"Le gouvernement a bien avancé"
Grandement satisfait du travail déjà accompli et du respect des délais, le comité a tout de même précisé que la période qui s’ouvre, celle de la deuxième phase allant de septembre à décembre 2008, est l’une des plus importantes puisqu’une mission d’information de la Commission des lois du Sénat séjourne actuellement sur le territoire pour fixer le calendrier et les modalités législatives du référendum.
L’autre temps fort de cette seconde phase sera "la tenue d’un débat au Sénat avant le 15 novembre et des discussions avec le Gouvernement afin de parvenir à une union partagée dans la départementalisation de Mayotte", a ainsi précisé le sénateur Soibahaddine Ibrahim Ramadani. Des discussions à l’issue desquelles la troisième et dernière phase commencera, "celle de la consultation et de l’adoption de la loi". Cette période sera aussi celle de la transformation de ce groupe en "Comité de campagne", s’en réjoui déjà le sénateur.
Mais avant la campagne une longue période s’impose car des doutes subsistent toujours chez beaucoup de Mahorais, mais pas pour le sous-préfet Peyrel pour qui "le gouvernement, malgré un travail assez lourd de coordination, d’échanges et d’expertise de l’ensemble des services, a bien avancé (…)". " On franchit un moment démocratique particulier pour Mayotte et pour la France", s’est-il exclamé. Et pour Ibrahim Aboubacar, Mayotte aussi a bien avancé en présentant ce "rapport d’étape stabilisé, reflétant l’opinion de la majorité, de la totalité des membres, puisqu’adopté à l’unanimité".
"Les Mahorais attendent une question claire"
Dans son état des lieux, ce document présente les bilans des Accords du 27 janvier, de la loi du 11 juillet 2001, de la loi DSIOM du 21 février 2007 et de la Résolution du 18 avril 2008. Pour le rapporteur, cette période devrait marquer "la concrétisation des engagements de l’Etat" en référence aux promesses de 1976, de 1979, de 1984 et de 2000. Et de cette concrétisation, "les Mahorais, a-t-il dit, attendent une question claire car ce comité n’a pas travaillé pour l’évolution institutionnelle, mais uniquement sur la départementalisation (…)". "Nous avons travaillé exclusivement sur comment départementaliser Mayotte, un processus indépendant de toute pression extérieure, de politique intérieure et internationale."
Le comité suggère, si bien sur le résultat du référendum l’approuve, une "mise en œuvre rapide du statut par une loi organique" avec bien sur des adaptations, comme le permet l’article 73 de la Constitution, au régime législatif et à l’organisation administrative car pour Ibrahim Aboubacar, "rien ne s’oppose à ce que le régime du droit commun soit étendu à Mayotte (…)".
"Il n’y a pas d’obstacle juridique particulier s’opposant à cette adaptation". Ce dernier demande à ce que l’on s’approprie "l’outil administratif départemental" et que l’on adopte "l’organisation départementale telle qu’elle existe dans le Dom. Nous ne voulons pas être un département à part". Et cette impulsion devrait se prolonger jusqu’au niveau européen : "la présidence française de l’Union Européenne doit faire de la départementalisation de Mayotte et de sa transformation en Rup, une de ses priorités", a conclu Ibrahim Aboubacar.
"Nous voulons rester Français pour être égaux aux Français de France"
Concernant les questions relatives au développement économique et social, le comité par la voix de son rapporteur soutient qu’"il faut apporter une réponse politique aux questions sociales, permettre la formation des Hommes, adopter une politique foncière commune", en créant notamment, comme le soutient la conseillère économique et sociale Anziza Moustoifa, un établissement foncier.
L’objectif est de parvenir à "une vision partagée des patrimoines de l’Etat et de la CDM, apporter des réponses claires au sort des immigrés présents sur le territoire – un vrai problème pour le développement, à terme pour la paix sociale, être soucieux vis-à-vis de la préservation à l’environnement et du cadre de vie, un réel désenclavement aérien et numérique du territoire, accompagner les secteurs en mutation qui se battent pour prendre le virage du développement économique… avec pour objectif d'éviter l’assistanat !"
Mais l’une des priorités du comité, c’est aussi d’améliorer les services à la personne – "un gisement d’activités, un moyen d’éradiquer la clandestinité" –, "mettre au diapason les actes et les paroles" au niveau touristique, "exploiter le potentiel aquacole à grande vitesse…". Des propositions adoptées à l’unanimité des membres siégeant au comité et qui sont aujourd’hui soumises à réflexion aux diverses forces présentes, notamment les partis politiques.
Pour Néma, par la voix de Moussa Abdou, "une seule voix compte : celle de la départementalisation sans équivoque, sans ambiguïté", rappelant au passage que son parti a voté pour la résolution et soulignant par ailleurs que la demande d’admission au comité de Saïd Omar Oili en tant qu’ancien président du CG n’a été acceptée que le 22 août, alors que celle-ci avait été adressée dès le début des travaux. Néma considère que "le statut permettra à la France d’assurer la paix sociale, la sécurité des biens et des personnes" (…) "Nous avons besoin de cette France solidaire dans le territoire français où on a le plus d’analphabètes. Nous voulons rester Français pour être égaux aux Français de France. Néma, conclu Moussa Abdou, n’est pas favorable au statu quo".
Des doutes, du scepticisme et des interrogations
Mais certains ont affiché des doutes, notamment le président du Smiam Issihaka Abdillah, car pour lui "les auditions n’ont pas franchi les frontières de l’intercommunalité". Celui-ci a demandé où en était le bilan de la loi du 11 juillet 2001 puisque celle-ci prévoyait une réunion annuelle qui n’a eu lieu qu’une seule fois à Dzaoudzi sous le haut patronage de Brigitte Girardin. Il préconise un "retour sur les éléments déjà engagés depuis 1999". Ces doutes, le président du Smiam n’est pas le seul à les avoir exprimés.
Mieux encore, le sénateur Giraud a lui fait savoir qu’il était "encore sceptique" en interpellant directement le sous-préfet : "à qui doit servir ce statut que les Mahorais réclament depuis 1958 ? Quelles sont les raisons du refus du gouvernement" ? Pour le sénateur, rien n’est clair car "nous sommes trois à discuter : les Mahorais, le Gouvernement et les Comoriens. Le problème de Mayotte n’a rien à voir avec les discussions entre la France et les Comores. Je ne peux accepter le double langage de la France", a-t-il fait savoir, avant de surprendre quelques uns en annonçant qu’il n’est "pas sûr que les Mahorais voteront en grande majorité pour la départementalisation car le bilan de la loi du 11 juillet 2001 n’a pas été fait et son application, notamment les mesures sociales positives".
"Il y a un engagement extrêmement ferme et un choix totalement assumé"
Mais pour le sous-préfet Peyrel, "il faut éviter que se développent certaines idées trompeuses. Nous avons réalisé un bilan de tout ce qui a été fait à Mayotte depuis 2001". Pour lui, pas d’ambiguïté : "le statut sert aux Mahorais pour garder une stabilité politique dans un contexte régional et mondial pas si stable. Mayotte est une richesse pour la France, notamment dans la façon dont les Mahorais vivent l’Islam. Ce statut sert aussi à répondre à un engagement. Je n’ai pas de doutes sur le statut, a-t-il dit, même s’il y a eu des lenteurs. Il y a un engagement extrêmement ferme et un choix totalement assumé. On ne discute pas avec les Comoriens sur le département. Le GTHN n’est pas une machine pour ouvrir les frontières de Mayotte aux Comores. On discute avec eux dans le cadre du GTHN, sur l’immersion de Mayotte dans l’économie régionale et les moyens d’améliorer en amont la lutte contre l’immigration clandestine, en améliorant les contrôles et en contribuant au développement des Comores. La lutte policière ne suffit pas. On n’accepte pas n’importe quoi aux Comoriens. Quand ils franchissent les limites on leur dit, notamment le refus des parlementaires comoriens de se soumettre aux contrôles policiers à l’aéroport. La feuille de route du Gouvernement contiendra cette conjonction des flux".
Cette réunion de présentation des grandes lignes du travail du comité sur la départementalisation a eu pour mérite d’avoir réuni toutes les forces vives. "Un travail dense et riche, dans un esprit simple pour faire participer toute la société, personne n’a été exclu", se félicite le président du CG. Pour lui, "chacun doit s’approprier le contenu de ce travail. Il faut adopter une telle attitude pour faire adopter ce texte à la consultation. Il faut être de nature optimiste, a-t-il appelé dans un esprit d’"unité".
Il a également tenu à souligner au sous-préfet que "les Mahorais détestent l’incertitude du statut actuel, le désordre qui règne chez nos voisins. Ils adorent la démocratie, la stabilité. Les Mahorais détestent le mépris, ils ne sont non plus partisans de la pensée unique". Une manière bien ferme de démontrer qu’un demi-siècle s’est écoulé depuis 1958, mais que la détermination mahoraise reste, elle, intacte. La sera-t-elle le jour du référendum ?
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