"Pour gagner des points, il faut disputer un maximum de tournois. Il arrive que cela se fasse en Italie, au Portugal et le faire depuis Mayotte est impossible, ça coûterait trop cher", explique Texxy Guengard. Celui-ci entraîne Abdoulkarim depuis ses débuts et entrevoit un gros potentiel pour son protégé. Pendant longtemps, le Tennis club de Doujani Mayotte (TCDM) a pu réunir les fonds pour lui faire disputer des compétitions dans la région et en France. Mais aujourd'hui de nombreux adhérents du TCDM sont partis, fatigués de voir que les infrastructures sur lesquelles ils évoluent ne s'améliorent pas.
"Pendant quelques années, nous avons eu 200 licenciés dans ce club. Le taux de délinquance juvénile a baissé quand le tennis s'est installé à Doujani, mais on attend depuis des années que le plateau soit refait. Ici les jeunes n'ont pas de foyer, ni de MJC, il n'y a rien à part ce plateau", se désole l'entraîneur d'Abdoulkarim Vélou.
La Fédération française de tennis impressionnée
Par ses propres moyens et quelques aides, il a bricolé pour redonner un aspect plus reluisant au court de tennis. Mais la tempête Fame a tout balayé. Malgré des conditions difficiles, Abdoulkarim obtient des résultats très probants. Son classement aurait pu lui permettre de disputer le tournoi des Petits As à Tarbes, réservé aux 12-14 ans, et qu'ont remporté en leur temps Richard Gasquet, Rafael Nadal et Martina Hingis. Alain Solvès de la direction technique nationale de la Fédération française de tennis est venu voir le garçon et a été impressionné. "Il m'a dit que si j'allais à Paris, je ne manquerai de rien", concède le garçon peu bavard.
Cette rencontre l'a renforcé dans sa volonté de devenir professionnel et Abdoulkarim est tellement motivé qu'il n'envisage pas une seule seconde l'échec. "Il est arrivé là par son sérieux et son travail, mais aussi grâce aux entreprises et aux époux Gherbi qui ont énormément apporté au club et aux jeunes de Doujani", affirme Texxy Guengard.
L'an dernier, Abdoulkarim Vélou a effectué trois tournées en métropole et cela a coûté au club 20.000 €. Mais aujourd'hui, celui-ci n'a pas les moyens d'appuyer le jeune tennisman, sa mère encore moins puisqu'elle est simple commerçante au marché de Mamoudzou. Il faudrait 11.000 euros pour qu'Abdoulkarim puisse partir à Pau, intégrer le collège privé Saint-Dominique et un centre d'entraînement privé d'où est sorti Nicolas Escudé afin de disputer de nombreux tournois pendant un an, nécessaires à sa progression.
Des qualités sportives incroyables et un mental de fer
"Il a les qualités athlétiques incroyables, mais ce qui manque c'est l'argent", résume le mentor. Son souhait serait de réunir les fonds avant la fin du mois pour qu'Abdoulkarim puisse disputer les tournois du printemps et commence à engranger des points le plus rapidement possible. Si Abdoulkarim réussit, il compte aider les jeunes de Doujani. Selon lui, beaucoup de ses amis pourraient faire de même si les conditions d'entraînement et d'encadrement étaient meilleures.
Abdoulkarim souhaite aussi donner une image positive de Doujani, un quartier mal réputé et dont les habitants ont le sentiment d'être délaissés par la mairie de Mamoudzou. "Souvent les enseignants disent aux jeunes qui rêvent de devenir sportifs professionnels qu'ils n'ont qu'une chance sur un million d'y arriver. On devrait les faire taire. Un million en rêvent, mais 100.000 transforment ce rêve en projet et une dizaine le concrétisent. Si cette dizaine n'y arrive pas, c'est qu'ils se sont égarés, blessés ou ont été mal orientés. On sait qu'il va réussir, mais il faut qu'il parte tout de suite", insiste Texxy Guengard. Pour qu'Abdoulkarim puisse avoir une chance de réaliser son rêve et devenir le nouveau Tsonga, vous savez ce qu'il vous reste à faire.
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