{xtypo_dropcap}P{/xtypo_dropcap}ermettez par la présente que je vous fasse part de la situation particulièrement alarmante de ma fille, dont vous avez déterminé le sort, il y a bientôt 2 ans, à l’issue de votre arbitrage de l’affaire n°184/RGAF/06.
En guise de rappel, il y a trois ans, je vous ai déjà interpellé sur l’avenir manifestement incertain qu’encourait ma fille dans l’environnement d’insécurité matérielle dans lequel elle était appelée à vivre. J’avais également attiré votre attention sur la médiocrité du rapport d’enquête sociale dénué de toute rigueur et de toute objectivité, qui a été monté en toute pièce du côté du lieu de résidence de ma fille (d’autres professionnels l’attestent). Sans parler de l’inégalité de traitement des deux parties, puisque vous avez dû courir après l’enquêteur social, qui est venu m’entendre un an après notre rencontre, pour qu’il livre son rapport. Vos conclusions témoignent de cette inégalité de données fournies et de leur considération. N’empêche que vous vous êtes alimenté des données produites et avez prononcé un jugement arrêtant la résidence de ma fille chez sa mère, en Métropole, malgré les éléments tangibles que j’ai apportés à votre connaissance.
Un peu plus d’un an seulement après votre décision de justice, la réalité a pris le dessus sur l’artifice : la maman de ma fille, qui a fait le choix d’immigrer en Métropole pour des motivations partagées par une masse importante de Mahorais et Mahoraises qui ne sont pas méconnues des acteurs du développement de cette île, a vite réalisé les limites qui sont les siennes dans l’éducation de notre fille. Elle a alors décidé de ramener ses deux enfants à Mayotte pour les confier à sa mère. Elle m’a aussi envoyé le dossier scolaire de ma fille pour que je l’inscrive, sur sa propre demande, à l’école élémentaire de Choungui. Ma fille y est arrivée 2 semaines après la rentrée 2009, fut scolarisée un mois seulement. Mon refus de voir confier ma fille à sa grand-mère, a conduit la maman de ma fille à arracher l’enfant de son école et décider en catimini de rentrer avec ses enfants en Métropole.
Je vous ai alerté (06/10/09), j’ai alerté le parquet (09/10/09), le juge des enfants (06/10/09), Air Austral, la Paf sur cette situation et signifié mon refus de voir ma fille quitter le territoire. J’ai cherché du soutien du côté des professionnels. Personne n’a entendu mes cris. Mon avocat qui devait vous saisir dans l’urgence pour empêcher la sortie du territoire de ma fille, ne l’a pas fait.
Aidée par la gendarmerie de Mzouazia, qui s’était invitée à mon domicile pour m’obliger à rendre le passeport de la petite que j’ai confisqué, ma fille a quitté Mayotte avec sa mère à mon insu, à destination de la Métropole, pour une nouvelle aventure.
Ma fille est en CM2, Monsieur Moaty, et elle ne sait pas écrire son prénom. Alors qu’elle était extraordinairement brillante en maternelle au point qu’elle avait sauté de classe, la grande section maternelle, pour passer directement en CP. L’observation de sa production scolaire montre sans ambigüité que ses difficultés s’expliquent par un défaut d’encadrement et de suivi.
Vous disposez, Monsieur le JAF (juge des affaires familiales, ndlr) de toutes ces données. Mais manifestement, pour vous, c’est un dossier comme tout autre parmi les centaines que vous avez à traiter quotidiennement. Cela légitime peut-être le peu d’attention que vous accordez à ces multiples cas, somme toute semblable, n’est-ce pas ?
Cette légitimité là, Monsieur le JAF, je ne peux la partager. Si la juridiction des affaires familiales est instituée, ce n’est pas pour pénaliser ceux qu’elle est censée défendre et protéger. J’ai certes engagé un avocat dans cette affaire comme l’exigerait le bon sens – m’a-t-on dit, au risque de ne pas être pris au sérieux – mais pendant ce temps, les avocats sont aussi animés par des dossiers qui leur sont prioritaires. En attendant, ma fille meurt à petit feu de sa réussite scolaire.
Pour une nouvelle fois, Monsieur le juge, je vous prie d’épargner ma fille des conditions de vie et de chances incertaines que vous n’aimerez guère faire expérimenter à vos propres enfants.
A. Allaoui,
un père qui dispose de tout ce qui fait défaut à sa fille
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