{xtypo_dropcap}L{/xtypo_dropcap}es finances des collectivités locales de Mayotte ne sont pas au mieux. Ce n’est pas une nouveauté, mais avec la décentralisation et la départementalisation à venir, mais aussi la crise financière qui frappe l’Etat, tout le monde doit se serrer la ceinture. Pourtant à Mayotte, les besoins des communes, des syndicats intercommunaux et de la CDM sont énormes.
Ils doivent investir lourdement dans des équipements structurants, quitte à présenter un budget en déséquilibre (1,8 million d’euros selon l’opposition UMP, voir MH n°434 du 27 juin 2009). C’est ce qui s’est passé cette année à Tsingoni et la préfecture a donc saisi la CTC pour que cette anomalie soit rectifiée. Finalement, la commune s’est accordée avec la CTC pour revenir progressivement à l’équilibre en 2012 avec un déficit en investissement d’1,2 million d’euros en 2009.
“Jusqu’à présent à Mayotte, on inscrivait les dépenses d’investissement dans le budget, même si les communes n’étaient pas certaines de recevoir l’argent pour les projets. Il y avait des documents de comptabilité qui faisaient que le budget était en équilibre comptablement, mais pas forcément dans la réalité”, explique Ibrahim Boinahery, maire de Tsingoni et président de l’Association des maires de Mayotte. Pour lui, les raisons du déséquilibre viennent surtout du fait que certaines opérations sont terminées alors que l’argent nécessaire n’est toujours pas arrivé sur le compte de la commune.
Des services pas encore parfaitement rodés pour obtenir les aides financières
“On nous doit 150.000 € pour la RHI Mifilaouni de Combani, alors que les travaux sont terminés depuis longtemps. Pour celle de Zidakani à Tsingoni, on a payé la dernière facture en 2008, alors que les travaux ont débuté en 2002. Enfin, il manque 186.000 € pour le lotissement Dispensaire de Combani et 84.000 € pour celui de M’roalé, alors qu’ils ont été finis avant notre arrivée”, dévoile Ibrahim Boinahery.
Ce cas de figure se répète dans de nombreuses communes. Pour le président de l’AMM, la raison est simple. “Avant la décentralisation, la préfecture épaulait les services des mairies dans les démarches. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas. Avant l’argent tombait automatiquement, depuis 2004 c’est au bon vouloir de la préfecture et selon l’argent dont elle dispose. Or, décrocher l’argent qui doit nous revenir ne se fait pas tout seul. Cela demande des tas de papiers à remplir, un suivi permanent que nos services n’assurent pas forcément correctement. En cherchant bien, on découvre que si l’argent n’a pas été versé, c’est parce que les factures ont été perdues ou il manquait telle ou telle pièce.” Ainsi, les maires doivent donc utiliser des crédits prévus pour un projet et les verser à des entrepreneurs ayant travaillé sur un autre projet.
Des entreprises payées en 60 jours ?
En clair, c’était à celui qui criait le plus fort qui obtenait son argent, et ce sans garantie que la trésorerie municipale ait les fonds suffisants pour payer les mandatements. Mais, après 2010, cela ne sera plus possible. L’informatisation des mandatements est en cours. “Une fois qu’une facture sera fournie, la collectivité aura 45 jours pour la transmettre à la trésorerie municipale. Si ce n’est pas le cas, une majoration automatique sera appliquée. En revanche, si le mandatement est transmis à la trésorerie municipale est que celle-ci ne paie pas dans les 15 jours, c’est elle qui supportera la majoration. En gros, les entrepreneurs seront payés au maximum dans les 60 jours”, avance le maire de Tsingoni.
Celui-ci précise qu’aujourd’hui, les communes de Dembéni et de Bandraboua sont les seules à réaliser des investissements que quand elles ont l’argent sur leur compte. “Cela demande des changements profonds de comportement et comme vous le savez, le changement tout le monde n’aime pas ça. Ces communes n’y sont pas arrivées du jour au lendemain”, fait-il remarquer. D’ici 2012, quel que soit le maire qui sera élu, il faudra donc se résoudre à certains sacrifices à Tsingoni.
Faïd Souhaïli
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