Ouvriront ou n’ouvriront pas ? C’était la question que tout le monde se posait la semaine dernière. Après deux reports des ouvertures des écoles à Mayotte, la décision était très attendue par l’ensemble des agents de l’Éducation nationale et les familles. Même si la décision finale revient aux maires, le rectorat s’est fortement mobilisé pour permettre une reprise cette semaine.
“Compte tenu de la situation locale, et de l’augmentation du nombre de cas, on ne peut pas prendre le risque d’ouvrir ces écoles. Il y a plus de risques à attraper le virus maintenant à l’école qu’il y a deux mois” annonce d’emblée Rivomalala Rakotondravelo, secrétaire départemental du syndicat de l’enseignement du premier degré SNUipp FSU. Pourtant Gilles Halbout, le recteur de Mayotte, n’est pas du même avis. Il estime que “ce n’est ni aux maires, ni au rectorat, ni aux syndicats d’évaluer les risques épidémiologiques. Cela ne fait pas partie de leur compétence ni de la mienne.” Selon lui seul, le gouvernement peut assumer cette responsabilité et donner le feu vert. Et il a été donné le week-end dernier par le préfet. Avec l’autorisation des maires, une vingtaine d’écoles accueillent dès aujourd’hui un nombre d’élèves très limité. Ces établissements devront respecter quatre principes qui sont le maintien de la distanciation physique, l’application des gestes barrières, la limitation du brassage des élèves et le nettoyage et la désinfection des locaux et matériels. Pour le recteur, l’objectif n’est pas de se précipiter, mais plutôt d’accompagner les communes à respecter le protocole sanitaire. “On sera plus prudents que les élus eux-mêmes. On aimerait ouvrir entre 15 et 20 écoles la première semaine puis monter à 50 la deuxième semaine, pour arriver à une moitié des écoles pour les quatre dernières semaines. Le rythme c’est de ne pas aller trop vite”, indique Gilles Halbout. Malgré toute la mobilisation de l’Éducation nationale qui a reçu 300.000 nouveaux masques chirurgicaux et 1,5 tonne de gel hydroalcoolique la semaine dernière, les syndicats des enseignants, les parents d’élèves et certains maires ne sont pas rassurés. Ils considèrent que beaucoup de questions restent encore sans réponses. La désinfection des salles de classe semble être la plus préoccupante puisqu’elle a été évoquée à plusieurs reprises. “Ces salles de classe doivent être désinfectées plusieurs fois par jour. Il faut des agents pour cela et le rectorat n’en dispose pas assez pour assurer cette mission. De plus, il doit y avoir des formations à la désinfection, car c’est une opération particulière avec des produits adéquats. Il ne s’agit pas simplement de nettoyer la classe”, précise Henri Nouiri, responsable départemental du SNES-FSU, syndicat des enseignants du second degré. À cela s’ajoutent les problématiques de points d’eau dans les établissements, le contrôle de la température des élèves chaque matin ou encore le respect de la distanciation physique dans les collèges et lycées qui sont tous surpeuplés à Mayotte. “On y va avec une grande prudence pour les établissements du second degré. On prendra un élève sur deux”, affirme le recteur.
Préparation de la nouvelle année scolaire
Tous ces questionnements et les réponses apportées permettent surtout de préparer la rentrée 2020. L’Éducation nationale doit désormais apprendre à composer avec l’épidémie sur le long terme. Pour cela, le temps est précieux. “Il ne faut pas reporter à dans deux mois ce qu’on peut faire maintenant. Ce n’est pas à partir du 15 août qu’on va commencer à mettre les écoles aux normes pour le 23. Tout ce que nous faisons maintenant est aussi une manière de préparer la prochaine rentrée qui de toute manière sera différente des autres”, explique Gilles Halbout. Son ambition est de mettre aux normes les 184 écoles de l’île pour la rentrée de fin août. Du côté des syndicats, les responsables sont plutôt dubitatifs. “Compte tenu des moyens que l’on connait dans les établissements, le protocole sanitaire est difficilement applicable. Néanmoins si on ne l’applique pas, on prend des risques et nous ne pouvons accepter cela”, prévient Henri Nouiri du SNES-FSU.
Même son de cloche pour le SNUipp FSU. “Le rectorat peut toujours faire un passage en force, mais nous serons très vigilants pour vérifier si les normes sont respectées. On ne fera plus de bricolage”, avertit Rivomalala Rakotondravelo. Il est également important de préparer les élèves à leur nouveau quotidien à l’école. Raison pour laquelle la reprise à quelques semaines des vacances scolaires serait nécessaire. Les élèvent pourront apprendre les nouveaux gestes à adopter à l’école et connaîtront les règles. Le recteur de Mayotte est conscient des réticences qui fusent de toutes parts, et il se veut rassurant. “Il faut être vigilant, mais il ne faut pas non plus être catastrophique. On prépare la rentrée avec beaucoup de prudence et de raison. On ne fait pas prendre de risques aux enfants.”
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