26/11/2009 – Conseil général de Mayotte

 

 

{xtypo_dropcap}R{/xtypo_dropcap}ecalée. La CDM a échoué en session de rattrapage. La Chambre territoriale des comptes a en effet jugé trop molles – pour ne pas écrire inexistantes -, les mesures prises par le conseil général afin de rétablir l'équilibre budgétaire, et a demandé au préfet de régler et rendre exécutoire le budget supplémentaire 2009 de la CDM.

Selon la version officielle du conseil général, c'est un malentendu sur les délais de transmissions du programme de redressement à la Chambre territoriale des comptes qui serait à l'origine de ce cinglant revers… Alors que cette dernière attendait des propositions concrètes dans le mois qui a suivi l'envoi de son premier avis, les édiles du CG pensaient avoir jusqu'à la fin de l'année pour exposer et faire valider leur plan de redressement.

Quoiqu'il en soit, cet arrêté pris le 19 novembre dernier par le préfet (voir encadré) demeure la première ingérence de l'Etat dans les comptes de la Collectivité depuis la décentralisation, survenue en 2004. La Collectivité doit désormais, dans les plus brefs délais, prendre une série de mesures drastiques pour ne pas voir se reproduire le même scénario lors du vote de son budget 2010, qui doit intervenir avant le mois de mars prochain.

 

Economiser 22 M€ par an durant trois ans

 

Selon nos informations, un rapport contenant l'ensemble des mesures modificatives, concourant au rattrapage des 72,5 M€ de déficit, établi par la Chambre territoriale des comptes, devrait être soumis au vote des élus lors de la session plénière du 3 décembre prochain. On y trouverait pêle-mêle un ensemble de dispositions à même de faire économiser au conseil général plus de 22 M€ sur son budget 2010.

La plus significative sans soute consiste à ne pas renouveler près de 800 contrats de courte durée, qui pourrait permettre à la CDM de réduire sa masse salariale de 7,5 M€. Le rapport préconise également de mettre fin aux contrats de développement local (CDL), des postes qui se rapidement mués en "emplois sociaux" selon M. Oïli, occupés principalement par des "mamas" d'après Jaques Martial Henry, mais dont les titulaires avaient initialement comme fonction de faire remonter les préoccupations des maires à leur élu cantonal. La suppression de ces postes aussi pléthoriques qu'inefficaces devrait permettre au CG de sauver 2,5 M€.

Autre mesure qui encourage la polémique : la hausse des tarifs de la barge. Les élus ont fait savoir qu'ils ne transigeraient pas sur le fond. En revanche, des discussions sont en cours avec les partenaires sociaux pour déterminer les modalités de cette hausse. Pour l'heure, les propositions ne font jouer que le volet tarifaire. Dans ce cas, les usagers seraient les principaux bailleurs de la remise à flot de la Collectivité – et du service -, ce qu'ils ne sont pas prêts d'accepter, comme le prouvent leurs récentes mobilisations.

 

Barge, électricité, santé… l'usager devra payer

 

Le rapport suggérait initialement une hausse significative du prix de la traversée en barge des véhicules de plus de trois tonnes et demi, passant par exemple, pour les poids lourds de plus de 26 tonnes, le semi-remorque et les engins de chantiers, de 122 € à 300 € (+145%). Concernant les véhicules des particuliers; le nouveau prix de passage conseillé était de 20 € au lieu de 15 € actuellement (+33%). Pour les passagers et les vélos, le prix n'aurait dû que peu augmenter, passant de 0,75 € à 1 € (+33%); et de 1 € pour le scooter et cyclomoteur, passant de 2 € à 3€ (+50%).

Paradoxalement, le fonctionnement du service de transport maritime (STM) du conseil général, qui emploie plus de 300 agents, n'est pas remis en cause. Rappelons ici que le STM présentait un résultat déficitaire de 5 M€ en 2008 et une note interne de l'an dernier faisait état de 90 agents "non affectés".

La mise en place d'une taxe supplémentaire sur les prix de l'électricité est également évoquée, et la fin de la prise en charge des frais liés aux prescriptions de la protection maternelle et infantile (PMI) par le conseil général a déjà été entérinée.

Enfin, en interne, on assure que des mesures ont été prises pour réduire les frais de fonctionnement. 200 téléphones portables auraient été mis hors service ou retirés depuis octobre, et l'on enregistre de fortes restrictions de l'ouverture des lignes fixes. En un mois, la facture de téléphonie fixe du CG est passée de 120.000 € à 20.000 € ! Les déplacements des élus et des agents seront désormais limités, selon des modalités contenues dans le rapport définitif qui sera proposé en session, comme "l'élasticité" du parc automobile et l'accès aux tickets carburant.

 

Transport scolaire : le dossier bouillant

 

Après de nombreux reports, des mois d'indécision et autant de temps dans l'illégalité – le tribunal administratif a invalidé le sixième avenant de prolongation de la délégation de service public en juillet dernier -, les 19 élus du conseil général devraient enfin se prononcer sur la très sensible question du transport scolaire à Mayotte.

Comme pour la gestion du marché de Mamoudzou et du port de Longoni, le conseil général semble subitement pressé de traiter ce dossier, dont on sait qu'il recèle des intérêts politiques et économique importants (15 M€ en 2009). Et comme pour le marché et le port, c'est au final le même projet, un marché public en allotissement, retiré après la vive contestation des transporteurs en décembre et juillet derniers, qui sera une nouvelle fois présenté.

Soit une division en cinq lots opérationnels pour une durée de trois ans, un pour les trajets transversaux et un pour chacune des entités cardinales. La gestion du roulant serait désormais assurée par un service intégré du conseil général, qui espère économiser 4 M€ en optant pour ce mode de prestation. Cependant, il est exclu que cette décision provoque l'unanimité chez les élus, ni d'ailleurs auprès des 95 transporteurs sous-traitants de la CMTS, filiale de Veolia transport, actuelle détentrice de la DSP et gestionnaire du roulant, un double rôle qu'elle a parfaitement tenu depuis 1994.

 

La fin des années folles

 

Pour la plupart d'entre elles, ces mesures suscitent donc un élan de rejet et de contestation populaire de plus en plus exacerbé. Et à près d'un an des élections régionales (mars 2011), aucun édile ne voudrait avoir à les prendre. A tel point que l'on assiste, selon de nombreuses sources concordantes, à un délitement de la majorité UMP/MDM/PS du président Douchina, divisée sur l'opportunité de ces mesures et fragilisée par l'émancipation de quelques élus qui tablent désormais sur des stratégies – osons-le – de précampagne individuelle.

Si le président UMP ne sait se montrer suffisamment rassembleur, le statu quo induit par le rejet de ces mesures conduira de fait la Chambre territoriale des comptes à transmettre des recommandations de restrictions des lignes budgétaires 2010 contraignantes et sévères au préfet.

D'autant que la situation financière continue d'empirer. Si des sources au conseil général assurent que la trésorerie est suffisante pour "finir l'année", notamment grâce aux transferts de l'Etat (formation, marché, port), les recettes douanières ne cessent de baisser. Après un pic enregistré lors du mois d'août, une période favorable à la consommation, avec la célébration des grands mariages, la rentrée et la fête de l'Aïd, elles pourraient être, selon les dernières estimations, en recul de 23 M€ par rapport à 2008 en fin d'exercice.

Peu d'investissements, peu d'emplois crées ou maintenus, ralentissement de la consommation, des importations et chute des recettes douanières. La logique est aussi imparable qu'inquiétante, d'autant plus lorsqu'on connaît la faiblesse du montant de la section investissement de la CDM pour 2010 : 40 M€, 20 M€ si l'Agence française de développement refuse d'octroyer le prêt sollicité, contre plus de 100 M€ en 2008. La réponse de l'AFD devrait tomber le 16 décembre.

 

François Macone


 

Selon la préfecture, l'expression "sous tutelle" n'est pas appropriée

Le préfet a saisi la Chambre territoriale des comptes de Mayotte (CTCM) du budget supplémentaire de la Collectivité départementale de Mayotte (CDM). La CTCM a émis un premier avis, par lequel elle invitait la CDM à prendre certaines mesures pour permettre la réduction de moitié du déséquilibre dans un délai de 3 ans. La CDM a pris une délibération pour arrêter le budget supplémentaire 2009.

La CTCM a émis un second avis par lequel elle estime ne pas avoir obtenu les éléments suffisants pour régler elle-même ce budget et demande au préfet de régler et rendre exécutoire le budget supplémentaire 2009 de la CDM. Par arrêté du 19 novembre 2009, le préfet a réglé et rendu exécutoire ce budget, dans les conditions préconisées par la CTCM. Depuis cette date, le conseil général a pleinement retrouvé son pouvoir budgétaire.

Le budget a été arrêté au niveau du chapitre, ce qui laisse toutes les possibilités de choix et la collectivité locale peut décider de sa politique budgétaire à l’intérieur de ces grandes masses. C’est pour cela qu’il ne peut pas s’agir d’une tutelle, le préfet ne pouvant en aucun cas imposer à la Collectivité l’augmentation de telle recette ou/et la diminution de telle dépense. Toutefois, le préfet reste chargé du contrôle budgétaire et il devra solliciter l’avis de la CTCM si une décision de la collectivité locale avait pour conséquence une augmentation d’une dépense ou/et une réduction d’une recette, au niveau du chapitre, modifiant ainsi l’équilibre général du budget rendu exécutoire par ses soins.

En définitive, il appartient à la Collectivité de prendre les dispositions permettant d’obtenir le résultat proposé par la CTCM pour fin 2010, 2011 et 2012.

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