{xtypo_dropcap}D{xtypo_dropcap}éterminer comment faire pour que le plurilinguisme soit un atout pour l’île plutôt qu’un problème. C’est l’objectif affiché par le professeur Foued Laroussi, directeur du laboratoire linguistique, didactique et francophonie de l’Université de Rouen, responsable du Groupe de recherches sur le plurilinguisme à Mayotte créé en 2003 et grand ordonnateur de ce colloque inédit, qui se tient dans l’île du 17 au 20 mai.

Financé par l’Université de Rouen, la région Haute-Normandie, le conseil général via le Cefsm et le vice-rectorat, cet évènement de grande ampleur, préparé depuis plus d’un an, va réunir durant 3 jours une cinquantaine de conférenciers venus du monde entier, pour aborder les problématiques linguistiques de leurs régions d’études.

De lundi à mercredi, en plus des grandes conférences plénières qui auront lieu au cinéma (voir encadré), 45 conférences seront données, dans trois lieux différents selon la thématique qu’elles concernent. Regroupées dans la salle de cinéma, les conférences sur la thématique de l’éducation aborderont la question des retombées des politiques linguistiques sur le système éducatif dans des territoires plurilingues. Les programmes bilingues en Polynésie et en Guyane, les langues locales dans le système scolaire malien et congolais, seront présentés par les chercheurs, de même que des éclairages sur la problématique mahoraise.

Deuxième thématique, abordée dans l’hémicycle du conseil général, le plurilinguisme regroupera des présentations d’études de terrain qui cherchent à cerner les vrais enjeux des situations plurilingues, à dégager les consensus ou les dissensions qui s’y manifestent et à mesurer les écarts, les contradictions, voire les conflits d’opinion entre les divers groupes linguistiques. Avec comme interrogation : comment faire pour que les Mahorais maîtrisent davantage le français et comment valoriser les langues maternelles ? La situation malgache, tunisienne, sud-africaine seront abordées aux côtés de celle de Mayotte.

Mettre en place une politique linguistique équitable

Enfin, à la mairie de Mamoudzou, seront données les conférences sur les politiques linguistiques. Reposent-elles toujours sur une description objective de la situation concernée ou sont-elles fondées sur des facteurs extralinguistiques ? Une politique linguistique rationnelle doit-elle se doter de moyens d’action sur les langues en présence en vue de concrétiser ses choix ? Doit-elle créer les organismes chargés de son application ? Autant de questions que poseront les conférenciers venus d’Ethiopie, d’Arabie Saoudite de la Réunion, et bien sûr de l’île de Mayotte, pour laquelle l’enjeu sera de mettre à la disposition des décideurs des éléments de réflexion susceptibles de les aider à envisager une politique linguistique équitable et profitable à l’île.

A la fin de chaque demi-journée, une synthèse des ateliers sera faite par les modérateurs de chaque salle. Mardi 18, en conclusion de la journée à partir de 17 heures, une table ronde réunira le préfet, le président du conseil général, les deux sénateurs, le député, le maire de Mamoudzou et le vice-recteur sur le thème « Langues et départementalisation : comment penser l’avenir de Mayotte ? ».

« Le but est de ne pas faire ici les mêmes erreurs qui ont été faites ailleurs dans le domaine de la langue et de l’enseignement du français », nous explique le professeur Laroussi, « d’où l’intérêt de donner des exemples de ce qui s’est fait ailleurs ». Le professeur et son équipe, le Groupe de recherches sur le plurilinguisme à Mayotte, estiment que leur travail s’inscrit dans le contexte de la départementalisation et du développement de Mayotte.

Retransmission sur RFO

« Je ne suis pas un fervent militant du tout shimaore, mon travail vise à faire perdurer les langues locales, mais également à améliorer l’apprentissage du français. Travailler sur la maitrise du français par les jeunes ne veut pas obligatoirement dire mettre fin aux langues locales, et de même faire valoir les langues locales ne signifie pas combattre la pratique du français. »

La journée du jeudi consistera en une découverte de l’île pour tous les conférenciers, avec un départ de Trévani, un passage par la plage du préfet, la cascade de Soulou, Tsingoni, le Mont Combani, Sada, Sazilé, et N’gouja. Après un déjeuner sur la plage des trois baobabs et une après-midi détente, les conférenciers assisteront à une représentation de la pièce de Nassur Attoumani : « Le turban et la capote ».

Retransmis sur RFO et, le professeur Laroussi l’espère, sur la Chaîne Parlementaire, ce colloque sera le point culminant des travaux menés ici depuis plusieurs années, qui ont abouti entre autres à la soutenance de 14 mémoires de Master et d’une thèse « Sciences du langage », l’organisation de deux colloques en 2006 y présentant des communications et la publication de deux ouvrages. M. Laroussi espère voir aux différentes conférences les responsables politiques et également les enseignants de l’île.

Hélène Ferkatadji


Les conférences plénières

Dans la salle du cinéma

Lundi 17 mai à 9h30 : « La langue comorienne : unité et diversité » Mohamed Ahmed Chamanga (Inalco).

Mardi 18 mai à 8h15 : « Multicompetence, creativity and criticality of multilingual children : insights from complementary schools in Britain » Li Wei (High School of London).

Mardi 18 mai à 14h : « Plurilinguisme, post-nationalisme et nouvelle économie » Monica Heller (University of Toronto).

Mercredi 19 mai à 8h15 : « Outremer, diversité culturelle et mondialisation » Dominique Wolton (ISCC, Paris), Directeur de recherche au CNRS.

Mercredi 19 mai à 16h30, conférence de clôture « Langues et développement : perspectives pour Mayotte » Foued Laroussi (Université de Rouen)