10/07/2009 – Visite ministérielle

 

{xtypo_dropcap}R{/xtypo_dropcap}etard de paiement des collectivités

Beaucoup d'entreprises accusent de sérieuses difficultés de trésorerie, notamment celles du secteur du BTP et des services, qui travaillent avec les administrations et collectivités locales, dépendant en partie de la commande publique. En cause, les collectivités locales (communes, syndicats intercommunaux et conseil général), qui affichent des retard de paiement de plusieurs années pour certaines.

L'Iedom, dans son rapport annuel, décrit ce phénomène sobrement comme "récurent et préoccupant", mais pointe un essoufflement de l'activité et une réduction inquiétante des effectifs employés depuis les deux derniers trimestres de l'année 2008, imputables à ce phénomène.

Les organisations patronales (Medef, CGPME) et les syndicats d'artisans et entrepreneurs du bâtiment (Capeb, FMBTP) espèrent des prises de position engagées sur ce point de la part du gouvernement, eux qui dénoncent vainement cette situation depuis déjà trop longtemps.

En 2008, 242 entreprises de construction immatriculées à la Chambre de commerce et d'industrie de Mayotte employaient 2.200 personnes, soit 22% des effectifs de l'ensemble des entreprises inscrites à la CCI; et sur les 2.500 entreprises enregistrées à la Chambre des métiers et de l'artisanat (CMA), 50% le sont dans le registre du bâtiment.

 

Lisibilité de la commande publique

Les grands chantiers inscrits au 13ème Contrat de projet 2008/2014 traînent à voir le jour. Depuis 2008, trop peu d'opérations ont basculé dans leurs phases opérationnelles, et les carnets de commandes se désemplissent dramatiquement, tardent à se renouveler, alors que les besoins de Mayotte en terme d'infrastructures sont encore nombreux.

En dépit des 15 M€ alloués pour des chantiers désignés par le plan de relance, la gronde des acteurs du BTP, artisans et "gros" confondus, se fait entendre. Au conseil général, on avance des raisons de réorganisation interne et des cofinancements étatiques qui n'arrivent pas.

Lors d'un colloque organisé le week-end dernier par la CMA sur deux jours à l'intention des artisans du bâtiment, Mohamed Boina, président de la FMBTP, a qualifié cette situation d'insoutenable : "Personnellement, cela fait plus de 17 ans que je travaille dans le BTP et nous n'avons jamais eu de visibilité. On ne connaît pas les orientations politiques d'une année sur l'autre, alors que d'un autre côté nous sommes obligés de former les salariés. Nous les envoyons en stage, dans des écoles ou en formation et lorsqu'ils reviennent il n'y a plus de travail".

 

Crise : Les banques locales jouent-elles le jeu ?

Malgré les recommandations du gouvernement aux banques, beaucoup d'entreprises constatent un resserrement des conditions d'octroi de crédits opéré par les établissements bancaires de la place. Si la conjoncture internationale justifie plus d'attentisme et de prudence de la part des banques, la bonne tenue de la croissance mahoraise (10% en 2008), construite autour de facteurs endogènes solides (consommation des ménages en hausse de 20%, besoin d'infrastructures, taux d'équipement en hausse de 12% par rapport à 2007), pourrait inciter à plus d'optimisme.

Selon Hariti Abdullah, vice-président de la CGPME, le soutien des banques est d'autant plus indispensable que les difficultés de trésorerie sont énormes : "On entend le gouvernement apporter des mesures de soutien aux banques afin qu'elles puissent soutenir l'activité des PME. Moi, en tant que chef d'entreprise, je me pose la question de savoir si ces mesures sont applicables aujourd'hui à Mayotte."

Des constations pourtant contraires aux observations de l'Iedom, retranscrites da sa lettre d'information de juillet 2009 : "En matière d'octroi de crédits, il y a rupture entre les perspectives entrevues par les dirigeants sur le crédit à court terme et sur le crédit à long terme. Contrairement aux constats établis ce trimestre en la matière, les dirigeants estiment désormais majoritairement que l'on pourrait voir les concours à court terme, en particulier auprès des entreprises (destinés à financer l'exploitation) et dans une moindre mesure auprès des ménages, croître ou pour le moins se maintenir, mais craignent que les engagements à plus long terme destinés à financer l'investissement des entreprises (crédit d'équipement en particulier) et l'habitat des ménages soient rendus difficiles par le manque de visibilité sur la conjoncture à venir (…)".

 

Formation des prix et pouvoir d'achat : le vrai leitmotiv des Egom ?

Le bilan des Etats généraux de l'Outremer est au programme de la courte visite du Premier ministre, ce samedi 11 juillet. Et nul doute que les conclusions du groupe de réflexion sur la formation des prix seront attentivement disséquées.

Le pouvoir d'achat est une préoccupation de plus en plus présente à Mayotte. En 2008, La consommation des ménages s'est, une fois de plus, révélée dynamique, portée par une hausse du Smig, fixé depuis le 1er juillet 2009 à 1002,44€, en hausse de 8,04% , après+12,3% en juillet dernier.

Pourtant beaucoup ont dénoncé, lors de ces états généraux, "l'annulation des effets bénéfiques de la politique de rattrapage des minima sociaux par une attitude scandaleuse des importateurs, distributeurs et commerçants, qui consiste à augmenter les prix à chaque revalorisation du Smig", qui alourdit le coût du travail et se répercute pourtant logiquement dans la formation des prix.

Le préfet Denis Robin, qui a pris très à cœur ces Egom, a mis en garde les entrepreneurs qui pourraient se livrer à de telles pratiques, avant d'annoncer que le groupe de travail avait obtenu un consensus autour d'un abaissement des taxes et droit de douanes sur les produits de première nécessité (riz, pâtes, couches…), ainsi qu'un effort significatif de la grande distribution sur la baisse des prix en rayon.

Toutefois, nombre d'observateurs regrettent que peu de choses aient été dites sur la production locale et les moyens à mettre en oeuvre pour la dynamiser, elle qui est créatrice de richesse et d'emplois. Un participant avisé avait même souligné que "le rejet du statut de consommateur uniquement dépendant des importations (peut) expliquer en partie la crise antillaise".

 

L'intégration des agents locaux dans les fonctions publiques de droit commun

Alors que le processus a été enclenché il y a 6 ans, seuls 24% des 7.500 agents de la fonction publique locale ont été aujourd'hui effectivement intégrés dans les trois fonctions publiques de droit commun.

C'est la fonction publique territoriale qui est la plus en retard, avec seulement 5% d'agents intégrés, contre 15% pour la fonction publique d'Etat et 80% pour la fonction publique hospitalière. Les décrets du protocole d'accord du 8 avril 2009 devraient être publiés en septembre au Journal officiel, ce qui permettra d'accélérer le processus pour que l'ensemble des agents soient intégrés au plus tard le 31 décembre 2010, comme le stipule la loi de 2003.

L'intégration devrait coûter très cher à l'Etat, au conseil général et aux communes, un coût d'autant plus élevé que l'accord du 8 avril prévoit de réduire la durée des corps transitoires de 11 à 6 ans, d'étendre le dispositif aux agents recrutés entre le 24 juillet 2003 et le 31 décembre 2008, d'améliorer le niveau indiciaire d'intégration et d'aligner immédiatement le régime indemnitaire et les compléments de rémunération sur celui de la catégorie C.

Saïd Omar Oili, désigné par l'Assemblée des départements de France et par arrêté ministériel pour siéger au Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, vient d'envoyer un courrier au Premier ministre où il lui fait part de son inquiétude. "Nous sentons monter sur notre territoire un malaise qui peut très rapidement se transformer en révolte", prévient l'ancien président du conseil général.

Il préconise que de nouvelles négociations soient engagées en septembre avec les syndicats pour que la totalité de l'ancienneté des agents, qui étaient au service de l'Etat à Mayotte jusqu'à la décentralisation du 1er avril 2004, soit prise en compte, et pour que les retraites des agents de la fonction publique locale, qui avoisinent aujourd'hui les 400 € par mois, soient revalorisées.

 

F.M et J.P

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