{xtypo_dropcap}L{/xtypo_dropcap}e mois d'avril est marqué à Mayotte par la commémoration de l'abolition de l'esclavage, célébrée le 27 avril. A cette occasion, un festival montrant l'héritage et le patrimoine du peuple mahorais est organisé. Son appellation est depuis 2008 le Fatma, Festival des arts traditionnels de Mayotte.
Le Fatma rime parfaitement avec la commémoration de l'abolition de l'esclavage. Montrant les apports culturels d'avant et après la traite négrière, il apporte des éléments concrets et vivants sur ce sujet, une meilleure conception du sens de la commémoration. Le Fatma met en évidence les grandes traditions héritées des appartenances africaine, musulmane, animiste et malgache qui constituent "l’âme métisse" du peuple mahorais. Les composants de ce passé riche et pluriséculaire sont nombreux à Mayotte et méritent d'être connus. Ce sont les chants religieux, les danses traditionnelles, les cérémonies cultuelles, les objets artisanaux, les instruments musicaux, etc.
Le Fatma ce sont dix jours de fête et de réflexion autour du patrimoine historique de l'île et de sa région. Les manifestations se déroulent dans plusieurs communes de l'île. Elles ont commencé le week-end dernier et continuent jusqu'au 30 avril. (Programme ci-contre)
Pour cette année, la direction de l'ingénierie culturelle (ex-service culturel) a souhaité une ère nouvelle à la dimension de la commémoration de l'abolition de l'esclavage. Elle a voulu inscrire le Fatma dans la problématique de la mémoire d'un peuple à travers son patrimoine culturel.
Soutenance de thèse, conférence et film
Outre les démonstrations des richesses culturelles, un devoir de mémoire s'impose. Se mettant dans le ton d'Elie Wiesel (Prix Nobel de la Paix) : "Le bourreau tue toujours deux fois. La première, par l’épée, la deuxième fois par l’oubli.", le Fatma est aussi "un moment de rappel de l’histoire pour faire reculer l’oubli collectif".
Des éléments et faits concrets viennent enrichir la commémoration 2009 de l'abolition de l'esclavage à Mayotte.
Ce samedi 25 avril, Hamada Insa, originaire de M'tsamboro et étudiant en master 2 à l'Université de la Réunion, soutiendra son mémoire en Histoire, dans l'hémicycle Bamana au conseil général, à 14 heures. Cette soutenance sera dirigée par le directeur de recherches Sudel Fuma. Il s'agit d'un mémoire d’histoire sur l’esclavage dans l’océan indien et à Mayotte. Cette soutenance sera suivie d'une projection de film documentaire à 18 heures.
Journée mémorable de notre festival dédié aux arts traditionnels, le lundi 27 avril sera fortement animé. Au-delà des diverses manifestations prévues un peu partout, une conférence sur "La mémoire de l’esclavage dans les contes, les langues et la littérature de Mayotte" aura lieu à la place du Comité du Tourisme, à 16 heures. Elle sera animée par un Hidaya Chakrina, docteur ès Lettres et spécialiste des mémoires orales de l’Océan indien, par M’laïli Condro, docteur ès linguistique et maître conférencier et par Alain-Kamal Martial, doctorant en lettres, littératures francophones d’Afrique et de l’Océan indien. "Nous allons travailler sur les supports de transmission, d'une manière scientifique et non passionnelle", précise Alain-Kamal Martial. Ce sera un grand moment d'interrogation sur la recherche des traces évoquant l'esclavage.
Un jardin de la mémoire à Mamoudzou
Un fait à la fois historique et commémoratif, la "Route de l'esclave" passe par Mayotte. Pensé en 1993 et lancé officiellement en 1994 par La Chaire de l’Unesco en relation avec l’association Historun, la "Route des esclaves" a permis le lancement de réseaux scientifiques relatifs à la traite négrière et à l’esclavage dans notre région.
Après la conférence du 27 avril, viendra ensuite l'inauguration du "Jardin de la mémoire", à 18 heures, sur la place du Marché de Mamoudzou.
Des jardins, de grandeurs commensurables, sont instaurés dans les île de la région océan Indien, à Madgascar depuis 2004, à la Réunion (2005), au Mozambique (2007) et Maurice (2009).
Le projet Jardin de la mémoire s'articule autour de trois objectifs. Il vient "briser le silence sur la tragédie de la Traite négrière et de l’esclavage en contribuant à meilleure compréhension des causes profondes, de ses enjeux et de ses modalités d’opération par des travaux scientifiques pluridisciplinaires. Ensuite "mettre en lumière de manière objective ses conséquences sur les sociétés modernes notamment les transformations globales et les interactions culturelles entre les peuples que cette tragédie a pu générer". Et enfin "contribuer à la culture de la paix et à la coexistence pacifique entre les peuples en favorisant notamment la réflexion sur le pluralisme culturel, la construction de nouvelles identités et citoyennetés et sur le dialogue interculturel."
Le Jardin de la mémoire de Mayotte est réalisé par quatre sculpteurs : Daolaine Courtis de la Réunion, le Mozambicain Pekiwa, Rabemanenjara de Madagascar et le Mahorais Conflit. Les artistes travaillent depuis lundi dans la cours de la salle de cinéma de Mamoudzou. Il s'agit de quatre monuments commémoratifs, deux en pierre et deux en bois. Ce projet amitieux est dirigé par Fudel Fuma, directeur de la Chaire Unesco de l'Université de la Réunion et président de Historun. Arrivé ce mardi 21 avril, il suit le Fatma jusqu'au 28 avril.
Et comme dirait l'autre, la place du Marché sera vue d’une manière différente. Le passant se donnera le temps de la réflexion sur un pan de l’histoire mahoraise et de voir comment se l’approprier pour aller de l’avant.
Rafik
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