Alors que l’accès à l’enseignement supérieur reste limité dans le 101ème département, Mayotte vient de décrocher un plan d’investissements d’avenir de 250.000 euros et une labellisation du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche pour lancer son campus connecté. Les 15 premiers étudiants 2.0 sont attendus devant les écrans à la prochaine rentrée.
Décrocher son diplôme d’ingénieur Bac+5, le tout sans sortir un orteil de Mayotte ? C’est le pari qu’ont fait pour les étudiants le rectorat, le CUFR, le Département, la CCI et la Cadema, en répondant à un appel à projets afin de créer le premier “campus connecté” de l’île. Objectif : “favoriser l’accès à l’enseignement supérieur”, résume Aurélien Siri, le directeur du centre universitaire. “Vous connaissez l’histoire du CUFR, et la croissance que nous avons connue, mais malgré cela, nous n’arrivons pas à répondre à tous les besoins. Le campus connecté va apporter une offre complémentaire avec des formations certifiantes et diplômantes pour des métiers peu pourvus, et pour lesquels le CUFR ne forme pas”, développe-t-il.
Avec guère plus de 1.600 places, la petite université de Dembéni peine en effet à instruire les jeunes cerveaux de l’île, et nombreux sont ceux qui doivent poursuivre leurs études supérieures à La Réunion ou en métropole. Pour les plus chanceux… “Beaucoup d’étudiants ne peuvent pas se déplacer pour des raisons financières ou familiales, et nous avons souhaité participer à ce projet pour que ces jeunes puissent suivre un cursus universitaire tout en restant proches de leur famille”, expose Sarah Mouhoussoune, la 7ème vice-présidente de la communauté d’agglomération Dembéni-Mamoudzou.
Des formations en lien avec les besoins des entreprises
Et c’est tout l’intérêt de ce “campus connecté”, qui accueillera dès la prochaine rentrée une première promotion d’une quinzaine d’élèves. Concrètement, les lycéens, invités à candidater via leur espace Parcoursup, pourront débuter leurs études supérieures à distance, en intégrant “une formation non présente sur le territoire et en lien avec les besoins des entreprises de Mayotte”. Une vision globale du développement du territoire, qui explique la participation de la chambre de commerce et d’industrie. “Mayotte bouge, et Mayotte avance, quoi qu’on en dise”, salue Mohamed Ali Hamid, le président de la CCI.
Droit, marketing, gestion… “Nous avons identifié beaucoup de formations à distance, qui vont jusqu’au niveau Master. Nous allons pouvoir diplômer nos jeunes jusqu’à Bac+5 ! Et quand on voit leur taux d’employabilité à Mayotte, c’est indispensable”, se gargarise Aurélien Siri. Plus précisément, des formations d’IAE (instituts d’administration des entreprises), d’écoles d’ingénieurs, ou encore dans le secteur du tourisme pourraient bien se retrouver en haut de la pile pour la première promotion. À noter que 20% des places pourront être dédiées aux actifs en reconversion, aux femmes et mères au foyer à la recherche d’une formation, ou encore aux demandeurs d’emploi.
Un PIA de 250.000 euros pour commencer
Pour les détails techniques, ce projet s’inscrit dans une démarche de labellisation, nationale, de 49 nouveaux campus connectés, entamée par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, pour une enveloppe totale de 25 millions d’euros, financés par le Plan d’investissements d’avenir (PIA). Mayotte, elle, a décroché un joli chèque de 250.000 euros pour le lancement du campus. “Toutes les académies n’ont pas été servies, et surtout pas toutes les académies d’Outre-mer. Il ne s’agit pas de se réjouir du malheur des autres, mais plus de mesurer notre chance”, se réjouit le recteur Gilles Halbout. Avant de glisser, sur une note plus grave au regard des récents événements qui ont endeuillé son institution : “Il y a des mauvaises nouvelles sur l’île, presque chaque semaine, et il y a aussi des très bonnes nouvelles et des très belles réussites collectives”.
Collectives, car tout le monde a mis la main à la patte, et en un temps record, une fois n’est pas coutume. Contactée en novembre, la Cadema “n’a pas hésité à participer”, souligne Sarah Mouhoussoune. Ni même à mouiller la chemise. En l’espèce, un budget de 300.000 euros voté d’emblée pour aménager un tiers-lieu, capable de recevoir ces étudiants 2.0. Pour l’instant, le local a élu domicile dans la Maison pour tous d’Hajangoua. Mais à terme, les partenaires espèrent bien voir le campus sortir de terre, non loin de là, sur un terrain déjà identifié à côté de l’école primaire. “Nous tablons sur deux ans”, mise l’élue communautaire. En tout, le budget du projet pour Mayotte se chiffre à à 1,7 million sur cinq ans, dont 700.000 euros pour la Cadema, 360.000 euros pour le conseil départemental, 60.000 euros pour la CCI, et près de 620.000 euros pour le CUFR et le rectorat. Et un ticket gagnant pour Mayotte, un !