Une double semaine langues et médias « pour mieux s’ouvrir aux autres »

Saynètes en espagnol, jeux en anglais ou encore conversations avec un robot… Le recteur de Mayotte, Jacques Mikulovic, s’est rendu en Petite-Terre pour assister à plusieurs activités organisées par les établissements scolaires dans le cadre de la semaine des langues vivantes.

Interrogé, il ne ferme pas totalement la porte à l’apprentissage des langues régionales shimaore et kibushi dans les écoles mahoraises.

Flash Infos : Se déroulent en même temps la semaine des langues vivantes, et la semaine de l’éducation aux médias. Quels en sont les objectifs ?

Jacques Mikulovic : Cette superposition de la semaine des langues vivantes et de la semaine de l’éducation aux médias est intéressante parce qu’elles ont ceci en commun : il s’agit de s’ouvrir aux autres, et de prendre conscience que l’on n’est pas soi-même le centre du monde… que partout ailleurs, on parle d’autres langues et les codes sont différents. Ce qui nous interpelle à Mayotte, c’est le travail que nous pouvons faire sur les mobilités. Pourquoi pas un voyage à Barcelone regroupant des jeunes de Pamandzi et de Labattoir ? Je suis sûr que, dans ce cadre, les conflits de voisinage s’estomperaient… L’ouverture aux autres contribue à apaiser les tensions sociales.

F.I. : Toutes les activités présentées aujourd’hui placent le jeu au centre de l’apprentissage. Le jeu est-il idéal pour apprendre les langues ?

J.M. : Le jeu est une excellente entrée en matière. Quand on débute, le jeu est peut-être la seule pédagogie qui permet de mobiliser les quelques ressources existantes de l’élève, et de créer chez lui une appétence pour ce qui lui est enseigné.

F.I. : A Mayotte, territoire multilingue, les langues étrangères peuvent-elles être un terrain d’excellence pour nos jeunes ?

J.M. : Il est démontré que le plurilinguisme est un atout pour l’acquisition d’autres langues, et même d’autres compétences de manière générale. La problématique singulière de Mayotte réside dans le fait que la langue vernaculaire n’est pas la même pour tout le monde ! On a du shimaore, du kibushi… mais ce qui permet de faire l’unité, c’est la langue française. Il ne faut pas s’interdire d’utiliser ces langues vernaculaires comme langues passerelles si l’approche est structurante, et donc structurée. Si c’est de l’à peu près, on rate notre cible, qui est l’acquisition des savoirs fondamentaux, et notamment la maîtrise du français.

FI : Peut-on imaginer le shimaore et le kibushi enseignés dans les écoles de l’île dans les prochaines années ?

J.M. : Effectivement, shimaore et kibushi sont reconnus langues régionales. Il n’y a donc pas d’opposition à les utiliser comme langues passerelles au cycle 1 (N.D.L.R. école maternelle). Il n’y a pas non plus d’opposition à ce qu’elles soient enseignées, mais encore faut-il avoir les enseignants qualifiés. Nous allons avoir une vraie réflexion sur ce sujet, en mettant en place un conseil académique des langues régionales. Cela permettra de faire état des projets en la matière. Je pense aux langues bretonne ou basque : on a l’impression qu’elles sont très ancrées dans la culture dans leurs régions, mais lorsque l’on a proposé un Capes (N.D.L.R. certificat d’aptitude au professorat du second degré) en basque, seuls deux étudiants étaient intéressés. Donc si on mettait un Capes en shimaore, aurait-on suffisamment de candidats ? Tout cela doit être réfléchi au mieux pour accompagner l’épanouissement et l’autonomie des élèves.

Mayotte Hebdo de la semaine

Mayotte Hebdo n°1110

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