07/05/2009 – Tribune libre

 

{xtypo_dropcap}U{/xtypo_dropcap}ne fois de plus, nous venons d’assister à ce terrible constat. Le jeudi 30 avril 2009, les élus mahorais (les parlementaires, les anciens parlementaires et des conseillers généraux) ont été reçus au ministère de l’Intérieur et de l’Outremer par la ministre Michèle Alliot-Marie et son secrétaire d’Etat Yves Jego. Cette réunion a porté sur la communication du calendrier gouvernemental à venir pour tirer toutes les conséquences du scrutin du 29 mars 2009. Aussi, les deux membres du gouvernement ont souhaité entendre les propositions des représentants de la population mahoraise quant au modèle de développement qu’ils ont l’intention d’engager pour Mayotte, dans le cadre du futur statut de département et région d’Outremer.

A un moment historique, comme cela s’est déjà déroulé le 18 décembre 2008 lorsque ce même groupe d’élus a été reçu à l’Elysée par le Président Nicolas Sarkozy pour leur communiquer la feuille de route présidentielle relative à la départementalisation de Mayotte, on peut constater que les dirigeants politiques mahorais ont raté une fois de plus le coche. Leur entêtement revendicatif dans la transformation de l’île en département et région d’Outremer leur a joué (en réalité) un mauvais tour.

Deux lectures sont au moins possibles pour expliquer pourquoi les élus de Mayotte sont revenus "bredouilles" après cette rencontre (terme employé par Saïd Omar Oili, président de Nema). Premièrement, il faut dire que cette revendication politique nourrie et incessante, par sa prégnance socio-politique et par sa permanence historique, exige maintenant d’être prise au sérieux, d’être interrogée dans ce qui a pu favoriser son émergence et garantir son aspect sempiternel.

Cet espoir partagé a été légitimé au soir du scrutin du 29 mars 2009 ayant donné lieu mezzo vocce à la victoire du "Oui" à 95,2% pour la départementalisation du territoire en 2011. Force est de constater que cette légitimité du combat départementaliste quinquagénaire n’a pas été perçue par la classe dirigeante comme une occasion où il fallait concrétiser par "des idées et des projets" la victoire du "oui" massif du 29 mars dernier.

La deuxième lecture possible réside dans le fait que cette revendication départementaliste a été résolue dans le seul mode de l’aporie, c'est-à-dire en n’acceptant pas la contradiction d’une autre voie institutionnelle possible que dans le seul statut de département. A ce propos, on constatait il y a peu que celle-ci avait créé un certain malaise dans les rangs de certains élus de gauche.

Et bien ce moment antagonique a plutôt créé la division au sein des partis politiques locaux que favorisé la participation électorale et à un débat démocratique sain. De ce point de vue, et paradoxalement, la revendication départementaliste, au lieu de traduire l’espoir, est en train d’accoucher d'une forme d’incapacité intellectuelle et psychologisante des dirigeants politiques mahorais à proposer de véritables projets de société.

Rêve de rassembler, tel a été durant près d’une génération la conduite préconisée jadis par le sénateur Marcel Henry. Mais ce rêve a pris fin en 2000 avec la signature du Katiba (les Accords de Paris) sur l’avenir de Mayotte, ce qui avait provoqué l’éclatement des partis, la dispersion de l’électorat de base – en tout cas, la signature de ce Katiba avait fortement favorisé l’apparition de nouveaux idéaux démocratiques pouvant probablement expliquer l’apparition de nouveaux partis politiques locaux.

En effet, ainsi a pu apparaître l’effacement du véritable programme politique pour Mayotte au profit d’une revendication départementaliste qui n’est jusqu’alors que particules de projets. En tout état de cause et dans ces conditions, le gouvernement français promet, après moult et frasques tergiversations, de faire respecter son engagement sur la transformation de Mayotte en département et région d’Outremer, mais lui ne saurait accepter que les élus mahorais arrivent à Paris en ordre dispersé.

Pendant ce temps, la population mahoraise dénonce innocemment les compromissions politiques et le manque de volonté, d’agilité de leurs dirigeants politiques. Mais que peut-elle vraiment faire ? Rien !

 

Madi Abdou N'tro,

essayiste

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