Créée le 1er janvier 2006, la CACM a vu le jour à Mayotte grâce à l'ordonnance 2002-242 issue de la loi du 21 février 2002. "Avant, il n'y avait rien du tout", précise Abdallah Attoumani, le directeur de la CACM, "les partenaires sociaux se sont mis au travail de 2003 à octobre 2005 pour aboutir à la création de la caisse, avec l'appui de la DTEFP". Avant que la caisse commence à les indemniser en août 2006, les chômeurs mahorais avaient donc droit à aucune indemnisation. Depuis sa création, la CACM est en pleine expansion : elle compte aujourd'hui 14 agents alors qu'au début Abdallah Attoumani était tout seul.
Contrairement à la Caisse d'allocations familiales ou à l'ex-ANPE de Mayotte, la CACM n'est pas rattachée à la Réunion, car elle a été créée par les partenaires sociaux locaux, et possède donc une autonomie de gestion. "Nous avons beaucoup travaillé avec les Assedic de la Réunion, celles de Paris et l’Unedic pour nous aider au niveau technique", concède toutefois le directeur, qui réclame que Mayotte bénéficie des mêmes moyens humains, techniques et financiers que la France a accordé aux Réunionnais.
Comme pour les Assedic en Métropole, la CACM est une association loi 1901. Son conseil d'administration est composé de représentants des employeurs et des salariés à parité : côté employeurs, deux membres du Medef, un membre de la FMBTP et un de la Capeb ; côté salariés, deux membres de l'UTFO et un de la CGTMa. Ce sont ces syndicats qui ont signé les accords de création de la caisse, c'est pourquoi on n'y retrouve pas encore les autres, comme la Cisma-CFDT ou la CFE-CGC par exemple.
"Le régime est le même que celui créé au niveau national en 1958, nous avons le même fonctionnement, la seule différence c'est le nom", explique Abdallah Attoumani. "En 1958, le taux de cotisation était symbolique, comme ici. Il faut suivre l'évolution de la société pour pouvoir les augmenter". En effet, contrairement à la Métropole où les taux de cotisation sont de 2,4% pour la part salariale et de 4% pour la part patronale, à Mayotte, ils ne sont que 0,5% pour la part salariale et 0,6% pour la part patronale. De plus, ces taux sont tous les deux plafonnés à 1.000 euros, alors qu'il n'y a aucun plafond en Métropole et dans les Dom. "Au niveau national aussi, on n'a pas commencé avec des taux élevés, il a fallu attendre 50 ans", tient à souligner le directeur de la CACM.
1.300 entreprises cotisantes pour 60 chômeurs indemnisés par mois
Dans l'objectif de la départementalisation, il faudra que les taux s'alignent progressivement sur ceux pratiqués en Métropole et dans les Dom, en vue d'une éventuelle fusion avec l'ANPE au sein du Pôle Emploi, avec une caisse qui perdra son autonomie et qui viendra alimenter la caisse du Pôle Emploi au niveau national. Mais c'est une perspective encore très lointaine, si l'on en croit le directeur de la CACM.
"Je me soumets à la réalité locale. On n'augmentera les taux de cotisation que quand le besoin s'en fera sentir. Si on veut s'aligner d'un coup, on va prendre une part très importante pour les salariés et mettre en difficulté les entreprises. L'objectif de la CACM n'est pas d'augmenter le nombre de chômeurs mais de les aider au retour rapide à l’emploi".
"A la Réunion, les Assedic ont été créées en 1980 et les taux ne se sont alignés qu'en 1996", rappelle le directeur. "Mayotte rattrapera aussi son retard, mais les négociations entre partenaires sociaux doivent se faire de manière intelligente. Aujourd'hui, il y a environ 1.300 entreprises cotisantes, sans compter les femmes de ménage qui ne sont pas encore dans les statistiques. Quand la caisse a été créée, il n'y avait alors que les chômeurs qui avaient subi un licenciement économique qui pouvaient avoir droit à une indemnisation. Ils n'étaient que 4 à en bénéficier en août 2006. Par la suite, 30 à 40 personnes par mois en moyenne étaient indemnisées."
"Depuis le 31 mars 2008, nous avons élargi le champ d'indemnisation aux personnes en CDI qui ont été licenciées", ajoute Abdallah Attoumani. Ce qui porte désormais à 60 le nombre de chômeurs par mois en moyenne à être indemnisés pendant au maximum 7 mois. Les personnes âgées de 50 à 56 ans peuvent être indemnisées pendant 20 mois, et celles qui ont plus de 56 ans, pendant 30 mois. "Pour ceux qui n'ont pas comptabilisé les trimestres nécessaires pour avoir droit à la retraite, on peut même continuer l'indemnisation jusqu'à 65 ans", précise le directeur, qui souhaite encore élargir le champ des bénéficiaires.
"Nous avons également demandé un agrément à l'Etat pour pouvoir indemniser les CDD. Pour l'instant, on élargit le champ d'indemnisation sans avoir besoin d'augmenter les taux de cotisation. Avec la création d'emplois et d'entreprises à Mayotte, le nombre de cotisants augmente. Le seul problème, ce sont les retards de paiement des entreprises, souvent à cause des difficultés financières du conseil général et des communes."
"Même avec le département, le gouvernement peut décider le maintien de la CACM"
L'indemnisation s'élève à 75% du salaire brut, et est plafonnée à 1.000 euros pour les 3 premiers mois. Les 4 mois suivants, elle s'élève à 50%, toujours avec le même plafond. Il faut cotiser au moins 7 mois pour avoir droit à l'indemnisation. Les chômeurs doivent se rendre une fois par mois au siège de la CACM pour indiquer leurs démarches de recherche d'emploi. Un système qui se rapproche du droit commun dans son fonctionnement, mais pas encore dans ses montants d'indemnisation (voir encadré).
"Comme il y a une différence de 130 euros avec le Smig métropolitain, les taux d'indemnisation sont moins importants car sinon l'indemnisation serait plus importante qu'un salaire. On ne doit pas inciter les gens à rester chez eux. Il faut que les entreprises tournent, qu'elles aient de la main d'œuvre. On n'est pas là pour faire de l'assistanat mais pour aider les demandeurs d'emploi et les entreprises", résume le directeur de la CACM.
Pour les aider à retrouver du travail, les frais de formation ou de complément de formation des demandeurs d'emploi indemnisés sont pris en charge à 100% par la CACM. "Au niveau de l'accompagnement des demandeurs d'emploi, nous avons également demandé à l'Etat l'application à Mayotte de l'Aide à la formation préalable à l'embauche (AFPE)", tient à souligner le directeur.
"Nous avons mis en place une enquête des besoins en main d'œuvre en 2007 à laquelle ont répondu les chefs d'entreprises, afin de mieux orienter les chômeurs. Nous organisons aussi des petits déjeuners pour rencontrer les chefs d'entreprises par secteurs d'activités : le premier a eu lieu à la fin de l'année 2008 avec les entreprises de sécurité, d'autres sont prévus en 2009."
La CACM a envoyé en novembre 2008 à l'instance provisoire du Pôle Emploi à Paris un projet de convention et attend pour l'instant la réponse, qui permettra d’aider au mieux les demandeurs d’emploi à retrouver un emploi le plus rapidement possible. "Si nous sommes département en mars 2011, nous allons travailler avec le Pôle Emploi pour réfléchir à la fusion. Mais même avec le département, le gouvernement peut décider le maintien de la CACM. S'il y a fusion, la caisse deviendra nationale, même si les taux ne sont pas alignés. Comme pour les impôts locaux où chaque collectivité définit ses taux, la CACM pourra faire de même sans forcément s'aligner."
Et le directeur d'insister sur le caractère progressif de la départementalisation dans ce domaine encore très jeune de l'assurance chômage à Mayotte : "la fusion avec le Pôle Emploi serait une catastrophe, si on applique les mêmes taux qu'en Métropole. Tout doit être progressif. Même si on est un département, le système d'assurance chômage doit évoluer de manière réfléchie."
Julien Perrot
Petit historique du rapprochement des Assedic et de l'ANPE en Métropole et dans les Dom
– 1958 : Création de l’Unedic (Union nationale pour l’emploi dans l’industrie et le commerce).
– 1967 : Création de l’ANPE (Agence nationale pour l’emploi).
– 1996 : Transfert de l’inscription des demandeurs d’emploi aux Assedic.
– 2001 : Mise en place du Plan d’aide au retour à l’emploi (Pare) avec l’Unedic. L’Unedic participe désormais à hauteur de 26% du budget de l’ANPE.
– 2005 : Création des Maisons de l’emploi (loi de cohésion sociale) pouvant réunir sous un même toit ANPE, Assedic, mission locale, associations, etc.
– 2006 : Mise en place du Suivi mensuel personnalisé (SMP) à l’ANPE pour renforcer l'accompagnement des demandeurs d'emploi.
– 2007 : Création d’un groupement d’intérêt économique ANPE/Unedic visant à la convergence vers un système informatique unique.
– 14 février 2008 : Publication au JO de la loi relative à la fusion ANPE/Assedic
– 30 septembre 2008 : Publication au JO du décret relatif à l’organisation du service public de l’emploi
– 19 décembre 2008 : Nomination par décret de Christian Charpy au poste de directeur général et de Dominique-Jean Chertier à la présidence de Pôle emploi.
– 5 janvier 2009 : Le 39.49 devient le numéro unique pour accéder à des informations sur l’inscription, l’actualisation, l’indemnisation et la recherche d’emploi. Le portail internet pole-emploi.fr devient l'unique site pour la consultation, le dépôt des offres et des CV, l’actualisation de la situation du demandeur d’emploi, etc.
Le calcul du montant de l'assurance chômage en Métropole et dans les Dom
Les périodes de référence
Il s’agit du nombre minimal de jours pendant lesquels l’intéressé a cotisé au régime Assedic durant la période qui précède la rupture du contrat de travail. La durée d’indemnisation varie selon celle de cette période de référence. On distingue 4 périodes :
1) 6 mois pendant les 22 mois précédents, qui donne droit à 7 mois d’indemnisation
2) 12 mois pendant les 20 mois précédents, qui donne droit à 12 mois d’indemnisation
3) 16 mois pendant les 26 mois précédents, qui donne droit à 23 mois d’indemnisation
4) 27 mois pendant les 36 mois précédents, qui donne droit à 36 mois d’indemnisation pour les chômeurs de 50 ans et plus.
Les chômeurs indemnisés à l’âge de 60 ans et six mois perçoivent leur allocation jusqu’à l’âge de 65 ans tant qu’ils ne peuvent bénéficier d’une retraite à taux plein.
Les autres conditions
1) N’avoir pas quitté volontairement son emploi. Un salarié qui quitte volontairement son dernier emploi (ou son avant-dernier si le dernier a duré moins de trois mois) n’a pas droit aux allocations, sauf cas de démissions “légitimes”. Au bout de quatre mois, il peut toutefois demander aux Assedic un réexamen de son cas personnel.
2) Etre physiquement apte à exercer un emploi. En cas de maladie, l’allocation chômage est en principe remplacée par une allocation journalière de sécurité sociale.
3) Etre inscrit comme demandeur d’emploi ou suivre une formation agréée.
4) Etre à la recherche permanente et effective d’un emploi. Mais les personnes âgées de plus de 57 ans et 6 mois, et celles qui ont plus de 55 ans et qui totalisent plus de 160 trimestres d’activité sont dispensées de recherche d’emploi. Ce dispositif sera toutefois supprimé progressivement pour 2012.
5) Etre âgé de moins de 60 ans, sauf si le chômeur ne totalise pas 160 trimestres d’activités pour percevoir une retraite à taux plein. Dans ce cas, les allocations lui sont versées jusqu’à ce que ce plancher soit atteint.
Montant de l’indemnité
Le salaire de référence est le montant brut de l’ensemble des rémunérations (salaire, avantages en nature, etc.), ramené à un montant journalier. Le salaire journalier de référence (SJR) est plafonné à quatre fois le montant du plafond de la sécurité sociale. Le montant brut de l’indemnité Assedic est égal à la plus élevée des deux sommes suivantes : 57,4% du SJR ou bien 40,4% du SJR + 10,93 euros par jour. L’allocation brute journalière ne peut être inférieure à 26,66 euros, ni supérieure à 75% du SJR.
– Si le salaire mensuel brut est inférieur à 1.066 euros par mois, l’allocation sera égale à 75% du salaire brut, sans retenues sociales.
– Si le salaire mensuel brut est compris entre 1.066 et 1.168 euros par mois, l’allocation sera égale à 26,66 euros par jour, sans retenues sociales.
– Si le salaire mensuel brut est compris entre 1.168 et 1.928 euros par mois, l’allocation sera égale à 40,4% du SJR + 10,93 euros par jour, avec 3% de retenues sur l’ancien salaire pour la retraite.
– Si le salaire mensuel brut est compris entre 1.928 et 11.092 euros par mois, l’allocation sera égale à 57,4% du SJR, avec 11,37% de retenues sur l’allocation (CSG-CRDS et retraite).
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