La foule se disperse. Les gens courent dans tous les sens. Certains, plus fragiles, tombent évanouis. En quelques minutes à peine, le rond-point de Mamoudzou se vide, laissant la place à l'épaisse fumée noire des deux motos carbonisées.
Les policiers procèdent à une dizaine d’interpellations. Des poches de résistance se créent de parts et d’autres. Le rond-point de Kawéni ainsi que celui du Baobab sont bloqués. Un militaire du GSMA de Combani à bord d’une fourgonnette s’est fait débarquer manu militari de son véhicule avant d’être molesté devant la caserne des sapeurs pompiers. Sa voiture sera ensuite renversée au milieu de la route et brûlée. Les forces de l’ordre en sous-effectif sont rapidement débordées par les événements.
"Après les Mzungus on s’en prendra aux Mahorais"
La psychose règne dans zone industrielle de Kawéni, poumon économique de l’île et fief des clandestins. Les entreprises ferment boutique et renvoient leur personnel à la maison, quand c'est possible, mais souvent le personnel se terre dans les magasins, les bureaux. La circulation devient quasiment impossible. L’économie de l’île est paralysée à cause d’un groupe d’individus sans foi ni loi dont la seule motivation est de nuire aux intérêts de l’île.
Un groupe de jeunes passablement éméchés se dirige vers la station-service de Kawéni pour y mettre le feu. Heureusement, les forces de l’ordre informées à temps arrivent sur place et mettent en place un cordon de sécurité pour éviter la catastrophe. Au même moment, de l’autre côté, au carrefour de M’tsapéré, un autre métropolitain a été contraint de se mettre à genoux avant de vider ses poches. "Après les Mzungus on s’en prendra aux Mahorais", clament les manifestants.
Un jeune mahorais témoin de la scène monte au créneau, suivi par quelques copains. La tension monte, les coups partent dans tous les sens, pendant que dans la rue du stade une autre voiture, avec toujours un métropolitain, reste bloquée au milieu le pare-brise en éclat.
Positionnés devant la caserne des pompiers, les forces de l’ordre ont arrosé les hauteurs de Kawéni à coups de bombes lacrymogènes pendant que plusieurs métropolitains restaient cloîtrés, certains chez eux, d’autres chez des amis, craignant de circuler sur un territoire qui est le leur.
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