Tout a commencé le 9 octobre 2007, avec la saisie par les douanes de 7,5 t de tabac dans un container contenant officiellement des matelas. Dans les jours qui ont suivi, le transitaire ayant procédé aux formalités d'importation du container incriminé a porté plainte, dénonçant un pacte de corruption au sein même des douanes de Mayotte. Le parquet a alors décidé d'ouvrir une enquête confiée à la Paf et au SNDJ qui a abouti à l'ouverture d'une information judiciaire devant le juge d'instruction en juin 2008 et à la mise en examen d'un transitaire et d'un douanier placés sous mandat de dépôt. Soupçonnant un système de fraude généralisée, au-delà de cette affaire de tabac, le juge d'instruction a demandé aux policiers et au SNDJ de continuer leurs investigations, décidant d'y adjoindre les moyens du Gir à partir du mois de février. L'analyse de dizaines de déclarations douanières, l'audition de dizaines de personnes, à Mayotte comme en Métropole, et l'étude des patrimoines des différents suspects a permis "d'apporter des indices graves et concordants de l'existence d'un système de fraude assez généralisé, mais pas systématique", a tenu à souligner le vice-procureur Thomas Michaud.
Les importateurs transmettaient aux transitaires des fausses déclarations douanières qui minoraient la valeur des marchandises importées qui étaient ensuite validées par les douaniers corrompus. Le prix d'un container, quelle que soit la marchandise qu'il contenait, était devenu "forfaitisé" à une taxation de 3.000-3.500 €. Les commerçants ont ainsi pu faire de gigantesques économies et les douaniers pouvaient arrondir leurs fins de mois. Les enveloppes en liquide qui leur étaient remises en échange de leur passivité pouvaient totaliser plus de 2.000 euros par mois, que certains n'ont pas hésité à investir dans l'immobilier… Du côté des importateurs, certains ont avoué avoir minoré de plus de 70 % la valeur de leurs marchandises et ainsi économisé plus de 80.000 euros en deux ans. Thomas Michaud estime que le préjudice pour la Collectivité n'est pas évaluable "car on ne sait pas vraiment ce qu'il y avait dans ces containers…. Sûrement des centaines de milliers d'euros qui auraient pu servir à refaire les routes ou construire des écoles". Cette pratique existe "depuis toujours" et fait même référence à l'entraide mahoraise… Le transit au port est fortement perturbé depuis deux semaines, quand on sait que près d'un tiers des effectifs ont été arrêtés. Les douaniers corrompus risquent jusqu'à 10 ans de prison ferme et 150.000 euros d'amende.
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