Sourires, stress et déception pour un Bac nouvelle formule à l’épreuve du Covid à Mayotte

Au lycée Younoussa Bamana, les résultats du baccalauréat 2021 ont fait des heureux. Après la débâcle de 2019 dans le département, le bilan du jour s’avère plutôt positif pour les élèves, premiers cobayes d’une nouvelle mouture de l’examen, chahutée qui plus est par la crise sanitaire.

Ce mardi matin, quelques poignées d’élèves se pressent devant les panneaux d’affichage du lycée Younoussa Bamana. Pas une foule à proprement parler, car les résultats étant disponibles sur Internet cette année, tous n’ont pas trouvé le courage, de bon matin, d’effectuer ce bout de pèlerinage jusqu’à leur établissement… Il y a aussi une autre raison à cela : “Vous ne verrez pas ceux qui ne l’ont pas eu, les déçus sont vite repartis”, glisse un Terminale STMG, lui-même un peu angoissé à l’idée de devoir retaper. “J’ai vu dix potes ce matin qui n’ont pas été admis ! Dans ma filière techno, on est juste deux ou trois au rattrapage là, les résultats doivent tomber à midi, je suis hyper stressé. Ma mère attend que ça, je te jure, elle a même prévu une grande fête !”, sourit-il comme pour évacuer la pression, en tirant nerveusement sur les deux poignées d’un loufoque bonnet rouge floqué Louis Vuitton et Supreme. Avant de prendre la poudre d’escampette dès les douze coups de midi !

Comme lui, ils sont un peu plus de 5.000 élèves à Mayotte à avoir espéré décrocher le Graal pour cette session du baccalauréat 2021, dont les résultats officiels sont tombés ce mardi dans toute la France. Un baccalauréat à la sauce Blanquer, déjà décrié par certains syndicats d’enseignants et élèves, et qui s’est heurté qui plus est à la crise sanitaire et ses vagues successives. Les élèves de Mayotte, bien qu’épargnés en octobre par rapport à leurs camarades de l’Hexagone, ont tout de même perdu trois semaines de cours en février à la faveur de la flambée épidémique. Sans compter les protocoles sanitaires et les fermetures de classe dès l’apparition d’un cas positif, en sortie de confinement. “Ça a été un peu la galère toute l’année avec le Covid, on n’a pas pu tout faire, il y a eu le confinement et tout, et ça nous a un peu limités dans notre préparation”, confirme Sarah, qui a finalement décroché sa mention Assez bien.

 

Une nouvelle formule modifiée par la crise

 

Le plus stressant ? L’oral de philosophie avec “le jury en face de toi qui connaît tout”, renchérit sa comparse Josiline, tout sourire d’avoir vu écrit “admise” à côté de son nom. « Choukran j’ai eu la moyenne, en classe j’avais jamais la moyenne ! C’est un peu… ouf ! évanouissement”, mime l’élève en poussant un énième soupir de soulagement. Une chance pour elle donc, même s’il était prévu que la meilleure note entre la moyenne annuelle et l’épreuve finale serait retenue pour l’épreuve de philosophie. Objectif : éviter de pénaliser les élèves dont le parcours a été chahuté par la crise sanitaire. Ainsi le contrôle continu représente-t-il exceptionnellement cette année 82% de la note finale et les 18% restants correspondent aux épreuves de philosophie et du grand oral. À la base, la nouvelle formule prévoyait d’organiser l’examen autour de quatre épreuves écrites et d’un grand oral (60% de la note), et d’un contrôle continu (composé à 30% par les “épreuves communes” organisées par les établissements, et à 10% des bulletins scolaires).
Renforcer le contrôle continu

Un contrôle continu que le ministre Jean-Michel Blanquer entend encore renforcer pour la prochaine édition, au grand dam de certains. “Le truc, avec ça, c’est que dès que tu as une mauvaise note, ta moyenne peut rapidement tomber en-dessous de 16”, explique Brieuc, la tête de sa classe qui visait la mention Très bien. Bingo ! Le premier de cordée en Système informatique et numérique a réussi son coup. Son diplôme en poche, le fan de programmation s’envole satisfait pour un BTS SIO (services informatiques aux organisations) en métropole. Et fait la fierté de son professeur principal. “Cette année, ça a été un peu plus compliqué avec le Covid, mais on ne s’est pas laissé dépasser ! Dans cette classe, ils sont 30 et il doit n’y en avoir qu’un seul au rattrapage. C’est une vraie fierté pour moi d’avoir pu apporter ma pierre à l’édifice”, se gargarise Monsieur Dahya Petit.

Dans l’ensemble, le lycée Younoussa Bamana affiche un score honorable pour cette nouvelle session du baccalauréat, avec un total de 73.87% d’élèves diplômés du premier coup. Au niveau du département tout entier, la filière générale obtient un taux de réussite de 73.60% contre 54.80% pour les bac pro. Des chiffres légèrement en deçà du cru 2020, avec respectivement 80.1% et 76.50% d’admis sans rattrapage. Jusqu’à la fin de la semaine, les oraux offriront une seconde chance aux candidats malheureux. “Nous ne sommes pas surpris, cela correspond à ce à quoi nous nous attendions. Mis à part la philosophie et le grand oral, tout a été passé en contrôle continu. À la différence de 2020, il y a eu moins de semaines de confinement cette année, donc plus de notes. Cela se rapproche de la réforme du nouveau bac et nous sommes dans la vérité des prix”, réagit le recteur Gilles Halbout. Contre l’idée tenace d’un bac “bradé”. “C’est un vrai bac !

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