{xtypo_dropcap}N{/xtypo_dropcap}ous n’avons pas vocation à joindre notre voix à ce concert d’intelligences mobilisées pour que l’avenir soit plus rose, nous n’en avons ni les qualités ni les compétences. Non, nous ne sommes que des ouvriers de la formation professionnelle, comme se plaisait à le dire feu Gino Salimbéni qui a tant fait pour la formation des jeunes à Mayotte. Des ouvriers qui constatent sur le terrain depuis 10 ans que trop de jeunes sortent encore du système scolaire sans maîtriser ce qu’il est convenu d’appeler les compétences de base.
Des ouvrier qui constatent que les appels d’offres du conseil général en matière de formation professionnelle des demandeurs d’emploi accumulent retard sur retard, d’année en année, faute de capacité politique à mettre en oeuvre des choix stratégiques à moyen et à court termes. Des ouvriers qui constatent, à la lecture d’appels d’offres émanant d’institutions nationales établies à Mayotte, que la pédagogie est encore une discipline ignorée de certains décideurs, plus soucieux de poudre aux yeux que d’une réelle efficacité formative. Comment, par exemple, prétendre faire progresser sérieusement la capacité de lire et écrire en français pour ceux qui ne le maîtrisent que très peu, voire pas du tout, en 2 jours ?
Des ouvriers qui constatent que les organismes de formation dignes de ce nom et soucieux d’offrir des prestations de qualité, supportent patiemment les aléas de l’absence de politique volontariste en la matière, tout comme des difficultés de trésorerie liées à des modes de paiement, des retards et des irrégularités invraisemblables.
Des ouvrier qui constatent que régulièrement quelques parachutés à Mayotte s’improvisent formateurs en pensant sans doute qu’il suffit de "savoir" pour exercer ce métier et que, attirés par le brillant et les apparences policées de ce qui vient d’ailleurs, certains décideurs s’empressent de les écouter doctement.
Des ouvriers qui constatent les difficultés rencontrées par les structures en charge d’accueillir et d’orienter les jeunes et les demandeurs d’emploi par manque de moyens humains suffisants (Mission locale et Pôle emploi).
Ah, quel tableau pessimiste nous dira t on !
Que l’on se rassure, il y a des constats positifs :
– La prise de conscience progressive et collective de l’impérieuse nécessité de travailler à réduire le degré d’illettrisme, nous en voulons pour exemple et comme signe tangible les efforts et l’engagement des services de l’Etat en ce domaine, même si le chantier est immense.
– La prise en compte de plus en plus fréquente, par les chefs d’entreprises, de l’utilité et de la nécessité de la formation continue.
– La mise en ordre de marche de l’organisme collecteur des fonds de la formation professionnelle auprès des entreprises.
– L’utilité de structures oeuvrant en amont ou en aval des actes de formation (Centre de bilan de compétences, Ladom par exemple).
– La motivation des jeunes fréquentant assidument les centres de formation et leur désir d’apprendre et de progresser.
– Les efforts faits par les organismes de formation pour s’équiper, pour former leurs personnels, afin de mieux répondre aux besoins locaux ainsi qu’aux exigences de la mobilité.
– La capacité de l’appareil de formation local à s’adapter aux nouvelles réglementations et aux évolutions sociales et économiques si rapides de Mayotte.
– Les résultats positifs et dignes d’éloges obtenus par ces mêmes organismes de formation avec des moyens largement inférieurs à ceux des organismes métropolitains ou bien du GSMA.
– La multiplicité des domaines de compétences couverts par ces mêmes organismes, du bâtiment au secteur sanitaire et social, notamment les préparations aux concours de la fonction publique hospitalière, des métiers du tertiaire aux métiers de l’hôtellerie restauration, du droit du travail et droit commercial au management, des métiers de la mer aux métiers du commerce, de l'informatique et de la bureautique, etc.
Arrêtons-là une énumération qui n’a pas pour objet de faire plaisir à qui que ce soit ou de mettre au pilori tel autre. La formation professionnelle est une affaire trop sérieuse, aux enjeux trop importants pour que l’on ne tienne pas compte des avis et des compétences de ceux qui ont une culture et une pratique de la pédagogie, dont c’est le vrai métier et qui connaissent Mayotte.
Quant à ce qui se passe sur le terrain, c’est l’affaire des pédagogues, de ceux qui travaillent au quotidien avec sérieux avec les jeunes, les demandeurs d’emploi, les personnels d’entreprise.
C’est l’affaire des vrais "ouvriers de la formation professionnelle". Il est temps de les écouter davantage, il est temps de comprendre qu’ils connaissent et maîtrisent leur métier, il est temps de leur donner les moyens d’être encore plus utiles à la société mahoraise pour accompagner les évolutions socio-économiques majeures auxquelles notre île doit faire face.
Pour l’Association des organismes de formation de Mayotte
Le président, Pascal Rolland
Mayotte Hebdo vise à contribuer au développement harmonieux de Mayotte en informant la population et en créant du lien social. Mayotte Hebdo valorise les acteurs locaux et les initiatives positives dans les domaines culturel, sportif, social et économique et donne la parole à toutes les sensibilités, permettant à chacun de s'exprimer et d'enrichir la compréhension collective. Cette philosophie constitue la raison d'être de Mayotte Hebdo.