{xtypo_dropcap}L{/xtypo_dropcap}e 25 mars 2008, le gouvernement de l'Union des Comores, aidé par les forces de l'Union Africaine, organise un débarquement militaire pour déloger le gouvernement du colonel Bacar. Lors de cette brève opération, 1.100 personnes – militaires, personnalités politiques, civils anjouanais – sont envoyées à la prison de Koki (Anjouan) sans qu'aucune procédure judiciaire ne soit ouverte. La majorité d'entre eux sortira au bout d'un ou deux mois, sans qu'aucun procès n'ait eu lieu. Toutefois, 57 militaires, officiers, sous-officiers et soldats sont toujours enfermés à la prison de Kandani sur Grande Comore, dans le silence le plus total.
Soldats de l'armée d'Anjouan, ces hommes, détenus depuis près d'un an, n'ont fait que leur devoir de militaire et n'ont tiré aucun coup de feu mortel lors de l'intervention africaine. Une source sur place, en contact régulier avec un des prisonniers, décrit des conditions d'emprisonnement scandaleuses. En un an, ces hommes n'ont jamais été autorisés à voir leurs familles, ils n'ont droit qu'à un seul repas par jour, uniquement du manioc, servi à heures irrégulières pour mieux leur faire comprendre qu'ils sont à la merci de leurs geôliers.
Tous commencent à souffrir sérieusement de malnutrition, "certains sont diabétiques, ils peuvent rester jusqu'à 20 jours sans médicament", affirme notre source qui relate des traitements digne de ceux de Guantanamo, comme le fait de les enfermer dans une pièce qui se remplit d'eau, technique classique de la prison américaine pour faire parler ses détenus, et reconnue comme étant une forme de torture.
"Les gens ont peur"
"Ces gens sont considérés comme des parias, ceux qui sont sortis n'ont pas été réintégrés, pas payés et ne touchent aucune retraite de l'armée", affirme notre source qui raconte que les troupes tanzaniennes envoyées par l'Union Africaine ont été très surprises de la situation à Anjouan à leur arrivée. "Ils ont trouvé la situation bien calme, alors qu'on leur avait parlé de tortures, de viols, de morts, mais curieusement ils n'ont jamais trouvé les victimes des soi-disant exactions du régime de Bacar. Ils ont eu l'impression d'avoir été utilisés pour un coup d'Etat."
Le président tanzanien aurait d'ailleurs récemment refusé de rencontrer le président Sambi lors de son passage sur le territoire. Lors de son dernier séjour sur l'île d'Anjouan, Sambi a aussi interdit les défilés de femmes de détenus et a refusé de les rencontrer. Les femmes du Nyumakele ont d'ailleurs été empêchées de rejoindre la capitale à cette occasion par les militaires. Les familles des détenus en ont appelé à toutes les autorités du pays, à la ligue des droits de l'homme des Comores, sans obtenir aucune réponse.
"Les gens là-bas ont peur", résume notre source qui réside à Anjouan et raconte qu'il y a quelques semaines, quatre jeunes ont été arrêtés pour détention de cassettes vidéo d'un meeting anti Sambi. Ils sont aujourd'hui en prison pour atteinte à l'intégrité de l'Union des Comores et diffamation contre le président.
Hélène Ferkatadji
L'appel des familles des détenus
Les familles des détenus ont envoyé un appel à diverses organisations internationales. Extraits.
"Ce qui est frappant n'est pas leur détention, mais la forme de cette détention que les autorités judiciaires, politiques et même militaires feignent de méconnaitre. Le peuple comorien en général et en particulier les Anjouanais ont défilé jours et nuits, aux fins de voir leurs frères libérés, mais jusqu'à maintenant nous ignorons leurs chefs d'accusation et les responsables de cette détention illégale.
L'état-major consulté par une délégation des familles des militaires séquestrés réfute toute accusation et indexe la présidence de l'Union. L'assemblée de l'Union saisie, celle-ci promet sans réaction. Le ministre de la justice saisi, celui-ci ne se prononce même pas. La Fondation comorienne des droits de l'homme saisie conseille aux familles des victimes de faire un recours auprès d'un avocat, alors que le parquet d'Anjouan, ayant compétence sur cette affaire, ne dispose depuis plus de neuf mois d'aucune procédure judiciaire pour les personnes détenues à Ngazidja en provenance d'Anjouan.
(…) Les familles que nous sommes souffrent et nos détenus souffrent de malnutrition, de traitements inhumains et de conditions illégales de détention."
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