23/06/2008 – Les agents publics mobilisés pour être intégrés

Mardi matin dans l'hémicycle du conseil général, ce n'était pas les élus locaux mais les représentants syndicaux qui étaient à la tribune. Devant quelques 200 grévistes, les représentants du SE CGT Mayotte, du Sima Snudi FO, de la Cisma CFDT conseil général et de la CGTMa conseil général ont uni leurs voix pour demander aux pouvoirs publics une intégration plus rapide des agents de la fonction publique territoriale de Mayotte à la fonction publique de droit commun. Au cours de cette assemblée générale, il a également été question de la titularisation de tous les contractuels, de l'indexation des salaires à 2,15 et de la retraite des agents publics.
La loi-programme pour l'Outremer du 21 juillet 2003 a étendu à Mayotte les trois fonctions publiques de droit commun – hospitalière, territoriale et d'Etat – et précise qu'à l'horizon du 31 décembre 2010, l'ensemble des agents publics en activité seront intégrés ou titularisés dans l'une ou l'autre de ces trois fonctions publiques. Or, pour l'instant, les intégrations et les titularisations dans la fonction publique représentent moins de 10% des effectifs concernés, et l'intersyndicale estime que le 31 décembre 2010, il n'y aura pas plus de 30% des personnels qui seront intégrés ou titularisés.
"A ce jour, le conseil général ne dispose pas de plan d'intégration de ses agents, pas plus qu'il n'a engagé d'actions concrètes pour accompagner ceux-ci auprès du gouvernement", peut-on lire dans l'exposé des motifs des propositions de modification de la loi-programme signé par l'intersyndicale. "Bien que tout le monde reconnaisse la cherté de la vie à Mayotte, les conditions de travail et le pouvoir d'achat des personnels sont loin d'être les soucis premiers des pouvoirs publics, aussi bien nationaux que locaux".
 
 

4.000 agents au CG, seuls 5% sont intégrés…

Le principal problème demeure le fait que les agents recrutés après la loi Girardin du 21 juillet 2003 ne sont pas couverts par le texte. "Ces contractuels sont exclus du processus d'intégration car ils ne peuvent pas passer le concours professionnel interne, contrairement à leurs collègues d'avant 2003. Ils ne peuvent pas non plus passer le concours externe car ils doivent avoir un niveau supérieur au bac, ce qui n'est pas le cas pour la plupart d'entre eux", explique Kamiloudine Djanffar, secrétaire général adjoint de la CGTMa conseil général.
Sur les 4.000 agents qui relèvent du conseil général, 3.000 peuvent prétendre à l'intégration mais ils ne sont pour l'instant que 5% à être dans ce cas, ce qui pose un autre problème concernant les prochaines élections internes au CG. En effet, le 6 novembre 2008, toutes les collectivités territoriales élisent leurs représentants à la Commission administrative paritaire qui gère les carrières des agents, et au Comité technique paritaire qui organise le fonctionnement de l'administration.
"Il n'y aurait que 5% des agents qui pourraient voter. On refuse l'accès à la fonction publique de ces fonctionnaires", précise Issa Mohamed El Anrif, le secrétaire général de la Cisma CFDT conseil général. "Ce sont des "sous-fonctionnaires" car par rapport aux critères, leurs salaires autour de 1.000 euros les empêchent d'être intégrés".
L'intersyndicale réclame la prise en compte de la rémunération globale, et pas seulement de la rémunération brute, pour calculer l'indice qui permet d'entrer dans les cadres d'emploi et les grades. Dans l'exposé des motifs aux propositions de modification de la loi Girardin, on peut lire que "les conditions d'intégration et de titularisation (niveau minimum de rémunération, concours réservés, prise en compte partielle de l'ancienneté) imposées par les décrets d'application de la loi excluent du dispositif la grande majorité des agents de la Collectivité départementale et des communes et démotivent nombre de contractuels qui, une fois titularisés, voient leurs carrières gelées pour une moyenne de 10 ans".

 

Des retraites à 250 ou 300 euros

L'intersyndicale réclame également l'indexation des salaires à l'inflation, ce qui est le cas dans les collectivités territoriales d'Outremer… sauf Mayotte. "Les expatriés métropolitains bénéficiaient de cette indexation jusqu'en 2004 car le préfet avait le pouvoir exécutif. Elle demeure encore aujourd'hui, à hauteur de 24% de l'indice terminal du grade des administrateurs. Et les indemnités d'éloignement ou de déménagement sont aussi une indexation déguisée. Nous souhaitons que l'indexation des salaires à 2,15 soit généralisée à tous les agents publics de Mayotte", a déclaré M. El Anrif.

Enfin, les revendications de l'intersyndicale ont rejoint celles du mouvement de grève nationale concernant la retraite des fonctionnaires. Pour avoir une retraite à taux plein, il faut cotiser 40 ans et la pension versée représente 75% de la moyenne des 6 derniers mois de salaire. Mais à Mayotte, certaines personnes atteignent l'âge de la retraite avec une rémunération de 800 euros et n'ont pas forcément cotisé assez longtemps, ce qui explique qu'il y ait des retraites à 250 ou 300 euros.
"Nous souhaitons que soit fixé le même minimum garanti qu'à la Réunion, environ 700 euros, majoré de 50% sur le principe de l'indexation, ce qui fait une retraite minimum à 1.000 euros… Je pense que c'est raisonnable", estime M. El Anrif. Les différentes propositions de l'intersyndicale vont être transmises au président du CG, aux communes et au préfet dans les prochains jours.

Reste le coût d'une telle mesure, qui pour l'instant n'est pas évaluée, faute d'un véritable travail de fond sur la question. Comme le remarque M. El Anrif, "l'excellence administrative, pour reprendre le mot du président du CG, résulte de l'action concertée des agents publics. Nous devons les sensibiliser pour que notre combat soit compris et défendu. S'ils ne sont pas capables de se mobiliser pour leurs salaires, ils ne seront pas capables de se mobiliser pour l'action administrative".

Julien Perrot

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